"Tu étais tellement engagée que l'école t'a engloutie" : une marche blanche à Pantin après le suicide d'une directrice d'école
Le cortège, parti de la mairie de Pantin, est arrivé en fin de matinée à l'école maternelle Méhul, où le corps de cette femme de 58 ans a été retrouvé le 23 septembre au matin.
Une directrice "solaire" à "l'énergie débordante". Des centaines de personnes ont marché samedi 5 octobre à Pantin en hommage à Christine Renon, qui s'est suicidée dans son école après avoir dénoncé, dans une lettre, ses conditions de travail.
Des proches de Christine Renon et des directrices et directeurs d'école de Pantin (Seine-Saint-Denis) ont avancé en tête de cortège en se tenant le bras. Beaucoup portaient un brassard noir. Derrière eux, des enseignants et des parents d'élèves se sont rassemblés, certains venus avec leurs enfants.
"C'était une militante"
"Elle rigolait tout le temps, elle faisait tout le temps des blagues. Les enfants l'adoraient", a déclaré Séverine, enseignante en maternelle, qui a travaillé en binôme avec Christine Renon. "C'était une militante, elle était révoltée de la situation des écoles", poursuit Agnès, également enseignante en maternelle dans cette ville de Seine-Saint-Denis. Deux mères, en larmes, évoquent "son éternelle polaire bleue, son humour, l'attention portée à chacun, les fournitures achetées avec son propre argent".
Plusieurs responsables politiques ont aussi participé à la marche, dont l'eurodéputé EELV Yannick Jadot, venu en "hommage à toute une profession aujourd'hui en souffrance". "Mon père était directeur d'école, dit-il. A l'époque il y avait beaucoup plus de moyens, ça ne peut pas continuer comme ça."
Forte mobilisation des enseignants
Le cortège, parti de la mairie de Pantin, est arrivé en fin de matinée à l'école maternelle Méhul, où le corps de cette femme de 58 ans a été retrouvé lundi 23 septembre au petit matin.
Une minute d'applaudissements est lancée spontanément dans la foule pour #ChristineRenon, qui dirigeait cette école depuis 2012 (et enseignait à Pantin depuis 20 ans) Les yeux sont rougis. pic.twitter.com/GoA6zCvqXR
— Yann Thompson (@yannthompson) October 5, 2019
Juste avant de se donner la mort, la directrice avait adressé à une trentaine de ses collègues une lettre où elle détaillait "son épuisement", la solitude des directeurs, l'accumulation de tâches "chronophages", les réformes incessantes et contradictoires. "Tu n'étais ni fragile, ni dépressive", a déclaré Caroline Marchand, du syndicat SNUipp-FSU à la tribune, dans la cour de l'école Méhul, pleine à craquer. "Tu laisseras l'image d'une directrice engagée, tellement engagée que l'école t'a engloutie, submergée."
Des parents d'élèves rendent hommage à #ChristineRenon, dans un discours interrompu par les pleurs. "En ce début d'année si chargé, elle allait raconter son histoire de polichinelle dans les classes de petits pour les faire rigoler." pic.twitter.com/txxGRRWxu8
— Yann Thompson (@yannthompson) October 5, 2019
La mort de Christine Renon a entraîné une forte mobilisation de la communauté éducative. Jeudi, près d'un quart des fonctionnaires et agents de l'académie de Créteil, dont dépend Pantin, étaient en grève. Entre 1 100 et 3 000 personnes se sont rassemblées à Bobigny et des milliers d'autres partout en France pour réclamer des réponses politiques à ce geste désespéré.
Jeudi, le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, s'est dit "prêt" à discuter du statut des chefs d'établissements. Il a proposé la création d'"un comité de suivi" associant syndicats et professionnels pour "faire évoluer" leur statut.
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