Troubles mentaux, hypertension, cancers... Le travail de nuit est un cauchemar pour la santé
L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail a étudié, dans le détail, les effets nocifs du travail de nuit.
L'étude fait froid dans le dos. Un rapport d'expertise de l'Anses (l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail), publié mercredi 22 juin, souligne les dangers du travail de nuit.
Réclamé par le syndicat CFTC, ce rapport a été conduit par un groupe d'experts. Pendant quatre ans, ils ont étudié la documentation scientifique et consulté d'autres experts.
Au terme de cette vaste étude, ils concluent que "le travail en horaires de nuit s’accompagne d’une désynchronisation des rythmes biologiques, sociaux et familiaux, pouvant conduire à des répercussions sur l’état de santé". Une étude d'autant plus inquiétante que "le nombre de travailleurs de nuit a presque doublé en vingt ans". En 2012, 15,4% de la population était concernée (majoritairement des hommes, 21,5%, contre 9,3% de femmes, mais les chiffres augmentent). Soit 3,5 millions de personnes en France.
Ce que dit l'étude
L'étude divise le "niveau de preuve" des effets du travail de nuit : les effets avérés, ceux qui sont probables et ceux qui sont possibles.
Les effets avérés. Sans surprise, il est avéré que le travail de nuit engendre des problèmes de sommeil. Il est de mauvaise qualité et souvent trop court. Travailler la nuit provoque aussi de la somnolence. Enfin, il est prouvé que travailler de nuit provoque un syndrome métabolique, c'est-à-dire l'association d'une série de problèmes de santé (tour de taille, pression artérielle, cholestérol...).
Les effets probables. Ils sont beaucoup plus nombreux. Les experts relèvent des risques de cancers (du sein, de la prostate, du pancréas...), d'obésité, de diabète, de maladies coronariennes, mais aussi de troubles de la santé psychique ou encore des problèmes de performances cognitives. Par exemple, des études "suggèrent que l’augmentation de la prise alimentaire (plutôt sucrée) serait une réponse (...) compensatoire à la privation de sommeil, qui s’observe lors du travail posté avec horaire de nuit". Les experts remarquent encore que "le travail de nuit influerait sur les facteurs de risques psychosociaux et les troubles du sommeil, qui à leur tour pourraient augmenter les risques de troubles mentaux".
Les effets possibles. Enfin, faute de documentation, certains effets sont considérés comme seulement "possibles", à savoir l'hypertension artérielle, les accidents vasculaires cérébraux et les dyslipidémies (une concentration anormalement élevée ou diminuée de lipides).
Ce que conseille l'Anses
En conséquence, l'agence "recommande de limiter le recours au travail de nuit" qui devrait rester "exceptionnel", conformément au Code du travail. Elle recommande "d’évaluer l’adaptation du cadre réglementaire en vigueur à la protection de la santé des travailleurs de nuit, et le faire évoluer le cas échéant, en considérant la dimension européenne".
Elle juge nécessaire, à court terme, "d'ajuster la surveillance médicale des travailleurs de nuit", tout en prônant "l’optimisation des modes d’organisation du travail de nuit, afin d’en minimiser les impacts sur la vie professionnelle et personnelle".
L'Anses pointe qu'il faudrait évaluer "le coût social du travail de nuit" qui pourrait se mesurer en "répercussions sur la vie familiale, les coûts induits par les transports ou encore l’absentéisme". Aujourd'hui, il est "très difficilement évaluable, car les statistiques associant les conséquences médicales et sociales avec les horaires de travail sont peu nombreuses". Elle préconise de se pencher sur la question et de comparer ce coût social aux "bénéfices potentiels".
Enfin, l'agence conseille de poursuivre les études, notamment sur "les effets pour lesquels les éléments de preuve sont limités".
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