"Nous prenons les risques à leur place" : près de Rennes, le coronavirus réactive la solidarité intergénérationnelle

"Les filets de maquereaux, quatre boîtes de thon, du chocolat noir..." Thibaud et Claude-Eric, de l'association Irvin vérifient la liste de courses... mais ce n'est pas la leur. Ils font cela par solidarité avec leurs aînés. Après avoir passé la matinée à faire les courses au supermarché, les bénévoles répartissent les emplettes en respectant scrupuleusement les commandes de chacun.

L’idée des livraisons solidaires pour les personnes âgées ou vulnérables est née dès le début du confinement, presque logiquement : "Chez nous, il y a beaucoup de zones très rurales, avec des gens qui vivent dans des fermes, un peu isolées", explique Margaud, une autre bénévole. "Comme on a pas mal de moyens logistiques, on s'est dit qu'on pourrait le mettre au service de ces personnes pour aller faire leurs courses et leur livrer. Ainsi, nous prenons un peu plus de risques à leur place".

"Ce qu'on fait a du sens"

Les bénévoles se sont vraiment investis, jusqu’à réaménager leur camionnette en fabriquant des casiers en bois pour séparer chaque sac à livrer. Le moment des livraisons à domicile est attendu tant par les bénévoles que par les bénéficiaires : "Quand on arrive, il y a tous les regards des grands-mères qui sont tournés vers nous, c'est assez drôle", raconte Claude-Eric. "Quand on les a livrées vendredi dernier, elles étaient toutes contentes, on voit que ce qu'on fait a du sens".

On était peut-être les premières personnes qu'elles voyaient depuis assez longtemps. Je retiens ces regards assez doux, c'est très touchant.

Claude-Eric, l'un des bénévoles

à franceinfo

La camionnette remplie de victuailles arrive chez Françoise. Tout le monde a mis un masque et respecte les distances sanitaires. "J'ai 82 ans et j'ai peur du coronavirus", avoue l'octogénaire. Les bénévoles déchargent les courses qu'elle leur a commandé. "On va vérifier vos courses ensemble, pour être sûr de n'avoir rien oublié", explique Margaux. Tout y est, à part ce produit pour refaire la couleur de ses cheveux, les garçons ne l'ont pas trouvé au supermarché. Mais il en faudrait plus pour entamer l'enthousiasme de l'octogénaire. "Je trouve ça formidable, extraordinaire. La solidarité compte beaucoup là, je suis même émue", lance Françoise aux bénévoles. "C'est la première fois que je me fais servir, mais je suis ravie".

Je les félicite, je trouve que c'est courageux. J'espère qu'on s'en souviendra lorsque le confinement sera terminé.

Françoise, 82 ans

à franceinfo

Car il n’est plus seulement question d’une livraison de courses mais de liens qui se créent, d’humanité : "On voit que pour ces personnes âgées, vulnérables, on est un peu le rayon de soleil dans leur journée, c'est très fort", avoue Thibault, avant de remonter dans sa camionnette pour poursuivre sa livraison.