Vaccination obligatoire des soignants : un moyen de "limiter l'impact d’une remontée des cas" à l’automne selon la Haute autorité de santé
Elisabeth Bouvet, présidente de la Commission technique des vaccinations à la Haute autorité de santé, rappelle que les soignants jouent un rôle de transmission du virus dans les établissements de santé.
La Haute autorité de santé ouvre jeudi 1er juillet la voie à la vaccination contre le Covid-19 obligatoire pour tous les soignants. Une obligation vaccinale examinée par le gouvernement. Le Premier ministre, Jean Castex, consulte les parlementaires à ce sujet et pourrait présenter un texte dès cet été.
Pour la Professeure Elisabeth Bouvet, présidente de la Commission technique des vaccinations à la Haute autorité de santé invitée de franceinfo jeudi 1er juillet, "si les professionnels de santé ne transmettent pas le virus dans les établissements de santé, je pense qu'on peut limiter l'impact de cette remontée des cas qui aura très vraisemblablement lieu à l'automne."
franceinfo : Faut-il en passer, selon vous, par cette obligation de vaccination pour les personnels soignants ?
Elisabeth Bouvet : On y a songé. Pour l'instant, on n'a pas donné de règles formelles. C'est vrai que la situation nous préoccupe un petit peu parce que les soignants et les professionnels de santé en général ainsi que les personnels du médico-social, dans les établissements pour personnes âgées sont vraiment insuffisamment vaccinés. La situation est surtout très hétérogène. Il y a des établissements où les soignants sont très majoritairement vaccinés, d'autres où ce n'est pas le cas. C'est pour ça qu’il faut vraiment tout faire pour inciter, notamment pour que les responsables de ces établissements fassent tout pour que leur personnel se vaccine, mais peut-être que tout n'a pas été fait encore jusqu'à présent. Bien évidemment, dans les semaines qui viennent, si ce qu'on appelle la couverture vaccinale n'augmente pas de façon très significative dans les établissements de santé et médico-sociaux, il faudra peut-être en arriver à l'obligation. C'est une hypothèse qu'on avait envisagée dès la fin de l'année dernière en disant qu'il fallait d'abord jouer la carte de la persuasion et de la conviction. Il y a eu beaucoup de choses qui ont été faites. Il y a beaucoup de soignants qui sont vaccinés. Il y a eu un élan important, mais effectivement, là, peut-être qu'il faut utiliser d'autres moyens pour arriver à augmenter cette couverture vaccinale. L'enjeu, c'est que, avec l'émergence de variants plus contagieux du Covid-19, comme les soignants jouent un rôle de transmission de ces virus, la vague qui probablement aura lieu à l'automne risque d’être plus grave et d'entraîner plus de conséquences si les soignants ne sont pas vaccinés.
Avez-vous pu identifier les raisons de cette réticence des soignants à se faire vacciner ?
Déjà, selon mes informations, 70 % des soignants ont reçu au moins une dose. Néanmoins, c'est insuffisant. Les catégories de professionnels ne réagissent pas du tout de la même manière. Les médecins sont très majoritairement vaccinés et ce sont certaines personnes de certaines professions qui sont plus réfractaires à la vaccination. On l’avait déjà observé avec la vaccination contre la grippe. Ce sont globalement les mêmes réticences c'est-à-dire une peur du vaccin, le sentiment qu'on n'est pas soi-même à risque, une certaine méfiance vis-à-vis de la direction, de l'administration, de la gouvernance. C’est une façon d'exprimer un certain mécontentement par rapport aux autorités et aux autorités des établissements de santé. Par rapport à la vaccination grippale, on a 30, 40, 50 % de personnes qui ne veulent pas se faire vacciner et avec le Covid-19, on observe un peu la même chose.
Aujourd'hui, la branche européenne de l'OMS a fait savoir que le nombre des cas de Covid-19 s'était accru de 10 % la semaine dernière. Cela vous inquiète-t-il et avez-vous fait des projections en France pour la rentrée par rapport notamment à ce fameux variant Delta ?
Oui, absolument. On sait qu’on surveille beaucoup plus. On compte beaucoup plus de cas qui, probablement avant, n'étaient pas comptés. Les moyens de diagnostics ont considérablement été simplifiés. On repère beaucoup plus de cas qu'on ne repérait pas avant. Il est vraisemblable que, compte tenu de la contagiosité croissante des variants qui ont émergé, il y a une augmentation de la transmission et donc du nombre de cas qui sont mesurés, bien évidemment. En France, on est conscient de cela. Il y a eu des modèles qui ont été faits. On sait ce qu'on risque d'avoir, on sait aussi l'impact des vaccinations sur la transmission et on est pratiquement certains qu'il y aura une augmentation du nombre de cas à l'automne, liés notamment au variant Delta. On espère que cette augmentation du nombre de cas n'aura pas de conséquences sanitaires, c'est-à-dire en termes d'hospitalisations et de décès importants. Si la majorité des gens à risque se font vacciner, si les professionnels de santé aussi ne transmettent pas le virus dans les établissements de santé, je pense qu'on peut limiter l'impact de cette remontée des cas qui aura très vraisemblablement lieu à l'automne, à partir de septembre ou octobre.
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