Indemnisation des victimes, instance de réparation, groupes de travail... Voici les mesures annoncées par les évêques contre la pédocriminalité
Après avoir reconnu la responsabilité collective de l'Eglise catholique de France dans les actes pédocriminels commis dans son giron, les 120 évêques réunis à Lourdes ont évoqué la question de l'indemnisation des victimes.
L'Eglise catholique avait déjà reconnu sa responsabilité collective auprès des victimes de pédocriminalité en son sein. Les 120 prélats réunis à Lourdes (Hautes-Pyrénées) se sont également accordés sur les modalités d'indemnisation "individualisée" des victimes, a annoncé Eric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, lundi 8 novembre 2021.
La commission dirigée par Jean-Marc Sauvé avait secoué toute l'institution en publiant le mois dernier son rapport révélant l'ampleur de la pédocriminalité dans l'Eglise catholique depuis soixante-dix ans. Elle estime à 330 000 le nombre de personnes de plus de 18 ans ayant fait l'objet de violences sexuelles depuis 1950 en France, quand elles étaient mineures, de la part de clercs, religieux ou personnes en lien avec l'Église. Voici ce qu'il faut retenir des mesures adoptées par les évêques.
Une instance indépendante de réparation
Comme annoncé en mars, les évêques réunis à Lourdes ont décidé de constituer une instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation, dont le rôle sera d'instruire les demandes des victimes de violences sexuelles. Le nom de la présidente de cette instance a été dévoilé : il s'agit de la juriste Marie Derain de Vaucresson, ancienne défenseure des enfants, qui constituera "son équipe à sa guise sur le modèle de la commission Sauvé".
La vente de biens et un emprunt
"Nous avons commencé à abonder le fonds [d'indemnisation], nous évêques, par nos propres cotisations, mais il est évident qu'il nous faut réunir des sommes bien supérieures à celles que nous avions imaginées." Les évêques de France se sont donc engagés à "abonder" ce fonds "en se dessaisissant de biens immobiliers et mobiliers de la Conférence des évêques de France et des diocèses", a déclaré le président de la CEF. "Nous ne prendrons pas d'argent du denier de l'Eglise" ou les "dons des fidèles", a précisé Eric de Moulins-Beaufort, et "tous les évêques ont accepté d'essayer d'identifier dans leurs diocèses les biens dont ils pouvaient se défaire".
Par ailleurs, a-t-il ajouté, "nous avons décidé de souscrire un emprunt, s'il le fallait, pour pouvoir honorer nos obligations."
Des visiteurs envoyés par le pape
Les évêques catholiques ont demandé au pape de les aider "en envoyant quelqu'un" de confiance "examiner" la manière dont ils traitent les personnes victimes de pédocriminalité et leurs agresseurs. Quelles suites ? "Il pourra s'agir par exemple d'une demande de réorganisation", d'évolutions demandées au sujet de "la formation des prêtres et cela pourrait aller jusqu'à une éventuelle démission de l'évêque si cela s'avérait nécessaire", a ensuite expliqué la CEF à l'AFP.
La formation de groupes de travail
Des groupes de travail composés de laïcs, de diacres, de prêtres, de personnes consacrées ou d'évêques sont constitués. Des personnes victimes y seront associées et un coordinateur y sera chargé d'assurer le suivi. Un coordinateur y sera chargé d'assurer le suivi des recommandations de la commission Sauvé. Parmi leurs thèmes de préoccupation : "partage de bonnes pratiques devant des cas signalés", "confession et accompagnement spirituel", "accompagnement des prêtres mis en cause", "formation des futurs prêtres", "analyse des causes des violences sexuelles au sein de l'Eglise", "moyens de vigilance et de contrôle des associations de fidèles menant la vie commune et de tout groupe s'appuyant sur un charisme particulier"...
De nombreuses mesures particulières
Les évêques ont également adopté une batterie de mesures, recensées sur le site de la CEF, comme la vérification systématique des antécédents judiciaires pour les clercs et les laïcs quand ils sont appelés à travailler auprès des mineurs. Ils se sont également engagés à demander, chacun pour son diocèse, la "signature d'un protocole avec le ou les parquets concernés". Les évêques de France décident d’ériger "un tribunal pénal canonique national" et approuvent les statuts de ce tribunal pour la première instance, qui entrera en fonction au 1er avril 2022. Un audit externe des cellules d'écoute des personnes victimes doit aboutir "à une charte commune et un mode d'évaluation régulier à confier au Conseil de prévention et de lutte contre la pédophilie".
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