"Je pensais pas que c'était grave" : douze hommes soupçonnés d'avoir prostitué des jeunes filles mineures jugés à Paris
Le procès de douze hommes soupçonnés de proxénétisme s’est ouvert lundi 25 juin au tribunal correctionnel de Paris. Au premier jour d’audience, les prévenus ont fait preuve de désinvolture face aux seize victimes, la plupart mineures au moment des faits.
"J’ai juste voulu aider des filles qui voulaient de l’argent." L’un des douze proxénètes présumés, jugés depuis lundi 26 juin à Paris et jusqu’à mardi prochain, est impressionnant de désinvolture. "Elles étaient heureuses", lâche un autre à propos des seize victimes, des jeunes filles mineures recrutées sur les réseaux sociaux pour vendre leur corps en Île-de-France et en Belgique en 2015 et 2016.
"Bien sûr, vous avez fait tout cela pour leur bien", ironise la présidente face aux prévenus âgés d'une vingtaine d'années. "La première, j'étais amoureux d'elle", explique l'un des proxénètes présumés. L'homme de 23 ans comparaît détenu et reste sans réponse lorsque la magistrate lui demande si cela lui paraît normal de prostituer une fille qu'il dit aimer.
Des menaces, des insultes et du racket
Durant l'audience, la présidente révèle les conversations téléphoniques entre les victimes et leurs agresseurs présumés, placés sur écoute pendant l'enquête. Les jeunes filles étaient insultées, menacées ou encore retenues dans des appartements ou des chambres d'hôtel. Elles enchaînaient jusqu'à dix passes par jour à Paris, en banlieue ou en Belgique.
À la lecture des extraits les plus vulgaires et violents, certains des prévenus se retiennent à peine de rire sur leur siège. Même mine amusée lorsque la magistrate souligne que les prévenus ont reconnu avoir "testé" leur victime, sous-entendu sexuellement.
Les victimes en partie absentes de ce procès
En garde à vue, l'un des proxénètes présumés a qualifié ses victimes de "bonnes bosseuses". Le chiffre d'affaires pour une semaine dans un appartement avec quatre jeunes femmes s'élevait à quelque 7 000 euros. Parmi les seize victimes, deux seulement se sont constituées parties civiles. Malgré leur absence, la présidente tente de les faire exister. Elle évoque des "gamines" et insiste sur l’âge d'une des jeunes filles, encore collégienne à l'époque.
Plusieurs associations se sont portées parties civiles et s’inquiètent du nombre croissant d‘affaires de ce type, avec toujours les même victimes. Il s’agit de "très jeunes femmes, souvent en rupture avec leur famille ou déscolarisés", déplore Vanina Méplain, l’avocate d’Équipes d’action contre le proxénétisme. "Il y a toujours une première phase de toute puissance, elles se disent 'Je ne suis pas une prostituée, je suis au-dessus de ça'. C’est une phase de déni", ajoute l’avocate.
Quand elles ouvrent les yeux et qu’elles veulent en sortir, c’est déjà trop tard.
Vanina Méplain, avocate d'Équipes d'action contre le proxénétismeà franceinfo
"Ce sont des victimes qui, quand elles portent plainte et qu’on peut les auditionner, on est content", poursuit Vanina Méplain. "Mais à l’audience, elles sont quasi-systématiquement absentes par peur des menaces et des représailles. Il y a des parents qui sont présent au tribunal et qui affirment que leur fille est encore menacée." Malgré la peur, une des seize victimes pourraient venir témoigner dans les prochains jours. Le procès doit durer jusqu’au mardi 3 juillet.
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