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Mariage pour tous : récit de la nuit blanche à l'Assemblée nationale

Les débats se sont étalés jusqu'à 6 heures, lundi matin. Des heures nocturnes exceptionnelles, entre débats enflammés et entorses aux usages habituels...

Article rédigé par Ariane Nicolas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
La ministre de la Justice, Christiane Taubira, en session de nuit à l'Assemblée nationale, le 4 février 2013. (MAXPPP)

7h54. "La séance est levée." Moments exceptionnels à l'Assemblée nationale : les députés ont débattu du mariage pour tous depuis dimanche 3 février, 10 heures, jusqu'au matin, lundi. Un marathon législatif qui a entraîné quelques arrangements et entorses au déroulé habituel des séances. Récit de la nuit, en partie racontée par les intéressés en temps réel, sur Twitter, et suivie par des milliers d'internautes. 

Jusqu'au bout de la nuit

Dès dimanche soir, après déjà plusieurs heures dans l'Hémicycle, tout le monde sait à l'Assemblée que les débats vont durer encore plusieurs heures. Faut-il pousser les débats aussi tard, sans interruption autres que les pauses repas ? A droite, on reproche au gouvernement de profiter de la nuit pour débattre en catimini. A gauche, on rétorque que sans les 5 000 propositions d'amendements et les multiples rappels au règlement, les discussions ne se prolongeraient pas tant. Philippe Gosselin, député UMP de la Manche, se dit quant à lui trop fatigué pour continuer, note Hélène Bekmezian, journaliste au Monde.

Il reste une vingtaine d'articles et plus de 3 000 amendements à examiner, et le texte doit être voté le 12 février. Pas question de faire l'impasse, pourtant. L'élu UDI des Hauts-de-Seine, Jean-Christophe Fromantin, photographie la longue liste des "orateurs à venir".

Chacun s'occupe comme il peut

Chaque interruption de séance est l'occasion de se dégourdir les jambes ou d'avaler un petit café à la buvette de l'Assemblée. Dans l'Hémicycle, tout le monde ne se montre pas attentif au plus haut degré. "Beaucoup de tablettes numériques illuminaient les pupitres, écrit Le Monde. Bien obligés de rester en séance pour assurer la supériorité numérique de la gauche, on a ainsi pu apercevoir Laurent Baumel en pleine partie d’échecs, Guillaume Bachelay s’essayer au Scrabble (...). De longs chapitres de – gros – livres ont également été avalés."

Des conditions de travail inhabituelles, mais pas gênantes, selon le rapporteur du projet, Erwann Binet (PS) : "Il y a eu des moments de mou dans la nuit, où les uns et les autres ont eu du mal à trouver les mots, ce qui a nous a valu quelques crises, pas de fou rire, mais de sourires, de détente."

La minute "chauffage"

Présente depuis le début, Christiane Taubira, ministre de la Justice, semble transie de froid. Des huissiers ont beau lui amener des bols de tisane, rien n'y fait. Claude Bartolone, le président de l'Assemblée demande, depuis le perchoir, que l'on allume le chauffage.

Au cœur de la nuit, l'Assemblée vibre toujours des interventions de députés. Les tribunes, elles, commencent à accuser le coup, comme l'atteste cette photo prise par le président de la commission des lois.

Les croissants de 6 heures

A l'extérieur du Palais Bourbon, le soleil peine à se lever. Peu avant 6 heures, les députés se mettent d'accord sur une chose : profiter des croissants et pains au chocolat qui viennent tout juste d'être livrés à la buvette. Non sans ironie, côté socialiste : "On a expliqué à Christian Jacob (UMP) que personne ne faisait le ramadan, et que personne ne volerait celui de Jean-François Copé, qui a d'ailleurs été très absent pendant tout le débat", s'amuse Razzy Hammadi, en fin de matinée.

La députée EE-LV Barbara Pompili prend une "photo souvenir" d'un écran indiquant une suspension de séance à 6h07. Une fois les débats repris quelques minutes plus tard, les traces du pain au chocolat sont encore présents, remarque cette internaute.

Combien de députés sont présents ? A la fin de la séance, moins d'une centaine, selon le socialiste Jérôme Guedj.

Un lundi sans fin

Il est 8 heures, la séance est levée. Pas moins de 3 204 amendements restent encore à discuter.

Ce député socialiste n'hésite pas à photographier son lit, qui l'accueillera 4 heures, avant la reprise des débats, lundi après-midi. "Je vais me coucher, bonjour", écrit une autre élue, légèrement déphasée. Selon Rue 89, "un député a ainsi pu croiser l’une de ses collègues en robe de chambre, une brosse à dents à la main, au petit matin". Quant à Bruno Le Roux, le patron des députés socialistes, il enchaîne avec une interview à la radio, provoquant l'admiration de certains, sur Twitter.


La reprise des travaux est prévue à 16 heures. "Là, ça va, on a tous bu des cafés, mais vers 18-19 heures, ça va être difficile", anticipe la socialiste Annick Lepetit. Nul ne sait combien de temps cette séance-là va durer.

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