8 mars : "Tout ce que les femmes ont aujourd'hui dépend de femmes comme Clara Zetkin", souligne l'historienne Florence Hervé
Florence Hervé, journaliste, historienne et féministe franco-allemande, revient sur franceinfo dimanche sur l'histoire de la militante féministe Clara Zetkin, qui avait créé la journée internationale des droits des femmes en 1911.
"C'est très important de dire qui était Clara Zetkin, pour quoi elle s'est battue, quels étaient ses combats. Et par rapport à nous, pourquoi c'est important aujourd'hui de continuer sa lutte." Invitée de franceinfo dimanche 7 mars, Florence Hervé, journaliste, historienne et féministe franco-allemande, auteure de Je veux me battre partout où il y a de la vie, Clara Zetkin, paru aux éditions Hors d'Atteinte, revient sur l'histoire de la militante féministe Clara Zetkin, qui avait créé la journée internationale des droits des femmes en 1911, mais a été oubliée par l'histoire.
franceinfo : Qui était Clara Zetkin ?
Florence Hervé : Clara Zetkin était une des grandes socialistes féministes allemandes. Elle venait d'une famille très attachée aux idéaux de la Révolution française. Elle avait même un côté français puisque son grand-père était officier de l'armée d'occupation napoléonienne. Son père était instituteur, sa mère femme au foyer. Elle s'était engagée dans le mouvement féminstre dit "bourgeois" en Allemagne, par opposition au mouvement féministe dit "prolétaire". Et ce qui était très important chez Clara Zetkin, c'est qu'elle venait de la région de Leipzig, où il y avait de grandes grèves des travailleuses du textile. Elle était donc confrontée aux injustices, à la misère de ces travailleuses du textile.
L'idée de ce 8 mars est donc de rendre hommage aux travailleuses ?
Exactement. Ce qui joue un rôle aussi, c'est ce sentiment d'injustice sociale qu'elle ressentait très fortement et le fait qu'elle avait accès aux cercles socialistes via une amie russe. C'est là que Clara Zetkin a rencontré son futur compagnon, russe, Ossip Zetkin. Il a été chassé d'Allemagne parce qu'il était socialiste : ils ont été interdits en Allemagne de 1878 à 1890. Il y a eu toute cette évolution qui l'a poussée à s'engager dans le mouvement féministe. C'est en France qu'elle a été très sensibilisée par le mouvement socialiste, qu'elle a commencé à s'intéresser aux mouvements féministes. En 1889, elle fait son premier grand discours sur les femmes travailleuses où elle parle des conditions de l'émancipation féminine. C'est là qu'a commencé son engagement. Clara Zetkin ne prêchait pas, elle agissait.
Clara Zetkin est morte en 1933 à l'âge de 75 ans : elle a été complètement oubliée en France alors qu'elle était très connue dans les années 1920, comment l'expliquer ?
Après la Seconde Guerre mondiale, elle est passée aux oubliettes. Elle était socialiste, puis communiste à la fin de sa vie. En revanche en RDA, elle était une héroïne mais en RFA, les mouvements socialistes, communistes et féministes étaient interdits.
Que dirait Clara Zetkin en voyant les mobilisations des mouvements féministes aujourd'hui ?
Je crois qu'elle serait très contente. Elle manifesterait certainement et elle ferait peut-être un discours ! En tout cas, tout ce que les femmes ont aujourd'hui dépend de toutes les générations de femmes qui se sont battues pour leurs droits. C'est un peu grâce à Clara Zetkin que nous avons eu le droit de vote, tous les acquis que nous avons eu grâce à ces luttes tenaces, constantes. Mais Clara Zetkin parle aussi toujours du collectif : on n'en serait pas là aujourd'hui si on n'avait pas eu toutes ces arrières-arrières-grand-mères !
Peu de communes ont rendu hommage à Clara Zetkin, en nommant des rues, des parcs à son nom : souhaitez-vous que cela change ?
Absolument, car ce qui ne se voit pas et ne se nomme pas n'existe pas : c'est très important de dire qui était cette femme, pourquoi elle s'est battue, quels étaient ses combats. Et par rapport à nous pourquoi c'est important aujourd'hui de continuer sa lutte.
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