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Vidéo "Je me sens épuisée, abusée" : le cri d'alarme du personnel médical des maternités

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"Je me sens épuisée, abusée" : le cri d'alarme des personnels médicaux en maternité
"Je me sens épuisée, abusée" : le cri d'alarme des personnels médicaux en maternité "Je me sens épuisée, abusée" : le cri d'alarme des personnels médicaux en maternité
Article rédigé par Valentine Pasquesoone
France Télévisions

Un rassemblement se tient à Paris, samedi, pour lutter notamment contre la fermeture de maternités de proximité. Franceinfo a interrogé des soignants travaillant dans des maternités publiques, afin d'en savoir plus sur leurs conditions de travail. 

"On a un manque de personnel, d'infirmiers, d'aides-soignantes, de médecins. Les agents sont appelés sur leur repos. Ils sont fatigués, usés." Sandrine Banderier, aide-soignante de 42 ans, ne cache pas sa colère. Dans l'hôpital de Vierzon (Cher) où elle exerce, plusieurs services, dont la maternité, sont menacés de fermeture du fait de suppressions de postes. Un rassemblement a lieu à Paris, samedi 23 juin, pour dénoncer la fermeture de ces maternités de proximité. 

Car cette aide-soignante, représentante de l'intersyndicale de l'hôpital, et ses collègues sont loin d'être les seuls concernés. A travers la France, plusieurs établissements, comme les maternités de Guingamp (Côtes-d'Armor) ou de Bernay (Eure), vont bientôt fermer leurs portes. Bien d'autres craignent une même issue. Entre 2016 et 2018, plus de dix petites maternités ont cessé leur activité, selon Le Monde. Et en quarante ans, les deux tiers de ces établissements ont disparu. 

En parallèle, des lits ferment dans bon nombre de maternités plus grandes, par mesure d'économie. "A la faveur d'une petite baisse d'activité, on nous a fermé des lits", relate Camille Lamboley, sage-femme à la maternité d'Orléans (Loiret). "Ces lits sont rouverts régulièrement, mais sans personnel", dénonce la jeune femme. Du côté de Blois (Loir-et-Cher), la maternité a perdu un tiers de ses lits – et du personnel en conséquence, rapporte Jean-Luc Lebrun, gynécologue obstétricien. 

"On mange quand on peut, si on peut"

Quand des lits ou des maternités entières ferment, certaines grandes maternités voient leur activité augmenter un peu plus. "On fait 5 000 accouchements par an", rappelle Carole Alava, aide-soignante et auxiliaire de puériculture à la maternité du CHU de Toulouse (Haute-Garonne). En raison de la fermeture de maternités "périphériques", celle de Toulouse reçoit "toute la région", assure la soignante, également militante de Sud Santé Sociaux. "Ça amène ce boulet de canon de venues (...) On est surchargés", abonde Magali, aide-soignante, auxiliaire puéricultrice et militante CGT à la maternité de l'hôpital Delafontaine, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). 

Bon nombre de soignants témoignent, en conséquence, de conditions de travail particulièrement difficiles. En maternité physiologique, "on a moins d'une heure à passer avec chaque patiente", raconte Camille Lamboley, "sans compter toutes les entrées et les sorties". Sur une période de travail de douze heures, "en salle de naissance et aux urgences, on mange quand on peut, si on peut", poursuit-elle. 

Le week-end, la sage-femme se trouve toute seule. Ce n'est pas ce qu'il y a de plus sécurisant.

Jean-Luc Lebrun, gynécologue-obstétricien à la maternité de Blois

à franceinfo

La crainte de soins dégradés

Du fait d'un manque de moyens et d'effectifs, selon ces soignants, les soins qu'ils prodiguent perdent en qualité. "On n'a plus de temps pour faire des dépistages ou des prises en charge de tout ce qui est psycho-social", regrette Camille Lamboley. Carole Alava confirme. L'aide-soignante se dit "terriblement frustrée" de ne pas avoir le temps de "discuter avec les patientes, de leur expliquer comment mettre leur enfant au sein".

On a des accouchements sans péridurale, alors que ce sont des patientes qui, pendant neuf mois, ont suivi leur grossesse et ont demandé une péridurale.

Magali, aide-soignante et auxiliaire puéricultrice à l'hôpital Delafontaine de Saint-Denis

à franceinfo

Plusieurs évoquent même des prises de risque pour les patientes et leurs bébés. "Il m'est arrivé de rendre visite à des femmes qui avaient une césarienne récente et qui se trouvaient vraiment à l'endroit le plus éloigné de la salle de soins", reconnaît Jean-Luc Lebrun.  

A Vierzon, comme dans d'autres maternités menacées, les personnels s'inquiètent des conséquences d'une maternité locale en moins pour les femmes enceintes. "On a énormément de femmes sur Vierzon et alentour qui viennent à pied, qui n'ont pas de moyen de locomotion, affirme Sandrine Banderier. Si on n'a plus notre maternité, ce n'est pas possible", s'indigne-t-elle. 

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