Le fluor, un ami qui ne vous veut pas que du bien
Dans l'organisme, on retrouve le fluor dans les os et les dents. Et on en consomme tous sans s'en apercevoir. Le fluor est présent dans ce que l'on boit (l'eau ou le thé) mais aussi dans notre alimentation (dans le poisson ou le sel). Parfois, on l'utilise aussi en connaissance de cause pour sa qualité protectrice pour l'émail.
Comment le fluor protège-t-il l'émail des dents ?
Le fluor est capable de durcir l'émail de la dent. Il la rend plus résistante aux attaques acides des bactéries qui sont à l'origine des caries. Le fluor s'incorpore à la composition chimique de la dent, il se lie très fortement aux autres composants minéraux. Et cela va former une structure encore plus dure que l'émail originel. Résultat, les acides produits par les bactéries ont beaucoup plus de mal à dissoudre, à déminéraliser l'émail. La formation de la carie est plus difficile.
Le fluor peut agir de deux manières. Quand on est enfant, sous nos dents de lait se cachent des dents définitives. Elles sont en formation, sous la gencive, à l'intérieur de l'os. Si on avale du fluor à ce moment-là, sous forme de gouttes et de comprimés, il est assimilé par notre corps. Il s'intègre à l'intérieur des dents et des os en cours de formation. On parle d'administration par voie générale mais pour les dents, elle n'est efficace que dans l'enfance.
Le fluor peut aussi agir de manière locale. Si on dépose du fluor à la surface de la dent avec du dentifrice, des bains de bouche ou du vernis, il peut s'intégrer au niveau de la couche superficielle de l'émail et jouer son rôle de protecteur. Il peut aussi y avoir une petite action générale car les enfants avalent souvent un peu de dentifrice. En plus de contrer les attaques acides, le fluor est en lui-même antibactérien car il perturbe le fonctionnement des bactéries.
Les dangers du fluor
Si un enfant ingère trop de fluor quand ses dents sont en formation, il peut au contraire être néfaste. Il peut empêcher l'émail de se former normalement (fluorose dentaire). Résultat : les dents sortent avec un émail poreux et des lignes de déminéralisation blanchâtres, qui par la suite peuvent se colorer en brun.
La fluorose dentaire touche environ 2% des enfants en France. Une fois toutes les dents définitives sorties, ce risque n'existe plus. Mais si les doses sont beaucoup plus élevées, à 10 mg par jour de fluor pendant une dizaine d'années par exemple, on risque une fluorose osseuse qui rend les os cassants. Cela peut arriver quand l'eau du robinet est très fluorée.
Faut-il éviter les dentifrices au fluor ?
Ces risques peuvent nous inciter à jeter nos tubes de dentifrice ou à privilégier ceux sans fluor mais... il ne faut pas le faire. Le danger est simplement d'en ingérer trop. Il est donc préférable de l'appliquer localement grâce aux dentifrices et aux bains de bouche et en contrôlant le dosage. Pour un enfant, on préconise 2 à 3 brossages par jour avec un petit pois de dentifrice, qui contient une dose de fluor adaptée à son âge. Les âges inscrits sur les tubes de dentifrice ne servent pas qu'au marketing pour un goût fraise ou banane, cela correspond à des dosages différents.
Il faut surtout bien recracher. Si les enfants ne savent pas encore le faire, il faut bien leur essuyer la langue. Faites attention aux doses de fluor que vos enfants ingèrent. Il faut juguler entre l'alimentation et l'eau de boisson pour ne pas dépasser la dose qui expose au risque de fluorose. Selon l'OMS, elle est de 0,05 mg par jour et par kilo de poids corporel, tous apports confondus, sans dépasser 1 mg/j. Pour un enfant de 5 ans, cela équivaut à 1 mg/jour.
Quid de la supplémentation des enfants en fluor ?
En revanche, il faut éviter la supplémentation systématique avec de petits comprimés et des gouttes. Il a fallu attendre longtemps pour que les pratiques changent à cause d'un lobbying industriel ultra-puissant. Cette prescription par les pédiatres ou les dentistes sans faire de bilan des apports fluorés au préalable était totalement ancrée dans les moeurs. Résultat, des fluoroses sont apparues chez les enfants qui consommaient en plus de l'eau ou du sel fluoré. Les apports en fluor étaient donc beaucoup trop importants.
Ce n'est qu'en 2008 que l'Afssaps (ancienne Agence du médicament) a rédigé un consensus de bonnes pratiques autour du fluor après avoir analysé avec un collège de professionnels les dernières données scientifiques sur le sujet. Désormais, on réserve cette prescription aux enfants à haut risque carieux, c'est-à-dire ceux qui ont de mauvaises habitudes alimentaires et pas accès aux mesures d'hygiène ou des malformations de l'émail héréditaires. Mais on ne prescrit pas de fluor avant d'avoir effectué un bilan des apports fluorés. Et pour supplémenter, on utilise une eau minérale destinée aux nourrissons à moins de 0,3 mg/l.
Comment éviter les surdosages en fluor ?
Pour calculer nos apports fluorés, on peut tout simplement consulter chez son chirurgien-dentiste et faire le point avec lui. On récupère les étiquettes de l'eau et du thé que l'on boit, du sel que l'on utilise et on évalue la fréquence à laquelle on mange du poisson. Certaines eaux en bouteille sont très fluorées, surtout les eaux gazeuses. Cela va de 0,1 à jusqu'à 9 mg/l. Pour la préparation des biberons des nourrissons, il est d'ailleurs conseillé d'utiliser une eau fluorée à moins de 0,5 mg/l.
L'eau du robinet n'est pas volontairement fluorée en France, mais il existe des départements où la teneur en fluor est plus haute que d'autres en raison de la composition du sol. La valeur de ce taux est disponible en mairie, vous pouvez donc vous le procurer très facilement. Il faut donc surtout utiliser le fluor par voie locale, qu'on soit petit ou grand. Et au moment où les dents se forment, réalisez un bilan fluoré pour éviter une fluorose à vos enfants et petits-enfants.
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