Harcèlement scolaire : "Ce n'est pas avec un questionnaire qu'on sauve la vie", déplore le président d'une association d'accompagnement de victimes
"Ce n'est pas avec un questionnaire qu'on sauve la vie", déplore Hugo Martinez, le président-fondateur de l'association Hugo!, qui accompagne les victimes de harcèlement scolaire, invité jeudi 9 novembre sur franceinfo à l'occasion de la Journée nationale de lutte contre le harcèlement scolaire, et de l'initiative du ministre Gabriel Attal de distribuer un questionnaire dans toutes les classes de France à partir du CE2.
franceinfo : Les mesures dévoilées aujourd'hui par le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal vous semblent-elles suffisantes, notamment le questionnaire d'auto-évaluation ?
Hugo Martinez : Ce n'est pas avec un questionnaire qu'on sauve la vie, qu'on arrive à sauver des élèves, qu'on répond aux familles ! Vous êtes un élève harcelé, vous recevez ce questionnaire, sur le bureau d'à côté, vous avez votre harceleur : comment voulez-vous que les réponses de l'élève victime soient sincères ?
Je pense que ce questionnaire doit être pensé dans un autre contexte, pourquoi pas à la maison ou dans les espaces numériques des écoles, avec un formulaire interactif. Vous voyez, je pense qu'il y a des réflexions qui auraient dû être menées avec les acteurs de terrain et qui n'ont pas été faites.
Selon vous, les associations ont insuffisamment été associées aux mesures annoncées par le gouvernement ?
Les associations n'ont pas été consultées, ils annonçaient une nouvelle ligne construite avec les acteurs de terrain mais nous n'avons pas eu un seul échange avec le ministère. On annonce des mesures fortes pour avoir des effets de communication, mais derrière, la réalité du terrain est tout autre ! On a 0 réponse, zéro solution et on laisse les associations trouver des réponses, sans moyens, sans outils et sans relais.
Quelle mesure concrète aurait pu être mise en place, par exemple ?
Il faudrait créer un délit de harcèlement scolaire. Il est spécifique parce qu'il y a tellement de milieux concernés : dans la cour de récré, en classe, à la cantine, à la maison... c'est un harcèlement multifacteurs et multigéographique.
Et sur la prise en charge des victimes, vous qui avez vous-même été harcelé ?
Je crois que ce qui rend grave le harcèlement scolaire, c'est qu'il atteint la confiance de soi. Et quand un enfant est en pleine phase de construction de son estime de soi et qu'on vient la détruire, on sait que ça a impact sur toute la vie. S'il n'y a pas une réponse sur la reconstruction, sur l'après, c'est là que cela devient de plus en plus difficile.
On dit souvent qu'il faut "en parler", avez-vous des conseils ?
Il ne faut pas se limiter à l'échange oral ! Cela peut aussi être sous forme de lettre, de vidéo, de chanson. On peut "en parler" différemment ! Il y a tellement d'enfants différents et de canaux différents. Le numéro 30 18 a lancé une application par exemple, ça ouvre des voies à des signalements.
Et le deuxième conseil que je donne aux parents, c'est de pousser les enfants à pratiquer une passion artistique ou sportive et aider les enfants à identifier cette passion, que cette passion soit un espace de reprise de confiance en soi.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.