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Le collège reproduit les inégalités sociales : la preuve en quatre graphiques

Alors que le gouvernement tente de faire accepter sa réforme, les chiffres du ministère de l'Education nationale démontrent que l'origine sociale de l'élève est un facteur déterminant dans sa réussite ou non au collège.

Article rédigé par Vincent Matalon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Une classe d'un collège de Douai (Nord), le 5 septembre 2011. (MAXPPP)

"Notre école n'est plus le rempart qu'elle devrait être contre la reproduction sociale. Au contraire, elle encourage, elle fabrique de l'échec, de l'exclusion." Ces mots, ce sont ceux de Manuel Valls. Pour vanter aux Français les mérites de la réforme du collège portée par sa ministre de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem, le Premier ministre s'est fendu d'une tribune parue dans Libération, lundi 18 mai. Il y justifie l'urgence de s'attaquer au sujet par l'incapacité du système scolaire à réduire les inégalités.

Si le fond de la réforme est critiqué à gauche comme à droite, difficile de donner tort au Premier ministre sur le constat, tant les chiffres communiqués par le ministère de l'Education montrent à quel point le déterminisme social joue à plein lors de l'entrée dans le secondaire. La preuve en quatre graphiques.

Les enfants de familles défavorisées surreprésentés dans les classes Segpa

Qu'il s'agisse du privé ou du public, le cursus général du collège présente une mixité sociale importante. Lors de la rentrée 2013, les classes "classiques" comptaient à peine plus d'enfants issus de familles classées comme favorisées ou très favorisées (chefs d'entreprise de dix salariés ou plus, cadres, instituteurs ou encore professions intermédiaires) que d'élèves venant d'un milieu social plus démuni (parents ouvriers ou chômeurs notamment).

La cohabitation sociale s'arrête en revanche à la porte des cursus particuliers. Dans les Ulis, qui regroupent des élèves éprouvant des troubles cognitifs ou mentaux, les Dima, qui alternent cours et formation, ou encore les dispositifs relais destinés aux collégiens en risque de marginalisation, les enfants de familles défavorisés sont largement surreprésentés (près de 6 élèves sur 10).

Cette segmentation sociale est encore plus criante dans les sections d'enseignement général et professionnel adapté (Segpa). Dans ces classes, qui regroupent les élèves qui présentent "des difficultés d'apprentissage graves et durables" et "ne maîtrisent pas toutes les connaissances et compétences attendues à la fin de l'école primaire" selon le ministère de l'Education nationale, moins d'un jeune sur dix appartient à une famille favorisée. En revanche, 71,6% des élèves ont un parent en situation socioprofessionnelle difficile.

Les enfants de cadres réussissent bien plus
que les autres à l'épreuve du brevet

Le déterminisme social influe également lorsqu'il s'agit de décrocher son brevet des collèges. Les données obtenues par francetv info montrent que, si le taux de réussite global augmente depuis dix ans, quelle que soit la catégorie socioprofessionnelle du parent de référence, les écarts de résultats entre les enfants originaires d'un milieu social favorisé et ceux provenant d'un milieu social plus difficile ne se réduisent que très lentement.

En 2004, 71,5% des enfants d'ouvriers obtenaient ainsi leur premier diplôme en fin de troisième, contre 92,5% des enfants de cadres. Dix ans plus tard, ils étaient respectivement 79,8% et 96,3%.

Les enfants de familles défavorisées obtiennent rarement une mention au brevet

L'écart entre les niveaux de vie des parents se traduit également sur le relevé de notes du brevet. Lors de la dernière session de l'examen, un élève dont le parent de référence était issu d'une catégorie sociale très favorisée (chefs d’entreprise de dix salariés ou plus, cadres et professions intellectuelles supérieures, professeurs des écoles et instituteurs) avait plus de trois chances sur quatre de décrocher une mention.

Le même scénario pour un enfant de chômeur, classé par le ministère (document PDF) comme étant issu d'un milieu défavorisé, est beaucoup plus difficile à réaliser : seulement 35,8% d'entre eux peuvent espérer obtenir une mention. Quant au Graal que représente la mention très bien, il concernait en 2014 19,8% des enfants très favorisés, contre seulement 3,8% des élèves défavorisés.

Les enfants d'ouvriers accèdent plus difficilement
que les autres au lycée général

"Trop souvent, le collège est devenu un 'lieu de tri' entre ceux qui 'mériteraient' de poursuivre au lycée et vers l’enseignement supérieur, et ceux qui ne pourront pas", écrit Manuel Valls dans sa tribune à Libération. Les statistiques du ministère de l'Education, qui a suivi le parcours d'élèves entrés en sixième en 1995 et en 2007, confirment ce diagnostic. 

Dans leur écrasante majorité, les enfants de cadres ou d'enseignants sont ainsi dirigés en fin de troisième vers un lycée général ou technologique, afin d'y poursuivre leurs études. Ce parcours "classique" ne concerne en revanche qu'une minorité d'enfants d'ouvriers non qualifiés ou de chômeurs, qui ne sont respectivement que 43,9% et 35,9% à y poursuivre leur scolarité.

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