Levée de la carence en cas de fausse couche : "Une reconnaissance de ce que les corps subissent", selon le collectif fausse couche, vrai vécu
Le gouvernement entend lever un tabou sur un phénomène courant : les fausses couches. Une femme sur dix en subit une au cours de sa vie. La Première ministre, Elisabeth Borne, l'annonce dans les colonnes du magazine Elle mercredi 1er mars. Elles auront désormais droit à un congé maladie sans jour de carence en cas d'arrêt naturel de la grossesse.
L'objectif est de donner aux femmes la possibilité de se remettre physiquement et psychologiquement d'une fausse couche. Elles pourront s'arrêter de travailler le temps nécessaire en accord avec leur médecin sans retenue sur le salaire comme c'est le cas habituellement. Lors d'un arrêt maladie, les trois premiers jours ne sont pas rémunérés. Le gouvernement veut lever le frein qui pouvait empêcher les femmes de prendre le temps de récupérer. Le dispositif doit entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2024 et coûtera huit millions d'euros, sur le budget de la sécurité sociale.
La mesure sera annoncée officiellement le 8 mars, à l'occasion de la journée internationale des droits des femmes. 200 000 grossesses par an, soit une grossesse sur quatre, s'arrêtent au cours des cinq premiers mois. Cela a été une épreuve pour Flora qui sera bientôt maman pour la première fois. "Je suis enceinte de sept mois et demi et j'espère que la grossesse ira à terme cette fois-ci", confie-t-elle.
Le sentiment de solitude et de culpabilité
C'est déjà la troisième grossesse de cette éducatrice spécialisée. La première s'est arrêtée en septembre 2021, une semaine après un test positif. Un évènement qu'elle a banalisé dit-elle mais elle en a subi une seconde en janvier 2022 à deux mois et demi. "Ça a été vraiment les montagnes russes, raconte-t-elle, parce que j'y allais vraiment la fleur au fusil en me disant que tout allait bien et que c'était fini". Avant qu'on l'envoie aux urgences pour des examens complémentaires, puis qu'elle subisse un curetage, une opération qui consiste à aspirer la poche et le fœtus. "Dans un premier temps ce qu'on ressent, c'est beaucoup de culpabilité : 'Pourquoi nous ? Qu'est-ce qu'on a fait de mal ?"
"C'est quelque chose d'assez traumatique, douloureux psychologiquement. On s'est retrouvés un peu seuls."
Floraà franceinfo
La solitude et les réactions physiques, sont une réalité incompatible avec un retour au travail décrit l'autrice Judith Aquien du collectif Fausse couche, vrai vécu. "Les saignements sont énormes, ils demandent de porter des serviettes de maternité de cinq centimètres d'épaisseur", explique-t-elle. Elle évoque aussi "les contractions, les évacuations de caillots de sang énormes et douloureux", potentiellement "l'évacuation de l'embryon lorsque ce dernier n'a pas été évacué par la chirurgie". "C'est extrêmement lourd", résume Judith Aquien. "Cette levée de la carence est une reconnaissance des corps et de ce qu'ils subissent, c'est une excellente nouvelle."
Accompagnement psychologique du couple
Les partenaires ne pourront pas bénéficier de cette mesure mais c'est bien le couple de parents confronté aux fausses couches que le gouvernement entend soutenir sur le plan psychologique avec une proposition de loi en ce sens portée par la députée Modem Sandrine Josso et examinée à l'Assemblée le 8 mars. Anxiété, dépression, près d'une femme sur trois souffrirait de stress post-traumatique après une fausse couche. Autant de symptômes non pris en charge. En 2023, le gouvernement compte mettre en place un accompagnement pour mieux former les professionnels de santé "avec l'agence régionale de santé de tous les territoires de France". Le but sera de " développer une réseau au sein de tous les territoires pour permettre aux couples qui le demandent et qui sont vraiment en nécessité d'être accompagnés de manière idéale." Cet accompagnement psychologique pourra être prescrit par les sages-femmes.
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