Etats-Unis : la Cour suprême révoque le droit constitutionnel à l'avortement, laissant chaque Etat libre de l'interdire
Cette volte-face historique ne rend pas illégales les interruptions de grossesse mais laisse la liberté à chaque Etat américain de les autoriser ou non.
C'est une volte-face historique. La très conservatrice Cour suprême des Etats-Unis a enterré, vendredi 24 juin, un arrêt qui, depuis près d'un demi-siècle, garantissait le droit des Américaines à avorter. Cette décision ne rend pas les interruptions de grossesse illégales, mais renvoie les Etats-Unis à la situation en vigueur avant l'arrêt emblématique "Roe v. Wade" de 1973, quand chaque Etat était libre de les autoriser ou non. "La Constitution n'interdit pas aux citoyens de chaque Etat de réglementer ou d'interdire l'avortement", précise la Cour suprême, mais rend "ce pouvoir au peuple et à ses représentants élus".
Le droit à l'avortement est "jeté aux oubliettes de l'Histoire", a salué l'ancien vice-président Mike Pence, en poste sous le mandat de l'ex-président américain Donald Trump. "Il incombe à tous ceux qui chérissent le caractère sacré de la vie de décider que nous prendrons la défense de l'enfant à naître", iniste-t-elle.
Now that Roe v. Wade has been consigned to the ash heap of history, a new arena in the cause of life has emerged and it is incumbent on all who cherish the sanctity of life to resolve that we will take the defense of the unborn...
— Mike Pence (@Mike_Pence) June 24, 2022
A contrario, la principale organisation de planning familial promet de continuer à "se battre". Et l'ancien président démocrate Barack Obama accuse la Cour suprême d'avoir "attaqué les libertés fondamentales de millions d'Américaines".
Today, the Supreme Court not only reversed nearly 50 years of precedent, it relegated the most intensely personal decision someone can make to the whims of politicians and ideologues—attacking the essential freedoms of millions of Americans.
— Barack Obama (@BarackObama) June 24, 2022
Des cliniques déjà fermées
Compte tenu des fractures dans le pays, une moitié des Etats, surtout dans le Sud et le centre, plus conservateurs et religieux, pourraient les bannir à plus ou moins court terme. Ainsi, avant même que cette décision ne soit rendue, les Etats conservateurs ont joué du flou autour des termes "fardeau injustifié" pour multiplier les restrictions, forçant de nombreuses cliniques à mettre la clé sous la porte. En Virginie occidentale ou dans le Mississippi, il ne reste qu'un seul centre pratiquant des interruptions de grossesse, alors que la Californie en a plus de 150.
Plus de 930 000 avortements ont été recensés en 2020 aux Etats-Unis, selon les dernières statistiques de l'Institut Guttmacher qui a constaté un rebond récent des IVG après trente ans de baisse continue. Ce chiffre correspond à un taux de 14,4 avortements pour 1 000 femmes en âge de procréer. Il est du même ordre de grandeur que dans le reste des pays riches. Près de 50% des femmes ayant recours à une interruption de grossesse vivent sous le seuil de pauvreté et les femmes noires et hispaniques sont surreprésentées (29% et 25% respectivement). La décision de la Cour suprême va donc les pénaliser davantage, soulignent les défenseurs du droit à l'avortement.
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