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Phase 2 du déconfinement : "La vie que l'on avait avant, on la retrouvera", assure le Pr Bruno Lina, membre du Conseil scientifique mais "c'est un peu tôt"

Le virologue est "raisonnablement optimiste pour l'avenir à court terme" même s'il n'exclut pas un possible retour de l'épidémie de coronavirus.

Article rédigé par franceinfo
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Bruno Lina, professeur de virologie au CHU de Lyon, chercheur au Centre International de Recherche en Infectiologie et membre du Conseil scientifique. (PHILIPPE DESMAZES / AFP)

Bruno Lina, professeur de virologie au CHU de Lyon, chercheur au Centre International de Recherche en Infectiologie et membre du Conseil scientifique qui oriente les décisions du gouvernement, s’est dit mardi 2 juin sur franceinfo "raisonnablement optimiste pour l'avenir à court terme" alors que la France entre dans la phase deux du déconfinement. "La vie que l'on avait avant, on la retrouvera", assure-t-il même si un retour de l’épidémie dans plusieurs mois n’est pas impossible. "Dans les phénomènes pandémiques avec d'autres virus que ce virus, on a très souvent revu réapparaître ce virus au moment de l'automne", a-t-il indiqué.

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franceinfo : Comment jugez-vous la situation alors que nous entamons la deuxième phase du déconfinement ?

Pr Bruno Lina : Ce que l'on peut dire, en tout cas, c’est que la situation est au niveau auquel on l’espérait. Le confinement a été une épreuve terrible qu'il ne faut pas oublier. Il ne faut pas oublier ce qui s'est passé. Il ne faut pas oublier qu'il y avait plus de 7 000 personnes en réanimation. Il ne faut pas oublier que les services médicaux étaient débordés, qu'on déplaçait les patients pour les prendre en charge. Tout ceci est derrière nous. Ça ne veut pas dire que ce n'est jamais arrivé. Mais c’est derrière nous avec un recul, une période de déconfinement qui est maintenant suffisamment longue pour qu'on puisse déjà voir quelques prémices comme quoi les choses se passent bien.

L'ensemble de la désescalade qui est en cours est, finalement, assez cohérente, même s'il faut rester extrêmement vigilant.

Pr Bruno Lina, virologue et membre du Conseil scientifique

à franceinfo

Il faut que collectivement, on ait tous un comportement responsable, c'est-à-dire que l'on se rappelle de ce qui s'est passé, que l'on continue à avoir un certain nombre de mesures de distanciation physique et un renforcement des mesures d'hygiène. On peut être raisonnablement optimiste pour l'avenir à court terme.

Cela ne va pas dire qu’on peut revivre comme avant ?

Tout le monde souhaiterait revivre comme avant. Le problème, c'est qu'aujourd'hui, on a passé un cap. On n'est pas revenu à un niveau de base, c'est-à-dire qu'il y a toujours des cas infectés. Il y a encore de temps en temps, ce qu'on appelle des clusters, des cas groupés qui montrent que le virus circule, qu'il est en capacité de diffuser. Il n'a rien perdu de son potentiel de diffusion et de son potentiel de dangerosité. C'est simplement que nous, grâce à nos comportements, on a réussi à mieux maîtriser l'épidémie. Et c'est pour cela qu'il faut être vigilant. La vie que l'on avait avant, on la retrouvera. Mais c'est peut-être un peu tôt de penser qu'elle peut se réinstaller dès à présent, sachant que le virus est toujours parmi nous, même s'il y est en petite quantité.

Faut-il miser sur le fait que les gens seront certainement beaucoup dehors dans les semaines qui viennent ?

Quand on parle comportement responsable, c'est exactement ça. Il faut bien se rappeler quelles sont finalement les conduites à risque par rapport au risque de transmission de ce virus.

On sait que lorsqu'il y a beaucoup de personnes dans un espace confiné et que parmi ces personnes, il y en a une qui est infectée, il y a un risque de transmission. À partir du moment où on est à l'extérieur, où il y a une certaine distanciation physique, où on a des mesures d'hygiène dans les mains, tous ces risques diminuent et diminuent tellement que finalement la transmission ne se passe plus.

Pr Bruno Lina

Le fait qu'il va faire beau va accompagner la baisse de la transmission. Si ça continue à bien se passer, si on continue à voir ce comportement responsable, ça peut durer relativement longtemps.

Est-on à l’abri d’une deuxième vague ?

Je ne peux pas répondre à votre question. Il faut garder juste en tête qu’aujourd'hui, ce que l'on sait de cette épidémie, de ce que l'on voit à l'étranger, la possibilité d'une petite reprise avec des petits foyers comme ça qui émergent et quelque chose de possible, voire probable. Mais ça ne signifie pas forcément que l'épidémie va reprendre. On a mis en place un certain nombre d'outils et de marqueurs qui devraient nous permettre de juger, justement si ce que l'on observe, c'est finalement des épiphénomènes sur lesquels il faut agir de façon très proactive, mais qui ne signifie pas une reprise de l'épidémie. Ou inversement, si des marqueurs nous disent attention, là, on est en train de passer un cap qui nous dit que peut être le virus reprend une circulation silencieuse qui aboutirait à un phénomène épidémique. C’est très difficile de le dire parce que tous les marqueurs, comme je le disais, sont plutôt très bons, donc les choses se passent bien. Est-ce que cela veut dire que sur la durée, on parle de trois ou quatre mois et en particulier en automne, il n'y a pas un risque d'une reprise épidémique. Aujourd'hui, je suis incapable de vous donner une réponse claire. La chose que je peux vous dire, c'est que dans les phénomènes pandémiques avec d'autres virus que ce virus, on a très souvent revu réapparaître ce virus au moment de l'automne. À quel niveau ? À quelle intensité ? Personne n'est capable de vous le dire.

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