"C'est une injustice" : à Berlin, des propriétaires de bars manifestent pour pouvoir profiter du déconfinement
Si les restaurants ont rouvert dans la capitale allemande depuis le 15 mai, ce n'est pas le cas des bars. Des propriétaires de bistrots ont manifesté lundi 26 mars pour obtenir l’autorisation de rouvrir aussi vite que possible.
Les Britanniques ont leurs pubs, les Allemands leurs "kneipen". Kneipe, cela signifie un lieu où l’on est entassé, et ça ne rime pas avec coronavirus. À Berlin, il y en a près de 500. Ce sont des bistrots de quartier fréquentés par des habitués comme Michaïl, 62 ans. "Ça fait partie de notre culture, explique-t-il. L’Allemagne, c’est la bonne bière et le contact entre les gens."
>> Retrouvez les dernières informations sur la pandémie dans notre direct
Rouvrir les "kneipen" pour maintenir le lien social
Pancarte à la main, sur son fauteuil roulant, devant son bar préféré du quartier de Spandau, à l’ouest de la ville, Michaïl s’est joint à ce petit rassemblement d’une vingtaine de personnes. Pour manifester tout en respectant les restrictions, les patrons de bar ont choisi de se rassembler par petits groupes en plusieurs endroits de la capitale. "Tout ça me rend très triste, poursuit Michaïl, Les gens restent chez eux. Lui par exemple, il a 84 ans, il avait ses habitudes ici, il était bien, maintenant il est collé à sa femme. Ce que je veux dire c'est que ce contact social nous manque."
Je n’irais pas jusqu’à utiliser le mot de dépression pour certains, mais nous sommes tous très tristes.
Michaïl, 62 ansà franceinfo
Parmi les manifestants, beaucoup insistent sur l’importance de ces "Kneipen" pour le maintien du lien social. Michaïl avait par exemple pour habitude d’y réunir tous les vendredis les membres de son petit club de jeu. Ils ont entre 25 et 85 ans.
Katrin qui gère ce bar, le Klinke-Stuben, parle d’injustice. Il vous suffit de servir un peu à manger s’agace-t-elle et vous avez le droit de rouvrir. "Beaucoup pensent que les gens boivent trop et quand ils ont trop bu, qu’ils se rapprochent les uns des autres, ce qui n’est pas le cas", juge Katrin. "Je pense que par les temps qui courent, on peut tous faire attention et moi en tant que propriétaire, je suis vigilante et j’ai un œil sur tout."
Pertes et licenciements, les patrons de bars en difficulté
Katrin dispose aussi d’une grande terrasse à la façon des célèbres Biergarten où la bière coule de nouveau à flot depuis une dizaine de jours. Pour elle, le rideau est baissé depuis maintenant près de deux mois et demi.
Je ne gagne pas d’argent. J’en perds : 5 000 à 6 000 euros déjà et personne ne me les redonnera. Ce bar, c’est ma vie !
Katrin, gérante du bar le Klinke-Stuben, à Berlinà franceinfo
Mêmes difficultés pour Petra, propriétaire d’un bar dans le quartier voisin de Charlottenburg. Elle accumule déjà 14 000 € de pertes, au mois de juillet dit-elle, je ne pourrai plus payer les factures. "J’ai dû licencier cinq de mes employés et un seul que j’ai pu garder à temps partiel, déplore cette propriétaire. Parce que financièrement je n’y arrive plus. Et je ne comprends pas pourquoi on nous empêche d’ouvrir. Par contre, le gouvernement ferme les yeux sur l’alcool qui est acheté dans les épiceries la nuit et sur ces 'corona party', ces fêtes que les gens font chez eux en dépit des règles", s'emporte Petra.
Par rapport à certains de ses voisins, le pays a commencé tôt son déconfinement mais il y va pas à pas, et le mécontentement grandit. Certaines situations comme ici sont jugées injustes. D’autant plus dans un pays où les règles ne sont pas les mêmes d’une région à l’autre : à seulement cinq kilomètres du bar de Katrin, dans la région du Brandebourg, les "Kneipen" sont ouverts.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.