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Au Bac 2022, les écrivaines toujours minoritaires : "Il faut augmenter le nombre d'autrices considérées comme classiques !", plaide une professeure de lettres

Alors que des milliers d'élèves de première planchent ce jeudi sur les épreuves du baccalauréat de français, certains d'entre eux regrettent qu'en cours de français, la place des auteurs femmes reste largement inférieure à celle des auteurs hommes.

Article rédigé par franceinfo - Claire Leys
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Simone de Beauvoir, le 14 avril 1986, à Paris. (STF / AFP)

Qu'ont en commun Olympe de Gouges, Madame de Lafayette et Marguerite Yourcenar ? Ces trois écrivaines sont susceptibles de tomber à l'épreuve du bac français, dont l’écrit se tient jeudi 16 juin, en plein épisode de chaleur. Soit trois femmes, sur les douze auteurs inscrits au programme des élèves de Première.

"Je n'ai pas trop de noms de femmes en tête"

La preuve avec Nina, 16 ans, qui passe son bac de français jeudi, à Bondues dans le Nord. Et quand on lui demande quelles sont ses autrices préférées, la réponse est sans appel : "Justement, je n'ai pas trop d'idées de noms de femmes en tête", sourit-elle, songeuse.

"Souvent, les hommes mettent en scène des femmes avec des stéréotypes, comme des femmes qui font le ménage, qui cuisinent, qui s'occupent des enfants, qui ne travaillent pas."

Nina, 16 ans

à franceinfo

"La femme n'est jamais la protagoniste : dans Molière, la femme c’est la nounou !, déplore la lycéenne. Il n'y a qu'en littérature d'idées où l'on étudie une femme, Olympe de Gouges, avec la Déclaration de la femme et de la citoyenne, où c'est justement la femme qui s'engage et qui argumente."

Depuis le collège Nina a principalement étudié des œuvres d'hommes en français. Elle espère tomber sur Olympe de Gouges à l'écrit du bac. Cette femme de lettres, pionnière du féminisme, l'a beaucoup marquée "C'est en étudiant Olympe de Gouges que je me suis demandé pourquoi on étudiait pas d'autres femmes, poursuit Nina. Il y a des femmes qui écrivent très bien et il faut s'engager pour que ça soit égal dans le monde de la littérature."

"Il y a une fille dans ma classe qui a demandé à la prof pourquoi Olympe de Gouges était la seule femme qu'on étudiait : elle n'a pas su répondre."

Nina

à franceinfo

Cette question, beaucoup d'enseignants se la posent aussi. A commencer par Françoise Cahen, professeure de lettres en lycée dans le Val-de-Marne. En 2016, elle avait lancé une pétition intitulée "Pour donner leur place aux femmes dans les programmes de littérature du bac L" et elle a obtenu gain de cause. En 2018, pour la première fois depuis 20 ans, une écrivaine a fait irruption dans le programme. Mais, selon l'enseignante, il reste du chemin à parcourir.

Marguerite Yourcenar, Marguerite Duras... mais après ?

"Il faut augmenter le nombre d'autrices considérées comme classiques, insiste-t-elle. Sinon, on va toujours tomber sur Marguerite Yourcenar, Marguerite Duras, qui vont tourner en boucle. Il faudrait que dans l'histoire littéraire, on puisse exhumer des femmes un peu oubliées. Cela s'est par exemple fait pour Christine de Pisan, qui a été mise au programme de l'agrégation il y a quelques années. Et maintenant, on la retrouve dans les manuels des élèves."

Pour l'instant même les autrices les plus connues n'ont pas une place garantie dans le programme. L'année prochaine, elles seront deux : Olympe de Gouges, à nouveau, et Colette. Une femme de moins, donc, que cette année.

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