#MeToo dans le cinéma : le réalisateur Benoît Jacquot mis en examen pour viols sur les actrices Julia Roy et Isild Le Besco et placé sous contrôle judiciaire

Le cinéaste avait été placé en garde à vue lundi tout comme le réalisateur Jacques Doillon, visé par quatre plaintes, dont celle de Judith Godrèche. Ce dernier a été relâché sans poursuites à ce stade pour raisons médicales.
Article rédigé par Catherine Fournier
France Télévisions
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Benoît Jacquot lors du Festival international du film de Berlin, en Allemagne, le 17 février 2018. (MAURIZIO GAMBARINI / ANADOLU AGENCY / AFP)

Le réalisateur Benoît Jacquot, 77 ans, a été mis en examen pour viols sur les actrices Julia Roy et Isild Le Besco, à l'issue de sa garde à vue, a annoncé le parquet de Paris, mercredi 3 juillet. Dans le détail, il est mis en examen pour "viol par conjoint", "agression sexuelle par conjoint" et "violences volontaires sans interruption temporaire de travail" sur Julia Roy. Il est également mis en examen pour "viol sur mineure" sur Isild Le Besco. La juge d'instruction l'a toutefois placé sous le statut plus favorable de témoin assisté pour viols conjugaux sur Isild le Besco en 2007 et sur Julia Roy entre 2014 et 2018.

Benoît Jacquot a été placé sous contrôle judiciaire, avec plusieurs obligations : celle de "ne pas entrer en contact avec les témoins et victimes", une obligation de "soins psychologiques", l'interdiction de ne "pas exercer la profession de réalisateur y compris les apparitions publiques en lien avec les activités ayant permis la commission des infractions pour lesquelles il est mis en examen", "ne pas exercer d'activité en lien avec les mineurs".

Deux plaintes déposées après celle de Judith Godrèche

Plus tôt dans la journée, le parquet de Paris avait annoncé avoir ouvert une information judiciaire. Sont visés par cette information judiciaire des faits de "viol, agression sexuelle et violences, susceptibles d'avoir été commis entre 2013 et 2018 au préjudice" de la comédienne Julia Roy, 34 ans aujourd'hui, et de "viol sur mineur par personne ayant autorité, viol par concubin, susceptibles d'avoir été commis entre 1998 et 2000, et en 2007" au préjudice d'Isild Le Besco, 41 ans. 

Cette enquête avait été ouverte après une plainte de Judith Godrèche, 52 ans, qui affirme avoir vécu une relation d'"emprise" et de "perversion" avec Benoît Jacquot de 1986 à 1992. Ces faits dénoncés ne figurent pas dans l'information judiciaire en raison, notamment, de la prescription, a appris franceinfo auprès d'une source proche du dossier. Une enquête avait néanmoins été ouverte pour identifier d'autres victimes potentielles non prescrites. Julia Roy et Isild Le Besco ont décrit, dans la presse et dans un livre pour la seconde, le comportement d'un réalisateur qui a profité de son aura et de sa position pour exercer une emprise sur elles. Elles ont porté plainte après Judith Godrèche dans ce dossier.

"Nous prenons acte du déferrement de Benoît Jacquot devant un juge d'instruction pour des faits de même nature que ceux commis à l'encontre de Judith Godrèche dont les faits sont, pour ce qui la concerne, prescrits", a réagi auprès de l'AFP le conseil de Judith Godrèche, Laure Heinich. Sa cliente "peut néanmoins se sentir entendue à travers la décision prise par le parquet", a souligné l'avocate. Sur son compte Instagram, Judith Godrèche confirme ces propos.

Capture d'écran d'un message posté par Judith Godrèche sur son compte Instagram le 3 juillet 2024. (INSTAGRAM / FRANCEINFO)

Trois nouvelles plaintes visant Jacques Doillon

Le cinéaste Jacques Doillon, 80 ans, avait également été placé en garde à vue lundi, dans le cadre de la même enquête ouverte en février par le parquet de Paris notamment pour "viol sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité", après la plainte de Judith Godrèche contre les deux réalisateurs. L'actrice et réalisatrice accuse le réalisateur, ex-époux de Jane Birkin et père de la comédienne Lou Doillon, d'avoir "abusé" d'elle lorsqu'elle avait 15 ans, dans son "bureau" et sur le plateau du tournage du film La Fille de quinze ans. 

Sa garde à vue a été levée mardi soir "pour des raisons médicales", fait savoir le parquet, précisant qu'il "s'est fait transmettre la procédure dès ce jour pour apprécier le périmètre et les modalités des suites à y donner". Dans cette procédure figurent trois nouvelles plaintes contre Jacques Doillon, a appris franceinfo de source proche du dossier, confirmant des informations du Le Monde et de Libération.  

Devant les policiers, Jacques Doillon a notamment été confronté à Joe Rohanne, personne trans non binaire, qui a déposé plainte pour trois viols, coups et blessures et violences psychologiques, a confirmé à l'AFP son avocate, Laure Heinich. Porter plainte ? "J'y pensais depuis longtemps. Je ne passais pas le cap. Notre fille a 13 ans. C'est délicat de porter plainte contre le père de son enfant. j'ai longtemps eu peur que ce soir une épreuve trop difficile à vivre pour elle", a déclaré Joe Rohanne à Libération .

Le Monde a révélé sa plainte mercredi soir, ainsi que celles de deux autres femmes accusant Jacques Doillon de viol pour l'une, de tentative de viol pour l'autre. L'avocate du cinéaste, Marie Dosé, n'a pas souhaité réagir. Au moment du placement en garde à vue de son client, elle avait estimé auprès de l'AFP qu'il "aurait dû être entendu dans le cadre d'une audition libre au vu de l'ancienneté des faits, de leur prescription acquise depuis plus de deux décennies, et de l'inéluctable classement sans suite qui clôturera cette enquête"

L'avocate de Benoît Jacquot, Julia Minkowski, a pour sa part dénoncé auprès de l'AFP "une véritable mesure de cancellisation judiciaire, sur le fondement d'une enquête embryonnaire et avant tout jugement. Nous allons évidemment faire appel".

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