Le conseil santé : "J’ai 42 ans, et c’est la première fois que je dois faire appel aux associations pour nourrir ma famille..."
Les internautes et les auditeurs sont nombreux à se poser des questions sur les situations difficiles pour leurs proches et pour eux-mêmes, qu'ils sont obligés de vivre soudainement. Aujourd'hui, la psychanalyste Claude Halmos répond à la question de Serge.
Serge nous écrit de Marseille :"J’ai 42 ans, et c’est la première fois que je dois faire appel aux associations pour nourrir ma famille. Je le vis comme une déchéance, et j’ai peur que mes voisins l’apprennent. Comment supporter ça ?"
franceinfo : votre réponse, Claude ?
Claude Halmos : La question de Serge témoigne d’une détresse, liée à l’appauvrissement, qui était déjà très présente avant la pandémie. Mais qui s’est répandue, avec elle, aussi vite que le virus. Et qui est très destructrice, parce qu’elle conduit ceux qui la subissent à croire que, parce qu’ils n’ont plus rien, ils ne sont plus rien : Serge parle de "déchéance". Et l’image qu’il a peur de voir, dans les yeux de ses voisins, est en fait celle qu’il a aujourd’hui de lui- même : celle d’un homme défaillant, qui ne serait "même pas capable" de subvenir lui-même à ses besoins, et à ceux de sa famille.
Et cette honte de soi, que la pauvreté engendre toujours, se fait aussi toujours, particulièrement aiguë quand, de privations en privations, la pauvreté atteint cet essentiel à la vie, qu’est l’alimentation. Et met ainsi en cause non seulement la possibilité de vivre mais, même, celle de survivre.
Comment peut-on s'en sortir ?
D’abord en comprenant que l’on n’est pas responsable de sa pauvreté. Que, si l’on n’a rien, ce n’est pas parce que l’on n’est rien. Mais parce que la société n’est pas capable de fournir, à tous ses membres, les moyens d’avoir une vie décente.
Ensuite, l’ayant compris, en transformant cette honte, que l’on éprouve, et que les associations qui s’occupent d’aide alimentaire connaissent bien, en envie de faire en sorte que la société change. Et enfin, en réfléchissant à ce regard des autres, que l’on redoute, et que l’on peut, c’est vrai, rencontrer. Mais qui, s’il exprime parfois un rejet de l’autre, exprime surtout la peur que fait, à de plus en plus de gens, parce qu’ils se sentent de plus en plus menacés, la pauvreté.
Autrement dit, si ses voisins regardaient Serge "d’un mauvais œil", ce n’est pas lui qu’ils regarderaient ainsi, mais la personne en difficulté qu’ils ont peur d’être amenés à être, eux aussi, un jour.
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