Un gigantesque trou dans la banquise de l'Antarctique intrigue les scientifiques
La polynie de Weddell était apparue au même endroit, dans l'océan Austral, dans les années 1970, avant de disparaître durant quarante ans, jusqu'à l'an dernier.
Au milieu de l'étendue d'eau de mer gelée qui ceinture le continent Antarctique, un trou. Apparu sur les images satellites le 9 septembre, il intrigue particulièrement les scientifiques depuis début octobre. La polynie de Weddell –c'est son nom– a atteint la taille maximum de plus de 80 000 km², et étonne par sa localisation, ce type de trous étant plus courants près des bords de la banquise, à la limite avec l'eau de mer qui n'est pas gelée. Et personne ne sait pourquoi elle est apparue. Franceinfo vous explique ce phénomène.
Comment s'est formé ce trou ?
Les polynies sont des étendues d'eau de mer liquide qui persistent au milieu de la banquise (eau de mer gelée). Elles se forment quand de l'eau salée chaude remonte, sous l'effet de courants ou de la topographie des fonds marins, faisant fondre la glace et l'empêchant de se reformer, explique le Centre national américain de données sur la neige et la glace (en anglais).
La polynie de Weddell est située, comme son nom l'indique, dans la mer de Weddell, dans une partie de l'océan austral qui borde le continent Antarctique. Sur ce gif montrant l'évolution de la banquise entre avril et septembre (durant l'hiver austral), on voit clairement la polynie de Weddell se former et grandir jusqu'à fin septembre, à la fin de l'image. Sa superficie est proche de celle de l'Irlande ou de l'Autriche, elle correspond à trois fois la taille de la Bretagne ou à celle de la Nouvelle-Aquitaine.
Antarctic sea ice freeze season in review - look for the formation of the #WeddellPolynya. Extent remains well below average (colored lines) pic.twitter.com/0HWFnDvA0D
— Zack Labe (@ZLabe) October 2, 2017
Le résultat est un gigantesque trou au milieu d'une grande étendue de banquise. "C'est assez remarquable. On dirait qu'on a donné un coup de poing à travers la glace", commente le physicien de l'atmosphère Kent Moore à Motherboard (en anglais). Une sonde flottante a justement refait surface à l'intérieur de cette polynie, et va permettre de recueillir des données pour mieux étudier sa formation.
Autonomous float deployed in 2015 has resurfaced unexpectedly inside polynya & started transmitting data https://t.co/qnyTYRVoOy @NSF pic.twitter.com/JgfwdDtBoc
— The Antarctic Report (@AntarcticReport) October 12, 2017
Est-il lié au réchauffement climatique ?
S'il est tentant de le supposer, alors que l'on sait que la banquise est de plus en plus fragile (et de moins en moins étendue, même au cœur de l'hiver), il est "prématuré" de le dire, estime Kent Moore. Le fait que cette polynie soit apparue dans les années 1970 avant de disparaître laisse penser que la température de la planète, si elle avait une influence, ne serait pas le seul facteur en cause. Et la remontée d'eau chaude sous la banquise est un phénomène naturel.
Est-ce un phénomène sans précédent ?
Non, la polynie de Weddell était un phénomène déjà connu. Elle était apparue au même endroit entre 1974 et 1976, avant de disparaître. A l'époque, elle était d'ailleurs près de trois fois plus grande qu'aujourd'hui, avec une superficie d'environ 250 000 km², explique la Nasa (en anglais).
The mid-1970's featured an even larger polynya; there is a nice recent summary from @NASAEarth at https://t.co/2ScNCyK3d2. Fascinating! pic.twitter.com/PedPgbFGDc
— Zack Labe (@ZLabe) October 2, 2017
Elle n'avait plus été revue depuis, jusqu'à l'an dernier, quand elle avait resurgi pendant quelques semaines. Elle a réapparu cette année, pour une durée plus longue. Sans que l'on connaisse les raisons de ce phénomène intermittent. Ni que l'on sache s'il est récurrent. "Est-ce que la polynie de Weddell existait avant 1970, et sommes-nous en présence d'un processus périodique qui resurgit environ tous les quarante ans ?", s'interroge un spécialiste de la glace polaire cité par la Nasa, Willy Weeks. "S'il y a eu des occurrences plus anciennes, il n'y en a aucune trace".
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