Enquête : les abus et les arnaques des tutelles
Alors qu'elle est supposée apporter une protection des finances de ceux qu'elle concerne, la mise sous tutelle entraine parfois des dérives, des arnaques, qui les conduisent à la ruine.
Leurs proches les croyaient à l'abri, protégés par une mise sous tutelle. Mais les familles découvrent parfois ce qu'elles vivent comme un pillage organisé. "Elle n'avait plus rien, elle était obligée d'aller manger à la Croix-Rouge", raconte la fille d'une victime. Stéphane a perdu son père récemment : malade, à 80 ans, il avait du mal à gérer ses finances. Pour éviter tout problème à ses enfants, il avait lui-même demandé au juge d'être mis sous tutelle. Chez le notaire, à la mort de leur père, les enfants découvrent qu'en guise d'héritage, ils n'obtiendront que des dettes, plusieurs dizaines de milliers d'euros. Charges de copropriété, maison de retraite, frais de pharmacie : pendant les quatre ans de tutelle, le mandataire n'a, selon lui, rien payé. Pourtant, il y avait de l'argent, 3 000 € de retraite par mois. Son père vivait dans un dénuement complet, il n'avait plus accès à son argent. Impossible de savoir où est passé son argent. La famille a porté plainte, mais l'affaire est délicate : c'est la justice qui désigne les tuteurs. Ils sont 8 000 en France.
Un accès unique aux comptes des personnes sous tutelle
Depuis que la juge l'a désignée il y a plus d'un an, la tutrice que nous avons suivie est la seule à avoir accès aux comptes, chéquiers, biens et factures de l'une de ses protégées atteinte de troubles de la mémoire. Elle est la garante de son budget. Rien ne l'oblige légalement à discuter avec elle, ni même à prévenir la famille. Seul un juge peut demander des comptes, un rapport annuel est remis à la justice. Selon la Cour des comptes, les greffiers ne sont pas assez nombreux et insuffisamment formés pour examiner ces comptes-rendus.
Symbole de ces dérives : une maison avec vue sur l'Atlantique. Sa propriétaire a 82 ans, elle a été sous tutelle d'un organisme spécialisé pendant huit ans, jusqu'à ce que sa fille reprenne la main suite à une longue bataille judiciaire. La maison de famille est délabrée, inhabitable pour l'instant. Lorsque cette femme reprend la tutelle de sa mère, une dernière vente est en cours : des terrains près de la maison à 390 000€. La justice fait estimer sa valeur réelle : 85 000€ de plus. Qui a tiré profit de ces ventes ? L'organisme dit avoir été abusé par des agences immobilières, la justice a ouvert une enquête.
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