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Levée de la carence en cas de fausse couche : "Une très bonne idée" pour faire face à "un deuil un peu particulier", selon l'obstétricien Israël Nisand

Elisabeth Borne a annoncé la levée des jours de carence en cas de fausse couche mercredi. Le dispositif doit entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2024.
Article rédigé par franceinfo
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"Il faut comparer" la fausse couche "à un deuil un peu particulier d'un enfant que personne n'a connu", explique l'obstétricien Israël Nisand. Photo d'illustration. (FABIAN SOMMER / DPA / MAXPPP)

Elisabeth Borne a annoncé mercredi 1er mars la levée des jours de carence lors d'un arrêt maladie en cas de fausse couche. Pour Israël Nisand, ancien président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français, professeur émérite de gynécologie obstétrique, ce dispositif, qui doit entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2024, est "une très bonne idée". Ce n'est pas "un arrêt maladie banal", souligne Israël Nisand sur franceinfo. "Il faut comparer cela à un deuil un peu particulier d'un enfant que personne n'a connu", explique l'obstétricien.

franceinfo : Est-ce que ce congé maladie peut aider les femmes à surmonter leur traumatisme ?

Israël Nisand : C'est une très bonne idée. Parce que la fausse couche allie en même temps un problème physiologique difficile à gérer, mais aussi une très grande déception psychologique. Et outre le fait que les femmes parfois saignent beaucoup et ont mal, leur dépression au moment où la fausse couche se produit est telle que souvent elles ne peuvent pas prendre le travail et elles ont besoin d'un temps d'arrêt. Je trouve que c'est une très bonne idée de faire en sorte que ça ne soit pas comme un arrêt maladie banal et que ça ne grève pas leur budget.

Pourquoi la société ne parle pas plus des fausses couches ?

Les femmes ne parlent pas parce que, à tort, elles se sentent souvent culpabilisées, elles ont honte, elles se demandent ce qu'elles ont fait pour mériter cela. Ça fait partie aussi de leur intimité de ne pas être obligées de révéler à tout le monde ce qui leur arrive.

"La déception est souvent tellement grande que les femmes souhaitent garder le secret sur cet événement de leur vie et je les comprends."

Israël Nisand, obstétricien

à franceinfo

Pour bien comprendre, il faut comparer cela à un deuil. Mais un deuil un peu particulier, le deuil d'un enfant que personne n'a connu, mais que la femme avait déjà investi sur le plan psychique et parfois son compagnon également. Ça fait partie pour nous, les gynécologues obstétriciens, de ce qu'on appelle le deuil périnatal, avec sa complexité particulière qui est le deuil de quelqu'un que personne d'autre n'a connu. C'est donc assez difficile à vivre.

Est-ce qu'il y a un suivi psychologique après la fausse couche ?

Le suivi psychologique est utile pour beaucoup de femmes. Certaines ne le demandent pas, d'autres ne le demandent pas mais en ont besoin. Et c'est au médecin de voir si une femme arrive à gérer son deuil seule ou si elle a besoin d'aide.

Est-ce que la France est en retard par rapport aux autres pays ?

Sur le plan de cette aide psychologique aux femmes et au deuil périnatal, oui. Les actes des psychologues ne sont pas reconnus par la Sécurité sociale et ne sont donc pas remboursés. Si bien qu'un hôpital qui embauche des psychologues le fait en augmentant sa ligne des dépenses sans augmenter sa ligne des recettes.

"Nous avons assez peu de psychologues dans les hôpitaux. Et si on ne met pas en œuvre un travail psychologique après un tel événement, c'est souvent au détriment de la femme."

Israël Nisand, obstétricien

à franceinfo

Ce serait une bonne chose, en même temps qu'on enlève ces jours de carence, qu'on permette aux femmes d'avoir un suivi psychologique dans le deuil périnatal.

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