: Vidéo Euthanasie : "Je suis allée dans une pharmacie, en Suisse…" Elle a aidé son amie atteinte d'un cancer en phase terminale à mourir
Il y a quelques années, Annie a aidé son amie Marie, atteinte d'un cancer en phase terminale, à mourir chez elle, comme elle le lui demandait. Voici son témoignage, particulièrement émouvant, pour "Envoyé spécial", alors qu'une proposition de loi créant un droit à "une fin de vie libre et choisie" est présentée à l'Assemblée nationale jeudi 8 avril 2021.
C'est un témoignage rare et particulièrement émouvant : par amitié, Annie a aidé Marie, atteinte d'un cancer en phase terminale, à mourir chez elle. Pour la première fois, elle témoigne dans un reportage diffusé dans "Envoyé spécial", alors que ce jeudi 8 avril, une proposition de loi créant un droit à "une fin de vie libre et choisie", autrement dit à l'euthanasie, doit être présentée à l'Assemblée nationale.
Annie a été militante pour les droits des femmes. Aujourd'hui, elle milite pour la légalisation de l'euthanasie. Il y a quelques années, elle a commis, en cachette, un acte illégal. Annie explique d'abord comment elle s'est procuré en Suisse le produit nécessaire, auprès d'une pharmacienne qui acceptait de le fournir "aux personnes qui lui avaient été recommandées". Il se présentait sous forme d'une poudre, contenue "dans des boîtes Kodak, les boîtes dans lesquelles on mettait avant les films".
Annie raconte ensuite une nuit dont le temps n'a effacé aucun souvenir. Comment, avec son compagnon, ils se sont rendus au domicile de Marie – dans une voiture de location qui ne risquerait pas d'être reconnue par les voisins, munis de gants pour qu'on ne retrouve pas leurs empreintes... "On arrive en voiture, Marie est dans son lit, le chat sur son lit… Et elle nous dit : 'Je pensais que vous ne viendriez pas'." Pour créer une atmosphère intime, ses amis allument des bougies, mettent la musique qu'elle aime.
"Je lui ai dit 'Marie, tu sais ce que tu fais ?' Et là, elle éclate de rire : 'Mais depuis le temps que je te le demande !'"
"Et là, mon compagnon a pris le verre qui était sur la petite table à côté. Nous l'avons tenu d'abord lui et moi, ce verre, se souvient Annie, extrêmement émue. Quand elle a eu pris le verre, je lui ai dit : 'Marie, tu sais ce que tu fais ? Tu sais ce qui va se passer quand tu auras bu ce qu'il y a dans ce verre ?' Et là, elle éclate de rire, elle dit : 'Mais depuis le temps que je te le demande !'"
Quelques minutes après avoir bu le contenu du verre, poursuit Annie, "sa tête s'est posée sur l'oreiller, ses yeux se sont fermés… elle ne les a pas rouverts. Chacun lui tenait les mains, on ne l'a pas lâchée jusqu'à ce que son cœur s'arrête de battre", environ un quart d'heure plus tard, selon elle.
Annie et son compagnon ne quitteront le chevet de leur amie que peu avant l'arrivée de l'infirmière qui venait lui prodiguer des soins, à 5 heures du matin. C'est elle qui avertira Annie de la mort de Marie. "A 6 heures du matin, j'ai eu un coup de fil, elle m'a dit : 'Marie est morte, mais c'est très étrange parce que, alors que le matin quand je venais, elle n'avait jamais son dentier, là, elle avait son dentier." Annie se remémore alors ces paroles de son amie : "Je garde mon dentier, parce que je veux qu'on me trouve belle."
Extrait de "Euthanasies clandestines : le tabou", un reportage diffusé dans "Envoyé spécial" le 8 avril 2021.
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