Déconfinement : "Cette reprise doit être progressive et doit se construire dans la confiance", estime le directeur général de Sodexo
Denis Machuel a expliqué que l'impact pour Sodexo de la crise du coronavirus est estimé "en termes de chiffre d'affaires entre 2,4 et 2,8 milliards d'euros".
"On est tous très conscients que cette reprise doit être progressive. Elle doit se construire dans la confiance", a affirmé Denis Machuel, le directeur général de Sodexo, numéro deux mondial de la restauration collective, à quelques jours du déconfinement. L'entreprise, qui emploie 470 000 personnes dans près de 70 pays, est prête à redémarrer "parce que nous n'avons jamais cessé d'accompagner nos clients", a souligné Denis Machuel, l'invité éco de franceinfo mardi 5 mai. Si Sodexo affiche une baisse de chiffre d'affaires située entre 2,4 et 2,8 milliards d'euros, Denis Machuel assure tout de même qu'il entend défendre "la valeur des métiers" de l'entreprise et veillera à ce que les appels d'offres publics aient "des clauses sociales encore renforcées" à l'avenir.
franceinfo : Est-ce que les cantines et les restaurants d'entreprise vont pouvoir rouvrir ?
Denis Machuel : La grande réponse est oui. Nous sommes prêts à redémarrer, à accompagner nos clients au niveau de la restauration, que ce soit dans les entreprises ou dans les écoles. Et nous sommes prêts parce que nous n'avons jamais cessé d'accompagner nos clients. Nous étions au cœur de la crise à Wuhan, en Chine, puisque nous nous servons deux hôpitaux là-bas. Ces derniers mois, nous nous avons été en première ligne avec nos équipes qui font un travail remarquable. Nous avons été en première ligne dans les hôpitaux, dans les maisons de retraite, dans les entreprises qui ne sont pas en télétravail et dans le monde de la défense, comme à Balard (ministère de la Défense à Paris) par exemple. Nous avons travaillé nos protocoles, nos façons d'opérer pour pouvoir accompagner ces clients pendant la crise. Et donc redémarrer, c'est possible.
Qu'est-ce qui change pour vos clients, pour les consommateurs et pour vos salariés ?
Évidemment, la sécurité pour nos salariés et pour nos consommateurs est essentielle. C'est quelque chose sur lequel nous n'avons jamais fait de compromis. Dans le monde de la restauration, très concrètement, il s'agit d'adapter nos menus qui seront simplifiés, dans un premier temps, quand nous rouvrons un restaurant. Il s'agit de nous assurer de la distanciation physique dans les restaurants, avec des tables en quinconce. Il faut accélérer les offres de vente à emporter. Je vais vous donner un exemple très concret. Aujourd'hui, nous travaillons en collaboration et en co-construction avec Michelin pour redémarrer leurs différents sites. C'est par exemple la mise en place d'une prestation click and collect de vente à emporter. C'est la création de nouveaux points de restaurants qui évitent des flux trop denses, qui évitent la concentration. Et c'est aussi une sélection de recettes qui permettent, à partir de produits locaux, de soutenir l'activité économique locale qui doit redémarrer.
Toutes ces mesures vont-elles suffire pour retrouver rapidement un fonctionnement normal ?
La crise du Covid-19 va durer, c'est certain. Et on est tous très conscients que cette reprise doit être progressive. Elle doit se construire dans la confiance. Ce que je sens aujourd'hui, au moment de cette reprise, c'est qu'il y a un antagonisme. Il y a à la fois une envie de refaire société et de renouer des liens sociaux, de retrouver les amis, les collègues de travail, de remettre les enfants à l'école, et en même temps, il y a des freins, une peur de contaminer, une peur d'être contaminé, la peur de la deuxième vague et la peur de rater le déconfinement. Donc il faut créer les conditions de la confiance pour faire en sorte que, justement, cette progressivité de la reprise, elle se fasse au mieux et elle soit solide. Parce que c'est cette progressivité qui nous permettra de réussir cette reprise.
Combien cette crise a-t-elle coûté déjà à Sodexo ?
Nous estimons l'impact en termes de chiffre d'affaires entre 2,4 et 2,8 milliards d'euros sur un chiffre d'affaires annuel de 22 milliards. Ce sont aujourd'hui des estimations qui se sont à peu près confirmées. Avec l'évolution des chiffres que nous voyons, c'est un impact important et nous vivons un paradoxe dans notre entreprise puisque nous avons en gros la moitié de nos salariés en chômage partiel du fait de l'arrêt de l'activité dans les sites sports et loisirs, dans les écoles et dans les universités, et dans les entreprises.
Est-ce que les salaires vont et doivent augmenter chez Sodexo ?
Défendre la valeur de nos services, c'est aussi défendre la valeur de nos métiers. C'est aussi la défendre auprès de nos clients, qu'ils soient publics ou qu'ils soient privés. C'est un engagement que je prends de pousser l'ensemble des arguments qui continuent de montrer que ces métiers qui étaient dans l'ombre sont maintenant dans la lumière des métiers essentiels. Cela fera partie évidemment du dialogue que nous allons avoir avec nos clients. Je l'ai évoqué lundi dans une table ronde avec Muriel Pénicaud. Les appels d'offres publics devront à l'avenir avoir des clauses sociales encore renforcées. Ça commence à être le cas pour que le critère du prix unique ne soit pas le seul critère de choix, car ce critère du prix unique écrase la vraie valeur créée par nos métiers.
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