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Service national universel pour les lycéens : "Les élèves ont besoin d'école, ils n’ont pas besoin de SNU", déclare le Snes-FSU

L'une des pistes envisagées par le gouvernement est la mise en place d'un stage de cohésion de 12 jours pour les élèves de seconde, pendant le temps scolaire.
Article rédigé par franceinfo
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La cérémonie de commémoration du 8 mai 1945 à Perpignan avec les jeunes du SNU, le service national universel, le 8 mai 2023. (THIBAULT DELMARLE)

"Les élèves ont besoin d'école, ils n’ont pas besoin de SNU", tacle jeudi 18 mai sur franceinfo Sophie Vénétitay, la secrétaire générale adjointe du syndicat Snes-FSU, à propos du Service national universel. L'une des pistes envisagées par le gouvernement, c'est la mise en place d'un stage de cohésion de 12 jours pour les élèves de seconde, pendant le temps scolaire. Plusieurs syndicats d'enseignants ont été reçus cette semaine au cabinet de la secrétaire d'État chargée de la jeunesse, Sarah El Haïry, pour évoquer cette piste. Les représentants du Snes-FSU s'y sont rendu mardi 16 mai. D'autres rencontres sont prévues lundi.

franceinfo : Ce stage de cohésion, est-il à vos yeux une bonne idée ?

Sophie Vénétitay : C'est une très mauvaise idée que cette expérimentation du SNU, avec à terme sa généralisation, notamment parce qu'on est sur une organisation sur temps scolaire. Il faut bien mesurer ce que ça veut dire. Là, dans le projet qui est avancé par le gouvernement, ça signifie retirer douze jours de cours aux élèves. Nous, on considère qu'on ne fait pas avancer une société en retirant des heures de cours aux élèves. Les élèves ont besoin d'école, ils n’ont pas besoin de SNU.

Vous connaissez les arguments de l'exécutif : promouvoir la mixité sociale. Le creuset commence à l'école. Il ne peut pas se marier, même de façon parcellaire, avec l'idée du Service national universel ?

Encore une fois, il y a les discours de l'exécutif et il y a la réalité. Dans le projet qui nous a été présenté cette semaine par les deux ministères concernés, on est dans l'idée qu'une classe va partir dans un centre SNU, mais un centre SNU de proximité, ce qui veut dire qu'il ne va pas y avoir de mélange entre les élèves de différentes régions. Je me souviens qu'il y a quelques semaines, Sarah El Haïry disait que la grande vertu du SNU, ça allait être de pouvoir faire se rencontrer des jeunes du Loiret et de l'Alsace. Là, ça ne sera pas le cas. Et puis, il y a quand même aussi une limite qui est très importante : aujourd'hui, tel qu'il est conçu, le SNU n’est ouvert qu’aux jeunes de nationalité française. Ça veut dire que nos élèves, et on en a, qui ne sont pas de nationalité française, ne partiront pas sur des temps de SNU, resteront au lycée. Je vous laisse imaginer ce que ça veut dire en termes de stigmatisation, et en termes de cohésion sociale. Je ne vois pas comment on peut faire pire. (...) On voit bien que c'est une des très nombreuses impasses de ce projet, et qu'on est très loin de l'objectif de cohésion sociale, de mixité et de mélange de la jeunesse qui est pourtant annoncé par l'exécutif.

Le port de l'uniforme, la levée des couleurs au chant de La Marseillaise... Est ce que vous estimez que la jeunesse française aujourd'hui a besoin de cette symbolique?

La jeunesse française, elle n'a pas besoin de symbolique. La jeunesse française, elle a besoin d'école, elle a besoin de perspectives pour l'avenir, elle a besoin d'émancipation. Et tout ça, ça se joue à l'école. On a finalement l'impression que derrière le SNU, il y a cette idée que la jeunesse devrait être encadrée, devrait être prise en main pour la transmission des valeurs de la République. Tout ça se fait à l'école et pour ça, il faut mettre des moyens dans l'école, dans les collèges, dans les lycées. Il faut donner des perspectives d'avenir à la jeunesse plutôt que d'essayer de la formater dans un SNU qui finalement est voué à l'échec qu'il est présenté.

Il est question de volontariat. C'est la base du volontariat de la part des enseignants, de la part des élèves également ?

Oui, là, on nous parle de volontariat pour l'année 2023 2024. Après, on sait qu'Emmanuel Macron n'a pas renoncé à sa volonté de généraliser le SNU à terme. Mais il faut bien voir que pour les enseignants, le volontariat est quand même une forme d'instrumentalisation, puisque pour nous pousser à accepter cette mission, on nous fait miroiter une prime dans le cadre du "pacte" enseignant. Finalement, on nous met un peu une carotte financière pour essayer de lever les réticences, comme si on pouvait nous acheter pour s'engager dans quelque chose qui est contraire à nos valeurs. On voit bien, là encore, d'une part, tout le cynisme de l'exécutif, mais aussi le fait qu'ils sont quelque part un peu coincés pour avancer sur ce projet.

Est-ce que ce projet va aller à son terme et sera présenté effectivement à la rentrée prochaine ?

Pour l'instant, nous n'avons pas plus d'informations, si ce n'est que le ministre de l'Education nationale devrait réunir toutes les organisations syndicales d'ici la fin de l'année scolaire. Vraisemblablement, Emmanuel Macron fera des annonces le 14 juillet (...). Mais en tout cas, le gouvernement semble décidé à avancer encore une fois coûte que coûte, quoi qu'il en coûte, au mépris des élèves et des enseignants.

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