Le recadrage d'Eric Dupond-Moretti est "de nature à porter atteinte" à la séparation des pouvoirs, selon le Conseil supérieur de la magistrature

Des magistrats marseillais avaient raconté s'être pris en privé "une soufflante" de la part du ministre de la Justice, furieux contre des propos tenus durant leurs auditions devant la commission sénatoriale.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, à Annecy (Haute-Savoie), le 28 mars 2024. (GREGORY YETCHMENIZA / LE DAUPHINE LIBERE / MAXPPP)

Le recadrage de magistrats par le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, est "de nature à porter atteinte" à la séparation des pouvoirs, a déploré, mercredi 10 avril, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). L'organe constitutionnellement chargé de protéger l'indépendance de la justice a reçu mardi les chefs du tribunal de Marseille. Ces derniers ont été réprimandés mi-mars par le ministre après leurs propos devant la commission d'enquête sénatoriale sur la lutte contre le trafic de drogues.

En marge du déplacement à Marseille avec Emmanuel Macron, le 19 mars, pour lancer les opérations antidrogues dites "place nette XXL", des magistrats marseillais avaient raconté au Figaro s'être pris en privé "une soufflante" de la part du ministre. Le garde des Sceaux avait fait part de sa colère après des propos tenus durant leurs auditions devant la commission sénatoriale.

"Une obligation de sincérité"

Les magistrats y auraient, selon le ministre, tenu des propos empreints de "défaitisme" et faisant "le jeu du RN", en disant notamment devant la commission craindre d'être "en train de perdre la guerre contre les trafiquants à Marseille".

"A la suite de critiques émises", est-il écrit dans le communiqué du CSM dans lequel Eric Dupond-Moretti n'est pas nommé, "le Conseil supérieur de la magistrature rappelle que les magistrats, comme toutes les personnes entendues sous serment par une commission d'enquête parlementaire, sont tenus de 'dire toute la vérité et rien que la vérité' et en conséquence à une obligation de sincérité".

"Leur reprocher des propos tenus dans ce cadre est de nature à porter atteinte tant à leur liberté d'expression qu'à la séparation des pouvoirs", poursuit le CSM dans ce rare rappel à l'ordre.

"Si l'autorité judiciaire est bien évidemment indépendante, le garde des Sceaux est, lui, garant du bon fonctionnement du service public de la justice, qu'il a par ailleurs considérablement renforcé ces dernières années", a réagi auprès de l'AFP l'entourage d'Eric Dupond-Moretti.

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