Affaire du "violeur de Tinder" : "Pure imagination", dénonce l'accusé au premier jour de son procès
Dans le box vitré, l'accusé longiligne, aux cheveux épais et petites lunettes, a presque un air d'étudiant. Pourtant, Salim Berrada, surnommé le "violeur de Tinder" a 38 ans, et comparaît pour 17 viols et agressions sexuelles entre fin 2014 et fin 2016. Lundi 18 mars, au premier jour d'un procès qui doit durer deux semaines, la cour s'est penchée sur la personnalité, la trajectoire de vie de l'accusé.
Cet ingénieur reconverti en photographe, contactait des jeunes femmes via des applis de rencontres et des sites de modèles. Beaucoup étaient en effet candidates au mannequinat. L'accusation dépeint un mode d'action "industriel".
Des ambitions d'artiste
Face à la cour, Salim Berrada raconte son arrivée en bateau et en bus du Maroc à Bordeaux, à 20 ans, pour ses études d'ingénieur informatique, réussies brillamment. C'est à ce moment là seulement que Salim Berrada confie avoir fait ses premières rencontres avec des filles, avoir eu ses premières relations sexuelles. "Avant, j'étais dans un tout autre univers, élevé à Casablanca par ma mère, modeste couturière qui subvenait seule aux besoins de ses quatre enfants et demandait l'exemplarité en tout", raconte-t-il.
Embauché dans une société de sécurité informatique à la Défense, il finit par démissionner car il s'ennuie. Il rêve d'un métier plus créatif et s'achète un appareil photo. "Financièrement, c'était risqué, mais j'avais trop envie d'art", se souvient l'accusé, qui a vite progressé, s'est fait une petite notoriété et a organisé à la chaîne les shooting photo dans son appartement parisien, recensant les noms des modèles dans un tableau Excel pour s'y retrouver.
Il plaide le consentement
Au cours de la lecture du rapport sur les faits, Salim Berrada a plusieurs fois secoué la tête en signe de désapprobation. Il conteste les viols et agressions sexuelles en série dont il doit répondre. Il s'exprime avec une grande assurance et des mots choisis. Pour lui, avec toutes, il s'agissait de relations consenties à l'occasion des séances photo. Aux enquêteurs, il a expliqué que ce sont elles, déçues, qui se sont liguées, ont menti et voulu se venger de ne pas avoir été rappelées.
"Je n'ai jamais eu d'addiction au sexe, seulement une addiction au fait de susciter le désir."
Salim Berradaau premier jour de son procès
Toutes racontent avoir eu le sentiment d'être étourdies au moment des viols ou agressions sexuelles, ce qui entraîne des soupçons de soumission chimique. "Pure imagination", selon l'accusé. "Vous diriez alors que vous êtes un grand sentimental ?", interroge le président. "Je ne me suis pas défini comme tel, mais je l'ai été, oui, lâche l'accusé. Je n'ai jamais eu d'addiction au sexe, seulement une addiction au fait de susciter le désir."
"N'est-ce pas contradictoire avec la description qui est faite de vous dans le dossier ? D'un addict au sexe qui a eu 600 partenaires en deux ans à l'époque des faits ?", poursuit le magistrat. "Non, en réalité, je suis peut-être égoïste, mais aussi capable d'aimer, rêveur", répond l'intéressé.
"Difficile de me projeter"
Des exclamations et des rires nerveux se font entendre sur les bancs des parties civiles, où une quinzaine de victimes l'écoutent, agacées. "J'ai l'impression que ça ne suscite pas l'adhésion", commente sobrement le président, qui lui demande enfin comment il envisage son avenir. "C'est difficile de me projeter", termine celui qui, la voix brisée, explique avoir eu des envies de suicide. "J'ai été menacé de mort. Mon nom a été sali, foutu. Mais si je pouvais choisir, je reprendrais la photo, et le cinéma aussi. J'écrirais des livres, je créerais, mais je ne ferais plus de photos de mode. Ce monde-là, maintenant, me dégoûte."
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