Fin de vie : "On ne veut pas d'une quatrième loi Leonetti", affirme le président de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité
Selon Jean-Luc Romero-Michel, il faut "qu'on change de logique" par rapport aux lois Léonetti, et ne plus donner le pouvoir de décision aux seuls médecins mais au patient lui-même.
"J'avoue que je suis un peu stupéfait de ces propos, parce que si c'est ça le modèle français annoncé par le président de la République, on n'en veut pas. On ne veut pas d'une quatrième loi Leonetti", réagit samedi 8 avril sur franceinfo Jean-Luc Romero-Michel, président d’honneur de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), après les propos tenus par le ministre de la Santé dans le journal Le Monde. Prenant la parole pour la première fois sur la fin de vie après la Convention citoyenne qui lui a été consacrée, François Braun, s'est dit favorable au "renforcement" de la loi Claeys-Leonetti. Pour lui "accompagner la mort ce n'est pas donner la mort". Jean-Luc Roméro appelle le gouvernement à respecter la convention citoyenne, il espère qu'il ne va pas "mépriser une fois de plus le peuple, comme il le fait actuellement sur les retraites".
franceinfo : "Accompagner la mort ce n'est pas donner la mort", c'est avec ces mots que le ministre de la Santé s'est exprimé dans Le Monde pour la première fois sur la fin de vie après la remise du rapport de la convention citoyenne sur le sujet. Que pensez-vous de ces propos ?
Jean-Luc Romero-Michel : J'avoue que je suis un peu stupéfait de ces propos, parce que si c'est ça le modèle français annoncé par le président de la République, on n'en veut pas. On ne veut pas d'une quatrième loi Leonetti. Je me demande comment un ministre qui n'a jamais été élu peut-il à ce point-là mépriser 75% des membres de la convention citoyenne et 9 Français sur 10 qui depuis des années, dans tous les sondages sont constants ou encore aujourd'hui, une majorité de députés qui sont favorables à l'aide active à mourir. J'espère que le gouvernement ne va pas suivre cet avis et mépriser une fois de plus le peuple, comme il le fait actuellement sur les retraites.
François Braun milite pour une évolution de la loi et pas forcément pour une nouvelle législation. Pour vous, faut-il impérativement une nouvelle loi ?
On l'oublie car on dit souvent qu'il y a eu deux lois Leonetti. En fait il y en a eu trois, une en 2005, en 2006 et une en 2016 et on en est toujours là. Ce sont toujours des lois qui sont faites par des médecins où tout le contrôle reste aux médecins. Il faut qu'on change de logique. Il faut que ce soit la personne qui est dans le lit qui décide. Qu'est-ce qu'ils veulent qu'on fasse de plus que la sédation profonde et continue si ce n'est de permettre enfin l'euthanasie et le suicide assisté ? Pour une sédation profonde et continue, on endort quelqu'un, on lui enlève les sondes gastriques qui lui permettent de se nourrir, j'ai du mal à comprendre la différence entre cela et une euthanasie. La différence c'est qu'en France une sédation ça peut durer trois semaines avec des gens qui se retrouvent dans une situation horrible. Une sédation continue c'est bien pour quelqu'un qui va mourir dans les heures qui suivent mais après c'est un acharnement thérapeutique.
Mettez-vous en garde le gouvernement pour qu'il respecte les travaux de la convention citoyenne ?
Il faut entendre les Français sinon cela ne servait à rien de faire encore une convention citoyenne, d'avoir des parlementaires favorables de faire des missions d'évaluation avec Olivier Falorni et nous dire : 'on va juste arranger, faire quelques petits textes réglementaires'. Non ce n'est pas ça que veulent les Français. Ceux qui accompagnent les gens en Suisse, ceux qui vont en Belgique le savent. Il y a un moment il faut en tirer les conclusions. On a entendu Charles Biétry qui a la maladie de Charcot. La fin, il ne souhaite pas l'avoir même s'il veut vivre le plus longtemps possible. Il sera obligé de fuir son pays. Ceux qui fuient ce sont ceux qui ont les connaissances ou qui ont les moyens. L'immense majorité des Français, vous croyez qu'ils ont 12 ou 13 000 euros pour aller en Suisse en fin de vie ? Il faut arrêter l'hypocrisie en permettant seulement aux riches et aux sachants de pouvoir partir à l'étranger pour permettre à chacun de mourir entouré de l'amour des siens dans notre propre pays et au moment où on l'a choisi.
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