Violences conjugales : "Fuir dans une extrême précarité, c’est très dur", témoigne une femme qui a quitté son domicile avec ses deux enfants
En 2019, après cinq années de coups et d'injures, Sandra* fuit son domicile avec ses deux enfants. Elle trouve un hôtel en urgence grâce au 115, mais elle n'a même pas de quoi payer un ticket de RER pour s'y rendre. "Je prenais les transports sans payer, avoue-t-elle. C’était très difficile et risqué, mais je le faisais quand même pour pouvoir dormir. Je n’avais rien, pas d’argent pour nourrir les enfants. S’il y avait un enfant avec un gâteau, je le cachais à mon fils pour qu’il puisse pas le voir parce que je ne pouvais pas lui acheter".
Sans aucune ressource, il faudra que Sandra patiente quatre mois pour toucher le RSA et soit logée par une association."Fuir dans une extrême précarité, c’est très dur. Il y a des femmes qui n’osent pas le faire, qui sont dans mon cas, qui ne travaillent pas, qui n’ont aucun revenu. Elles sont obligées d’encaisser les coups", raconte-t-elle.
Gérer les besoins immédiats après le départ, c'est l'objectif de l'aide universelle d'urgence, qui est officiellement mise en place le 1er décembre 2023. "On est sollicité pour verser cette aide dans un délai de trois à cinq jours donc très rapidement, explique Nicolas Grivel, le directeur de la Caisse nationale des allocations familiales.
"Les victimes peuvent se rendre à la Caf, téléphoner, effectuer une démarche en ligne…"
Nicolas Grivelle, le directeur de la Cafà franceinfo
"Ça va d’une aide minimale à 240 euros à peu près à une aide qui peut aller jusqu’à 1 300 euros pour les femmes seules avec au moins trois enfants et très peu de revenus", précise Nicolas Grivelle. L'aide est versée directement sur le compte de la victime, d'un de ses proches, ou d'une association qui l'accompagne.
Seule une femme sur quatre porte plainte
Pour la demander, il faut avoir déposé plainte il y a moins de 12 mois, d'ordonnance de protection ou par un signalement adressé au procureur de la République. "Une femme sur quatre va finalement porter plainte", relate Françoise Brié, directrice générale de la Fédération nationale solidarité femmes, qui s'appuie sur des statistiques de 2021. Elle appelle à élargir le dispositif : "Pouvoir obtenir cette aide universelle d’urgence à travers une attestation d’une association spécialisée. Pour nous, il est aussi important d’inclure un certain nombre de femmes en situation administrative complexe du fait du conjoint violent. On espère que c’est une première étape et que ça va être suivi d’améliorations".
Pour les précaires cette aide cette aide sera non remboursable, pour celles qui le sont moins, il s'agira d'un prêt que le conjoint devra rembourser s'il est condamné par la justice. En 2022, près de 244 300 personnes ont été victimes de violences conjugales, soit 15% de plus que l'année précédente, selon les services de sécurité. Cette même année, 118 femmes ont été tuées par leur conjoint, selon le ministère de l'Intérieur.
*Le prénom a été modifié
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