"Qu'ils arrêtent de prendre les malades pour des imbéciles" : un avocat affirme que l'ancienne formule du Levothyrox est toujours fabriquée
L'avocat de patients traités au Levothyrox affirme qu'un sous-traitant du laboratoire Merck continue de fabriquer l'ancienne formule du médicament en Isère. Il serait destiné au marché italien alors que les malades français peinent à s'en procurer dans l'Hexagone.
Un avocat vient d'adresser une "sommation interpellative" à la ministre de la Santé Agnès Buzyn, au groupe allemand Merck, un de ses sous-traitants et l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Il assure que l'ancienne formule du Levothyrox, médicament destiné à traiter les troubles de la thyroïde, est toujours produite dans une usine de Bourgoin-Jallieu (Isère), pour le marché italien.
Des milliers de malade ne supportent pas la nouvelle formule du médicament à cause d'effets secondaires. Alors que la ministre de la Santé a annoncé le retour de l'ancienne formule en pharmacies au début du mois d'octobre, de nombreux patients ont encore des difficultés pour s'en procurer. Ils ne comprennent pas cette situation.
Une situation "totalement ubuesque"
Corinne ne décolère pas : "Ça me choque, je trouve ça totalement ubuesque." Cette psychologue toulousaine prend du Lévothyrox depuis 25 ans pour soigner sa thyroïde. Elle ne supporte pas la nouvelle formule, comme des milliers de malade. Pour elle, il est donc vital de retourner à l'ancienne formule.
On a besoin de ce médicament pour vivre.
Corinne, Toulousaine soignée au Levothyrox depuis 25 ansà franceinfo
Elle ne comprend pas que les patients français se retrouvent en difficulté. "Qu'il soit déliveré au compte goutte ou que des centaines de personnes soient obligées de prendre leur voiture pour aller en Espagne, en Allemagne ou en Italie le chercher alors qu'il est produit chez nous, pour l'étranger et pas pour nous, (...) je trouve ça inadmissible."
La possibilité d'interroger le sous-traitant
Son avocat, maître Christophe Léguevaques, qui coordonne l'action collective de plus de 2 000 patients contre le laboratoire Merck, attend des réponses du fabricant. "C'est grave parce que ça veut dire tout simplement que l'on nous ment. En septembre, Merck a expliqué qu'il ne fabriquait plus l'ancienne formule."
La "sommation interpellative" qu'il a déposée permet de poser officiellement des questions au sous-traitant, "notamment combien de comprimés produisez vous par an ? Peut-on étendre la production pour satisfaire la demande du marché français ? Pourquoi on ne fabrique pas ce Lévothyrox ancien pour des malades français ?", liste maître Léguevaques.
Des formules française et italienne différentes
Pour Valérie Léto, pharmacienne responsable de l'entité juridique chez Merck Sérono (une filiale du groupe Merck) à Lyon, il ne faut pas mettre sur le même plan le Lévothyrox italien et l'ancienne version française. "Le produit fini italien n'est pas strictement identique, même si la formule est semblable." Elle liste les différences entre les deux produits :
L'origine des matières premières est différente, le procédé de fabrication est différent, les paramètres de contrôle du produit fini sont différents et l'aspect des comprimés est différent.
Valérie Léto, pharmacienne responsable de l'entité juridique chez Merck Sérono à Lyonà franceinfo
Elle estime donc que les patients qui utilisaient l'ancienne formule du Lévothyrox ne peuvent pas utiliser la version du médicament qui est mise sur le marché italien. "Pour les patients qui étaient équilibrés avec l'ancienne formule de Lévothyrox, il est important de leur mettre à disposition une formule strictement identique."
50 000 boîtes de l'ancienne formule disponibles
Les argument du laboratoire ne convainquent pas l'avocat qui a déposé la sommation. "Le moment venu, on va faire une analyse chimique et, s'ils ont menti, ça va leur coûter cher. Il faut qu'ils arrêtent de prendre les malades pour des imbéciles."
Le ministère de la Santé, de son côté, explique que 198 000 boîtes d'Euthyrox, l'ancienne formule du médicament, ont été importées d'Allemagne début octobre pour les patients français. Au 5 novembre, il y en avait encore 50 000 en stocks et à disposition des malades, d'après le ministère.
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