De nombreux enfants victimes de la violence des institutions publiques
Chaque année, le Défenseur des droits reçoit 3000 réclamations concernant des enfants victimes de violences exercées au sein de la famille mais aussi d'institutions comme l'école, l'hôpital ou encore des foyers. A l'origine souvent des problèmes de moyens accordés à ces structures publiques. Les eplxications du défenseur des droits, Jacques Toubon qui présente un rapport sur le sujet.
La fessée interdite dans la famille mais pas dans les établissements publics
Jacques Toubon, Défenseur des droits : "Il y a les violences qui sont au sein de la famille… mais ce que nous avons envisagé dans notre rapport, c’est une optique plus globale. Et je vais prendre simplement un exemple pour bien me faire comprendre. Cette année, un grand pas a été fait : une loi a dit qu’on interdisait toute violence au titre de l’autorité parentale. Et on l’a traduite par un article dans le code civil. Cela veut dire qu’on n’a plus le droit à la fessée, on n’a plus le droit à la « correction » comme disait la Cour de Cassation.
Mais dans le débat, il a été refusé d’inscrire cette interdiction dans le Code de l’éducation ou dans le Code de l’action sociale et des familles. Cela veut dire que cette interdiction ne s’applique pas dans des institutions aussi essentielles que les établissements d’enseignement ou les établissements médico-sociaux ! Cela ne veut pas dire naturellement que les enseignants tapent les enfants mais simplement, on voit bien la différence."
Certaines atteintes aux droits de l’enfant sont liées à l’organisation des institutions
Jacques Toubon, Défenseur des droits : "Il existe dans ces structures des violations de l’article 19 de la Convention internationale des droits de l’enfant qui dit tout enfant a le droit d’être protégé contre toute violence, de toute nature. Et il y a des institutions qui fonctionnent de telle sorte qu’elles n’assurent pas cette protection ! C’est ça la violence institutionnelle !
Nous traitons environ 3000 réclamations pour les enfants chaque année et un grand nombre vient justement d’enfants, ou de familles d’enfants ou de collatéraux, d’enfants qui sont placés en institution. Et ce que nous montrons aussi dans ce rapport, c’est combien il y a un lien entre la difficulté d’assurer les droits de l’enfant et l’absence de moyens des institutions.
Quand vous avez par exemple 20 postes vacants sur les 50 postes de médecins dans une PMI (Protection Maternelle et Infantile) d’un gros département de la région parisienne... Alors que normalement, la PMI joue un rôle formidable en matière de prévention, pas seulement en matière de santé mais aussi dans toutes les relations sociales, dans les relations intra-familiales… C’est la même chose pour le 119 ! Il y a aujourd’hui 2 appels sur 3 auxquels on répond « rappelez plus tard » ! Heureusement, je sais que le Secrétaire d’Etat a l’intention de donner des moyens au 119…"
Des difficultés institutionnelles génératrices de violence
Jacques Toubon, Défenseur des droits : "Il y a des attitudes qui ne sont pas toujours bienveillantes… qui manquent d’affectivité, d’empathie. Et puis il y a deuxièmement, des difficultés liées au fait que dans beaucoup d’institutions, on travaille dans l’urgence ! C’est par exemple l’argument que l’on nous oppose lorsque nous rappelons, en matière de prévention des violences sexuelles, qu’il faut obligatoirement, lors du recrutement d’un professionnel ou d’un bénévole, consulter l’extrait numéro 2 du casier judiciaire ou le fichier des délinquants sexuels. Beaucoup d’institutions nous répondent « j’ai quelqu’un qui manque, j’ai besoin de recruter quelqu’un de toute urgence ! »
Il est clair que l’organisation des institutions, le fait que les effectifs se réduisent… que des spécialités médicales comme la pédiatrie ou la pédopsychiatrie soient en déshérence… tout cela crée des conditions pour que, schématiquement, l’intérêt de l’institution, l’intérêt d’une profession, soit prioritaire par rapport à l’intérêt supérieur de l’enfant.
Et c’est là que se produit, une violence, un déni des droits spécifiques des enfants qui ne sont pas des objets, pas des paquets mais des sujets, dès leur premier souffle. Ils ont des droits. Notre travail de Défenseur des Droits et Défenseur des Enfants c’est de les faire respecter. Et ce que j’espère c’est qu’à l’occasion de ce 30ème anniversaire de leur Convention c’est que les Français sauront mieux que ces droits existent. 50% des Français ne le savent pas. Et surtout qu’ils feront en sorte que l’intérêt supérieur de l’enfant soit la priorité dans les familles comme dans les institutions, comme le demande la Convention internationale."
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