"Qu'il se mette à ma place et il verra qu'il s'est planté" : à Gap, des patients se disent victimes d'un chirurgien "apprenti sorcier"
Le parquet de Gap a ouvert une enquête préliminaire contre ce médecin ayant pratiqué des cimentoplasties discales, opération non autorisée en France. Sept patients souffrant d'intenses douleurs ont porté plainte. Franceinfo a rencontré l'une de ces victimes désormais handicapée.
Alain Bernard, le champion olympique de natation, a lancé lundi 22 février sur franceinfo un appel pour rassembler au sein d'un collectif les patients, dont sa mère, victimes d'un chirurgien de l'hôpital de Gap (Hautes-Alpes). Ce médecin est soupçonné d'avoir utilisé, entre 2015 et 2017, une technique de traitement des douleurs vertébrales non autorisée en France et sans le consentement des malades. Depuis plus de deux ans, le parquet de Gap a ouvert une enquête préliminaire après le dépôt de sept plaintes pour "violences volontaires" et "défaut d'information". Franceinfo a rencontré l'une de ces victimes.
"Est-ce qu'il espérait un prix Nobel de médecine ?"
Natation, randonnée, rugby, vélo...Pierre Pérez était un sportif. Au moment où il prend sa retraite, il s'installe dans un village de montagne au-dessus de Gap. Deux ans plus tard, il ressent les premières douleurs. Le retraité se retrouve à l'hôpital où il rencontre le chirurgien qui décide de l'opérer. "Il n'a pas dit un mot de la cimentoplastie discale avant l'opération, pas un mot, jamais." Et pourtant, Pierre Perez a bien subi cette opération consistant à injecter du ciment dans les disques de la colonne vertébrale pour réparer une fracture ou soulager des douleurs. Une technique non valide en France, contrairement à la cimentoplastie vertébrale.
Mais un mois et demi plus tard, les douleurs reviennent. Et elles sont de plus en plus violentes. Le retraité retourne voir son chirurgien : "En cinq minutes il est passé de 'je vous réopère' à 'ça va passer tout seul'. Qu'est-ce que c'est que ce type ?" Pierre ne veut pas juger de la compétence ou non du médecin, il veux juste l'empêcher de nuire : "Est-ce qu'il espérait un prix Nobel de médecine en faisant des choses qui n'étaient pas autorisées ? Et surtout de ne pas prendre des gens comme cobayes pour faire ses expériences. Il a un métier où son outil de travail c'est l'être humain."
Le chirurgien suspendu de ses fonctions
Aujourd'hui, Pierre Perez ne ne plus se baisser ou marcher longuement, il a dû aménager sa maison. "Je suis handicapé", lâche-t-il. Il ne demande qu'une chose au médecin qui l'a opéré : "Qu'il se mette à ma place et il verra qu'il s'est planté". Le chirurgien a été suspendu de ses fonctions depuis un mois. Son avocat n'a pas souhaité, pour l'instant, répondre à nos questions.
L'enquête a été confiée à l'antenne de Marseille de l'OCLAESP (Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique) et porte sur les chefs de "recherche biomédicale sans obtention de l’avis favorable du comité de protection des personnes et de l’autorisation de l’ANSM" et "recherche biomédicale sur une personne sans son consentement conforme ". Si le consentement des patients n'a pas été respecté, le chirurgien risque jusqu'à trois ans de prison et 45 000 euros d'amende.
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