"Grâce à eux je suis encore là" : l’association SOS policiers en détresse se mobilise pour lutter contre la vague de suicides qui touche la profession
Près de 5 000 policiers ont rejoint la page Facebook de l’association SOS policiers en détresse.
"Les collègues aiment vider le trop plein de leur journée ou de leur intervention qui ne s’est pas bien passée", indique Yohan. Ce brigadier a créé la page Facebook SOS Policier en détresse, une association qui lutte contre le fléau des suicides dans la police. Depuis le début de l'année, déjà trois fonctionnaires se sont donné la mort. En 2019, 59 policiers se sont suicidés, soit une hausse de 60% par rapport à l'année d'avant.
Devant leurs claviers ou au téléphone, ils sont seulement une douzaine de policiers à répondre aux centaines d'appels à l'aide qu'ils reçoivent chaque mois. "Parfois, ils nous contactent en privé, explique Yohan. Je prends toujours le même exemple : c’est une collègue qui ne va pas bien, qui pleure et qui est vraiment au bout du rouleau. Je l’écoute, on discute jusqu’à 2 heures du matin". Le lendemain, la collègue recontacte le brigadier qui décrit la conversation.
"Elle me dit : 'Écoute merci, tu m’as sauvé la vie'. Je lui réponds que je n’ai pas fait grand-chose, je l’ai juste écouté. Cette femme me rétorque alors qu'elle avait une lame de rasoir dans la main et me dit : 'Je n’avais qu’une seule envie : c’est de voir couler mon sang'. Aujourd’hui, elle va bien et ça fait plaisir", poursuit Yohan.
Écoute et empathie
Déjà près de 5 000 policiers ont rejoint la page Facebook de cette association. Une page pour s'entraider, mais aussi pour sauver des vies. "Les téléphones, il faut les recharger trois à quatre fois par jour parce que ça n’arrête pas, explique Christophe, le vice-président de l’association, et il faut répondre parce que c’est la vie de quelqu’un qui est peut-être en jeu".
"Il y a au moins 10 à 20 personnes qui nous ont contactés qui était au bord du suicide, continue Christophe, et que l’on a réussi à ramener à la vie en les écoutant et en étant empathiques envers eux." C'est le cas de Nathalie. Cette policière est en conflit avec ses supérieurs, elle sombre lentement dans la dépression et décide de partager ses idées noires sur Facebook : "J’ai posté un message privé : ‘Et si je me pendais dans mon commissariat, peut être que mon action m’apporterait la sérénité que j’ai perdue et qui me paraît introuvable.'" L'appel à l'aide n'est pas resté sans réponse. "À la suite de ce post, explique Nathalie, j’ai tout de suite été contactée par deux membres de l’association qui ont discuté avec moi. Donc, grâce à eux je suis encore là."
SOS Policiers en détresse m’a sauvé la vie.
Nathalie, policièreà franceinfo
Deux psychologues et une assistante sociale viennent de rejoindre cette association en plein développement. Les policiers qui répondent aux appels à l'aide de leurs collègues sur leur temps libre cherchent à mieux se former et à se professionnaliser. Ils espèrent devenir des acteurs reconnus de la lutte contre les suicides dans la police.
Début octobre, le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, avait annoncé la mise en place d'un nouveau numéro vert (0805 230 405) pour lutter contre ce phénomène.
Si vous avez besoin d'aide, si vous êtes inquiet ou si vous êtes confronté au suicide d'un membre de votre entourage, il existe des services d'écoute anonymes. La ligne Suicide écoute est joignable 24h/24 et 7j/7 au 01 45 39 40 00. D'autres informations sont également disponibles sur le site du ministère des Solidarités et de la Santé.
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