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Témoignages Journée des enfants disparus : "Il y a eu de la violence, de la prostitution, moi j'ai eu de la chance", raconte une adolescente qui a fugué "six ou sept fois"

43 202 disparitions de mineurs ont été signalées en France, en 2022, selon le premier rapport du numéro d'urgence officiel "116 000 Enfants Disparus", publié jeudi à l'occasion de la Journée internationale des enfants disparus. 95% des signalements concernent des fugues.
Article rédigé par franceinfo - Farida Nouar
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Fugue (photo d'illustration). (VOSSPHOTOGRAPHY / E+)

Cette bande de jeunes filles se retrouve presque tous les jours, dans le centre de Paris, sur cette dalle derrière un grand centre commercial. Parmi eux, Jessie, tout juste majeure : elle l'assure, elle a déjà fugué "trois ou quatre fois". C'est un peu plus,"six ou sept fois", pour Laura qui se trouve à ses côtés. D'ailleurs, sa dernière fugue remonte à deux mois. "Je suis partie de Paris et je me suis retrouvée à Strasbourg. Ça a duré une semaine. J'avais un contact chez une copine, je dormais chez elle", raconte l'adolescente de 16 ans. 

>> Plus de 43 200 disparitions de mineurs ont été signalées en France en 2022

Elle précise que les fugues peuvent s'organiser sur les réseaux sociaux. "On se fait un groupe et puis voilà". Des disparitions qui durent entre quelques jours et plusieurs mois. Laura choisit l'errance pour fuir son mal-être. "Quand j'allais au foyer, ça n'allait pas. Je m'embrouillais tout le temps avec les éducateurs. Du coup, je fuguais. Et chez moi, ça n'allait pas aussi parce que ma mère avait des petits problèmes ..."

Des conditions de vie en foyer qui "donnent envie de se barrer"

L'adolescente jure qu'elle ne fuguera plus, car à la maison ça va mieux. Elle ne veut surtout plus retourner dans un foyer. "Ce n'est pas bien. Il y a un foyer que je n'ai pas aimé. Déjà, on était obligées de se doucher à plusieurs. Pour manger, c'était grave froid, c'était les trucs de la cantine". Elle dénonce des "éducateurs qui tapaient des enfants".

"En plus de ça, on ne pouvait pas garder longtemps les téléphones, on pouvait les garder une heure. Pour les sorties, pareil, on ne pouvait pas sortir, etc. Ça donne envie de se barrer", poursuit Laura. Jessie promet qu'elle ne fuguera plus. "J'ai grandi", explique la jeune femme de 18 ans. Sur le chemin de l'errance, elle a vécu des situations dangereuses.

"Je suis montée dans une voiture en stop et le mec était vraiment très chelou."

Jessie

franceinfo

Elle a répété à cet homme qu'elle avait 15 ans. "Je lui ai mis un coup de poing et je suis sortie de la voiture." Laura assure elle, qu'elle n'a jamais été en danger. "Je ne suis pas tombée sur des mauvaises fréquentations". Contrairement à son "ancienne meilleure amie", ajoute-t-elle.

La fugue, porte d'entrée de la prostitution 

Elle raconte l'histoire de cette jeune fille : "Elle avait fugué de son foyer pendant trois mois, elle était avec un mec qui lui disait qu'il l'aimait bien, etc. Une amourette quoi. Du coup, ça s'est mal passé pour elle. Il y a eu de la violence, de la prostitution ... Toutes ces choses. Moi, j'ai eu beaucoup de chance... Oui, beaucoup de chance."

Les cas de prostitution liés aux fugues sont de plus en plus nombreux, souligne le rapport du numéro d'urgence officiel "116 000 Enfants Disparus", publié jeudi 25 mai, à l'occasion de la Journée internationale des enfants disparus. En 2022, le lien entre les cas de fugues répétées et l'exploitation sexuelle a été avéré ou suspecté pour un tiers des dossiers concernant des filles mineures. Selon ce rapport, 43 202 disparitions de mineurs ont été signalées l'an dernier en France. Ce chiffre reste très élevé même s'il baisse légèrement (-1,5%).

Le reportage de Farida Nouar

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