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Déserts médicaux : "Quand tous les gens de ma génération seront partis en retraite, il n’y aura quasiment plus de médecins"

La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, dévoile vendredi son plan de lutte contre les déserts médicaux. Des mesures très attendues dans certaines régions qui ne parviennent pas à attirer de nouveaux praticiens.

Article rédigé par Matthieu Mondoloni - Edité par Cécile Mimaut
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Installé à Charny, dans l'Yonne, depuis 34 ans, le docteur Alain Schaller reste le seul médecin en activité dans la commune. (MATTHIEU MONDOLONI / RADIO FRANCE)

Difficulté d’accès aux soins, pénurie de médecins… Des millions de Français souffrent au quotidien de la désertification médicale. La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, en a fait un chantier prioritaire et dévoile, vendredi 13 octobre, son plan d’action. Dans certaines régions, l’urgence est palpable. C’est le cas de la commune nouvelle de Charny, dans l’Yonne, où s’est rendu franceinfo. Dans la très moderne maison de santé, ouverte il y a cinq ans, la salle d’attente et le carnet de rendez-vous ne désemplissent pas. Mais les bureaux des médecins, eux, se vident.

La maison de la santé de Charny, dans l'Yonne, a ouvert il y a cinq ans mais trouve pas de locataire. (MATTHIEU MONDOLONI / RADIO FRANCE)

Dans cette localité de Bourgogne-Franche-Comté, il n’y a plus qu’un généraliste pour environ 3 000 habitants. Nous sommes dans ce qu’on appelle un désert médical. Et celui ici qui le traverse, désormais tout seul et péniblement, c’est le docteur Alain Schaller. "Depuis une dizaine d’années, j’ai vu partir 7 à 8 praticiens dans les 20 kilomètres aux alentours. On était trois à Charny, un de mes collègues est décédé, l’autre est parti il y a un an", raconte le généraliste, installé ici depuis plus de 34 ans.

Quand tous les gens de ma génération seront partis en retraite, il n’y aura quasiment plus de médecins

Dr Alain Schaller, unique généraliste de Charny, dans l'Yonne

à franceinfo

Le premier service d’urgences est situé à plus de 30 kilomètres de là, accessible uniquement en voiture et évidemment souvent saturé. Du coup, c’est à la pharmacie du village que certains malades viennent chercher des conseils, à l’image de Maryvonne, 74 ans, et le front brûlant. "Personne ne se déplace, on ne vous donne pas de rendez-vous. On peut mourir à la maison et puis c’est tout", soupire la vieille dame.

J’ai 40 de fièvre, j’ai téléphoné à mon médecin ce matin et on m’a dit pas avant lundi prochain.

Maryvonne, 74 ans

à franceinfo

De l’autre côté du comptoir, la pharmacienne, Stéphanie Hilali, ne comprend pas comment on en est arrivé à une telle situation. Surtout que la commune est “attractive et dynamique”, dit-elle, avec trois boulangeries, plusieurs agences immobilières, des fleuristes, des coiffeurs, des restaurants,... "On a tout pour bien vivre mais pas suffisamment de médecins pour la population", résume la pharmacienne.

Michel Courtois, maire de Charny, dans l'Yonne, devant la maison de la santé de sa commune, qui souffre du manque de médecins. (MATTHIEU MONDOLONI / RADIO FRANCE)

Michel Courtois, maire de Charny, s’inquiète. Malgré une maison de santé toute neuve, malgré des subventions offertes aux nouveaux médecins, aucun ne veut venir s’installer. Aujourd’hui, il ne voit plus qu’une solution. "L’Etat doit faire en sorte que ceux qui sortent avec un cursus validé soient obligés de venir s’installer dans les endroits où il n’y a plus de médecins", tempête-t-il.  

Je n’en ai rien à faire des annonces politiques politiciennes, moi c’est du concret que je veux.

Michel Courtois, maire de Charny

à franceinfo

Le maire n’a d’ailleurs pas attendu les mesures de la ministre pour agir. Avec son conseil municipal, il a décidé de parrainer un étudiant en médecine de la région. La commune va subventionner ses études, et en échange, il viendra installer son cabinet à Charny, mais seulement dans quatre ans.

Le reportage de Matthieu Mondoloni.

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