"Cette politique divise" : contre le pass sanitaire mais pas anti-vaccin, des manifestants soignants ont du mal à se faire entendre
Plusieurs dizaines de milliers de manifestants opposés au pass sanitaire sont attendus dans les rues samedi. Parmi eux, des soignants qui aimeraient faire entendre une autre voix que celles des anti-vaccin et des complotistes.
Plusieurs dizaines de manifestations anti-pass sanitaire vont se tenir un peu partout en France samedi 14 août, pour la cinquième fois. Parmi ceux qui défilent, certains se disent contre le pass sanitaire, mais pour la vaccination. Ils se démarquent ainsi des manifestants anti-vaccin et de ceux qui versent dans le complotisme. Un discours difficilement audible, à l'image de soignants opposés au pass, mais qui reconnaissent la nécessité de la vaccination pour freiner l'épidémie de Covid-19.
Denis Gillet, secrétaire général de la CGT Santé dans les Vosges, critique ainsi "une politique sanitaire autoritaire" du gouvernement. "Cette politique divise. On défend la position qu'il faut convaincre, mais pas contraindre." Il se démarque clairement des tendances complotistes et antisémites de certains anti-pass.
"On dénonce fermement toute assimilation de la stratégie vaccinale à la Shoah, ou à l'apartheid."
Denis Gillet, secrétaire général CGT Santé Vosgesà franceinfo
Rémi Roblain partage le même constat en Seine-Saint-Denis. "On a l'impression qu'on est dans un monde complètement binaire, manichéen, où il faut être soit pour le gouvernement, soit contre", estime le secrétaire du syndicat Sud à l'hôpital de Ville-Evrard, à Neuilly-sur-Marne.
Il considère que c'est le gouvernement qui a créé cet antagonisme et ces tensions, en imposant notamment la vaccination aux soignants. "Le fait de créer une obligation ferme la discussion avec tous ces collègues-là", explique Rémi Roblain. "On se retrouve dans un clivage extrêmement compliqué entre ceux qui ont fait le choix de se faire vacciner, qui ne comprennent pas pourquoi d'autres ne le font pas. Et des personnes qui ont extrêmement peur du vaccin. On n'arrive pas à avoir le débat serein que l'on devrait avoir en ce moment sur la pandémie, et la manière de s'en sortir."
Ne pas manifester avec Florian Philippot
Parmi les collègues de ce soignant, certains défilent chaque samedi contre le pass. Mais pas dans n'importe quel cortège. "Sud Solidaires ne va pas manifester à côté de Florian Philippot, parce qu'on est profondément anti-fascistes, anti-racistes, anti-capitalistes", explique Rémi Roblain. "Et c'est complètement incompatible avec les gens de l'extrême droite qui essaient de récupérer la colère actuelle." Certains soignants ont carrément arrêté de manifester, car ils ne se reconnaissaient pas dans les slogans des défilés, trop "anti-vax", selon eux.
"C'est très compliqué, en tant que syndicaliste et en tant que soignant, dans un fond sociétal complotiste et hyper malsain."
Éric Tricot, infirmier anesthésiste, représentant du syndicat Sudà franceinfo
Infirmier anesthésiste, Éric Tricot rappelle que la grande majorité des patients en réanimation sont non-vaccinés (85% selon les chiffres du ministère de la Santé publiés vendredi 13 août). Ce représentant du syndicat Sud à l’hôpital Mondor de Créteil (Val-de-Marne) essaie ainsi de faire comprendre l'importance de la vaccination à ses collègues qui refusent toujours d'être protégés.
Tous estiment que si le pass sanitaire suscite un tel blocage d'une partie de la population, c'est en raison de la communication "autoritaire et incohérente" du gouvernement.
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