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Numéro d'urgence unique : "Une fausse bonne idée", selon le chef du Samu du Nord

Le chef du Samu du Nord, invité sur franceinfo mercredi, estime souhaitable, plutôt qu'un numéro unique pour contacter les urgences comme le prévoit un projet de loi adopté mardi, que coexistent un numéro pour la sécurité et un autre pour la santé.

Article rédigé par franceinfo
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La plateforme d'appels du 115, le 22 décembre 2005 dans les locaux du Samu social de Paris. (JACK GUEZ / AFP)

Le Dr Patrick Goldstein, chef du Samu du Nord et du pôle "urgences" du CHU de Lille, invité sur franceinfo mercredi 17 novembre, estime que l'instauration d'un numéro d’urgence unique est une "fausse bonne idée". Le Parlement a en effet adopté mardi un projet de loi qui prévoit notamment la création d’un numéro de secours unique. Un texte porté par le député LREM Fabien Matras, et voté à l'unanimité par les 123 députés présents dans l'hémicycle. Différentes expérimentations vont être menées pendant deux ans dans des régions tests.

franceinfo : Les urgentistes ne sont pas demandeurs de ce numéro unique, mais est-ce que cette expérimentation a tout de même un intérêt ?

Dr Patrick Goldstein : L’expérimentation est toujours intéressante, il est hors de question de la refuser, et de toute manière le Parlement a voté. Ce ne sont pas les urgentistes qui ne sont pas demandeurs, d'ailleurs, mais le monde de la santé qui pense qu’il faut effectivement simplifier pour aboutir à deux numéros, un numéro unique "sécurité", le 112, associant la sécurité civile et la sécurité intérieure, et un numéro unique "santé", le 113, pour le non-programmé, l'ambulatoire, dont l’urgence médicale. Les deux étant parfaitement interconnectés, la vraie modernité, elle est là. Le numéro unique, dit "112", est une fausse bonne idée, on sait qu’aujourd’hui, elle est dépassée. Les expériences étrangères nous le montrent. Nous regrettons, nous professionnels, de ne pas avoir été écoutés, ni entendus. Nous regrettons que tous les rapports des différents experts et commissions n'aient peut-être pas été correctement intégrés. Nous avons interrogé les usagers lors de la création du nouveau service d'accès aux soins et les usagers sont très attachés à une filière santé individualisée.

Le moment de l'expérimentation est-il bien choisi, en cette période compliquée dans les hôpitaux ?

Ce n'est pas le moment de nous faire faire des expérimentations. Olivier Véran, notre ministre, s'est prononcé sur les risques qu'il y avait en ce moment : d'une part, la résurgence du Covid, et d'autre part, nous sommes inquiets parce que la grippe arrive. En ce moment, on a d'autres sources de préoccupations. Les urgences, le Samu, le Smur, la réanimation ont fait la preuve dans ces derniers mois de leur engagement, respectons-les un tout petit peu.

La question centrale n'est-elle pas d'avoir la bonne personne au bon endroit pour répondre au bon moment ? Y a-t-il suffisamment de personnes derrière ces numéros ?

Je pense qu'aujourd'hui il y a une volonté très forte de former ces assistants de régulation médicale. Il y a probablement un travail de mutualisation qui est nécessaire et nous sommes à l'aube d'une révolution technologique. Nous proposons des plateformes santé modernes en lien avec la médecine libérale, avec des sages-femmes, avec des pédiatres, avec des psychiatres, s'appuyant sur des outils de santé. La solution n'est pas uniquement au nombre, mais aux révolutions technologiques qui nous attendent. Il est aussi nécessaire de bien orienter le patient, et pas forcément aux urgences mais parfois vers la médecine libérale. C'est bien pour cela que ces plateformes que nous mettons en place, médecine libérale et médecine hospitalière, urgences, sont intimement liées. N'oublions pas que tout cela vient de ce que l'on appelle le "pacte de refondation des urgences", dont l'une des volontés est d'apporter la bonne réponse à une situation de médecine non-programmée, et ce n'est surtout pas chaque fois, systématiquement, l'hôpital.

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