Nucléaire : la Suède elle aussi à la recherche d'un site d'enfouissement de déchets radioactifs
Les Suédois prévoient de construite un site de stockage profond des déchets radioactifs. Contrairement à la France, qui connaît de fortes tensions sur les lieux où elle souhaite enfouir ses déchets à Bure, dans la Meuse, le processus est plus apaisé en Suède
La tension monte à Bure dans la Meuse, où l'agence de gestion des déchets radioactifs, l’Andra, prévoit de construire un site de stockage profond. Après une manifestation le 18 février, le tribunal de Bar-le-Duc doit se prononcer sur l'expulsion ou non des opposants au projet.
Au nord de l'Europe, la Suède aussi prévoit de construire un site semblable dès 2020. Mais pour l'instant pas de zadistes sur place. Il faut dire que les Suédois s'y sont pris très différemment.
Une ancienne coiffeuse comme ambassadrice
C'est au bord de la Baltique, à 150 km au Nord de Stockholm, dans une forêt marécageuse, que la société SKB, l'équivalent de l'agence française de gestion des déchets nucléaires, a prévu d'enfouir à 450 m sous terre dans le granit, les produits radioactifs les plus dangereux du pays. Pour convaincre les habitants, SKB a embauché il y a 18 ans, Inger, une ancienne coiffeuse de la région.
"Nous avons réalisé de petites rencontres informelles, dans la cuisine des habitants, parfois au sein d'une entreprise, décrit-elle. Pas de costume, ni de cravate, pas de grandes réunions de présentation. Nous avons compris qu'il était plus important d'écouter les habitants, d'écouter leurs questions sur le projet."
Pourront-ils toujours chasser les rennes pendant les travaux ? Que va-t-il se passer pour les propriétaires forestiers ? Les habitants ont plus de questions de ce type que sur les dangers de la radioactivité.
Financer "nos propres expertises"
Il faut dire que derrière les arbres des forêts de Forsmark, se dressent les trois réacteurs de sa centrale nucléaire. Cette centrale est vieille de plus de 35 ans. Pour Liana, qui travaille dans le restaurant du village, il n'y a pas d'inquiétude a avoir sur ce nouveau projet. Elle explique même que "c'est bien pour nous, il y aura plus de travail, plus d'habitants avec des familles et donc de meilleures écoles."
Ils nous ont bien expliqué ce qu'il voulait faire c'est pour ça que je suis confiante.
Liana, une habitanteà franceinfo
Le village de Forsmark appartient aujourd'hui entièrement à la société qui gère la centrale. Plus facile pour éviter la contestation, mais pas question non plus de dire que l'argent du nucléaire achète les consciences.
Les Suédois ont aussi décidé que le village de Forsmark n'aurait pas toutes les subventions publiques qui accompagnent le projet. C'est une autre commune, en compétition aussi pour avoir ce site, qui en a obtenu la majeure partie.
Ralf Person, travaille pour cette commune, il voit là une différence majeure avec Bure en France : "Pour nous, c'était très important de financer nos propres expertises techniques pour comprendre le projet, explique-t-il. L'idée est vraiment d'être à égalité avec l'industrie et le gouvernement. En France, cela apparaît plus comme un projet technocratique venu d'en haut, sur une petite commune."
79% des habitants favorables au projet
Les communes savent aussi qu'à la fin, elles ont le dernier mot par référendum. C'est pourquoi chaque année, SKB fait des sondages. Pour l'instant, 79% des habitants sont favorables au projet. L'acceptabilité sociale est essentielle mais il n'y a pas que cela qui compte assure Claes Thegerstrom de SKB.
La roche a parlé. Les arguments de sûreté sont les plus forts.
Claes Thegerstrom, de la société SKBà franceinfo
Question géologie, la Suède n'a pas le choix, elle doit faire son site dans du granit fracturé à l'aide d'énormément d'eau, alors que la France y a renoncé pour de l'argile plus sec. La France a dix fois plus de déchets que la Suède et les colis de déchets suédois sont aussi différents, puisqu'ils sont en cuivre très épais. Pour autant, Johan Swan de l'ONG sur la revue des déchets nucléaires, pense qu'il y a encore une limite technique : "Le colis en cuivre, qui est tellement important pour la sûreté à long terme, pourrait se corroder beaucoup plus vite que l'on ne le pense d'ici une centaines d'années. "
L'Autorité de sûreté nucléaire doit trancher cette année sur cette question technique. Le projet pourrait donc se faire en 2020, avant celui de Bure en France mais pour Patrick Landais de l'Andra, il est difficile de transposer le cas suédois et français. "On a l'impression que la culture est plus dans le débat, dans l'ouverture et dans l'interaction", avoue-t-il.
Pas de zadiste sur les terres de Forsmark, une transparence et une probité dans la gestion des subventions impressionantes, mais des questions techniques encore en suspens, alors que c'est cette année que le gouvernement doit donner son feu vert sur ce site de stockage de déchets nucléaires dangereux.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.