SeaFrance : les brumeuses pratiques de la CFDT
En plein conflit social pour le sauvetage de la compagnie de ferries transmanche, les méthodes douteuses de son syndicat majoritaire refont surface.
SeaFrance, une entreprise menacée de cessation d'activité, mais surtout une gestion trouble. Alors que l'avenir de la compagnie de ferries transmanche doit être tranché lundi 9 janvier, les méthodes étranges de la CFDT Maritime Nord, son syndicat ultra-majoritaire, refont parler d'elles.
Voiture vandalisée, attaques verbales, voire agressions physiques... Sous couvert d'anonymat, des salariés non-syndiqués dénoncent aujourd'hui des méthodes d'intimidation parfois violentes. "J'ai des enfants, une famille, je ne veux pas retrouver ma maison en feu", a confié à Europe 1 un employé de SeaFrance.
La CFDT SeaFrance désavouée par sa confédération
Jeudi 5 janvier, la confédération CFDT a exprimé son "désaccord" avec les responsables syndicaux de SeaFrance. Dans un communiqué, elle les accuse de porter "une lourde responsabilité" dans la situation de la compagnie.
Ils "n'ont pas voulu examiner d'autres projets" de reprise, condamne la confédération. A cela "s'ajoutent des soupçons sur des pratiques obscures et frauduleuses des responsables CFDT de SeaFrance".
Un rapport accablant de la Cour des comptes
Les faits ne seraient pas récents. En mars 2009, la Cour des comptes pointe déjà de nombreux dysfonctionnements. Entre autres que l'absentéisme a augmenté au sein de SeaFrance bien plus vite que les effectifs des salariés : +28 % de journées d'absence entre 2004 et 2007.
Dans son rapport confidentiel, la Cour dénonce en outre un recrutement s'effectuant par cooptation selon des critères peu transparents : "Les recommandations familiales et surtout l'appui de la formation syndicale majoritaire entrent comme un facteur déterminant dans la sélection des candidats." Cette pratique amène, estime-t-elle, à recruter des personnes peu motivées ou sans aucune qualification.
Le syndicat dirigerait l'entreprise
"Un système CFDT" se serait progressivement installé dans l'entreprise. La direction y aurait consenti, escomptant ainsi acheter "la paix sociale", juge Philippe Hénon, le rédacteur en chef du journal Nord Littoral, qui a enquêté dans le port de Calais.
Le journaliste affirme que le syndicat dirige l'entreprise et décide des embauches, des promotions, des avantages accordés aux salariés, notamment des congés négatifs, c'est-à-dire en bonus de leur solde légal.
Des critiques rejetées en bloc par la CFDT Maritime Nord. Engagé dans d'âpres négociations avec le gouvernement, Didier Cappelle, son secrétaire général, dénonce "une campagne de calomnie" lancée par "un patron voyou" et rappelle que son syndicat a remporté près de 80 % des suffrages aux dernières élections. Preuve selon lui que ces accusations sont infondées.
Dernier élément embarrassant, ajoutant à ce climat délétère : le parquet de Boulogne-sur-Mer a ouvert une enquête pour "abus de confiance" à la suite d'une plainte de la direction de SeaFrance, mi-avril 2010.
"Au stade des enquêtes judiciaires en cours, la présomption d'innocence prévaut, conclut la confédération CFDT. Cependant, si les propos de la presse de ce jour étaient confirmés par l'enquête judiciaire, la CFDT prendrait les décisions qui s'imposent en termes d'exclusion du syndicat Maritime Nord et de ses responsables."
D'après Europe 1, les noms des deux principaux dirigeants de la CFDT Maritime Nord - Eric Vercoutre et Didier Cappelle - apparaîtraient dans le dossier. Leurs comptes en banque auraient été épluchés par la police, mais leur implication ne serait pas avérée.
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