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"On est dans une situation de non droit" : la difficulté de la garde alternée pour des parents divorcés durant le confinement

Comment gérer la garde des enfants dans les couples divorcés en plein confinement ? Avec les tribunaux au ralenti, et les commissariats souvent débordés, la situation est parfois explosive dans certaines familles.

Article rédigé par franceinfo - Margaux Stive, édité par Pauline Pennanec'h
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des enfants, valise à la main, disent au revoir à leur père. Photo d'illustration. (GAUJARD CHRISTELLE / MAXPPP)

La situation a toujours été compliquée pour Paul*. Depuis la séparation il y a six ans, en 2014, son ex-compagne a déjà refusé plusieurs fois qu’il récupère sa fille, âgée de 8 ans. La justice l’autorise pourtant à la voir un week-end et un mercredi sur deux, mais avec le confinement lié à l'épidémie de coronavirus, la situation s’est envenimée très rapidement. "La mère a trouvé pas mal d'arguments pour que je ne prenne pas ma fille", raconte-t-il. "L'argument qu'elle a un jardin et que je n'en ai pas, ensuite que ma fille ferait de l'asthme donc ce serait un problème avec le confinement... De longues explications pour me montrer que le virus était tellement dangereux qu'il ne fallait surtout pas bouger... Tout un tas d'arguments pour que je ne prenne pas ma fille."

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Résultat : Paul n’a pas pu voir sa fille depuis un mois. Pourtant, dès le début du confinement, le gouvernement a affirmé que les droits de visite et d’hébergement dans les couples divorcés devaient être assurés. Mais dans la réalité, c’est beaucoup plus compliqué. "Il y a deux langages, affirme Paul. Moi j'entends un discours officiel du gouvernement qui est très clair, qui est que les droits de visite ne doivent pas souffrir du confinement. Je trouve ça très bien". Mais, ajoute-t-il, "sur le terrain, les administrations, les gendarmes, les assistantes sociales, la protection de l'enfance, tous n'appliquent pas vraiment ou pas toujours ces règles, et ils disent souvent qu'il vaut mieux attendre la fin du confinement".

Il y a un double langage entre ce que l'on entend officiellement et ce qui se pratique en réalité.

Paul

à franceinfo

Paul a déjà porté plainte trois fois à la gendarmerie pour non présentation depuis le début du confinement. Il a aussi écrit au procureur de la République, sans réponse pour le moment.

Le cas de Paul n’est pas isolé : des dossiers comme le sien, son avocate, Maître Patricia Douieb, en voit arriver tous les jours. Des situations que le confinement rend quasi impossibles à régler pour l’instant. "On n'a pas de moyens de pression", affirme Me Douieb. "Les tribunaux sont fermés, on ne peut pas venir déposer des plaintes pour non présentation d'enfant. Les commissariats et les gendarmeries en province sont débordés ou ne veulent pas le traiter, pensent que ce n'est pas urgent, explique-t-elle. Aujourd'hui on est un peu dans une situation de non droit."

Une cellule de médiation d'urgence

Le barreau de Paris a mis en place une cellule de médiation d’urgence pour tenter d’apporter des réponses à ces familles en difficulté. En deux semaines, 15 dossiers ont déjà été traités en urgence. La plupart des cas ont pu être résolus grâce à la médiation, mais dans les situations les plus compliquées, il est très difficile de trouver une solution. "Pour ces cas-là, on est un peu dans une impasse, car cela reste un délit de ne pas remettre l'enfant", affirme Maître Anne-Laure Casado, avocate en droit de la famille au barreau de Paris, à l’origine de cette cellule de médiation.

À cause du confinement, "on ne peut pas aller accéder aux juridictions pour faire sanctionner cette attitude, si elle a lieu d'être sanctionnée. Et c'est vrai que là, on se situe dans des situations où ça peut être des drames familiaux très importants qui sont en train de se jouer parce qu'il n'est pas normal de priver un autre parent de son enfant pendant un mois, deux mois, sans aucune véritable raison". Selon elle, "cette médiation peut être un moyen, en crevant tous les abcès, de comprendre ce qu'il y a derrière tout ça, parce qu'il faut se dire que quand il y a un refus aussi violent qui peut être posé, il doit y avoir quelque chose derrière".

L'idée, c'est vraiment de rassurer et de rétablir une confiance entre les parents.

Maître Anne-Laure Casado

à franceinfo

De son côté, Maître Patricia Douieb craint aussi que le retour à l’école de certains enfants n’aggrave encore la situation. Elle affirme avoir déjà affaire à plusieurs cas de parents divorcés qui ne sont pas d’accord sur le fait de renvoyer ou pas leurs enfants en classe.

*Le prénom a été modifié

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