La Confédération paysanne dénonce "un plan social" dans le secteur agricole
Le Salon international de l'agriculture a ouvert ses portes samedi à Paris. Un secteur aujourd'hui confronté à un véritable "plan social" selon Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne.
Le 54e Salon international de l'agriculture a ouvert ses portes samedi 25 février à Paris dans un climat de découragement des agriculteurs, éprouvés par deux années de crise profonde. Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne, a dénoncé dimanche sur franceinfo le "plan social", selon lui, dont est victime le secteur, en raison d'une politique publique désuète qui encourage à produire toujours plus au lieu de privilégier la "qualité".
franceinfo : Vous dénoncez un désarroi des campagnes qui mène à des plans sociaux. Pourquoi ?
Laurent Pinatel : On vit un plan social dans l’agriculture. On s’aperçoit que depuis des années, le nombre de paysans ne cesse de disparaître et toutes les politiques qui sont proposées aux paysans consistent à les encourager à s’agrandir et à produire encore plus. C’est un système qu’on nous propose depuis 40 ans et qui ne marche pas. Les paysans en crèvent.
Ces dernières années, 90 000 exploitations ont fermé
Laurent Pinatelà franceinfo
Derrière cela, il y a des drames humains, c’est quelqu’un qui voit le métier, sa passion s’effondrer, qui voit sa famille se déliter, car on est en difficulté financière sur sa ferme. Cela a des répercussions sur la cellule familiale. Puis un jour ou l’autre, les vaches partent dans le camion, le tracteur est vendu aux enchères et on n’a plus rien. Certains drames humains peuvent aller très loin. Il faut que les politiques prennent la mesure du désarroi des campagnes. Lors de l’inauguration du Salon de l'agriculture samedi, les éleveurs étaient silencieux.
Comment interprétez-vous ce silence ?
C’est de la résignation. C’est de l’abattement, la perte de repères. Les gens n’y croient plus. Ils pensent qu’ils vont disparaître, qu’ils vont être en difficulté financière. Ils n’en peuvent plus. Ils vont au boulot en traînant les pieds, ce n’est pas normal. On demande l’instauration d’une loi-cadre d’une politique publique forte pour donner un droit au revenu aux paysans, pour qu’on inscrive dans la loi le fait que les paysans doivent avoir leur revenu. Il y en a marre que l’agroalimentaire et la grande distribution se gavent sur notre dos et que nous, paysans, n’ayons pas de revenu.
Qu’en est-il de la responsabilité du consommateur ?
On estime que l’agriculture doit produire pour nourrir et non produire pour produire. Je propose de partir des besoins des consommateurs. Aujourd’hui, le consommateur exige une alimentation de qualité, qui respecte l’environnement, qui est peut-être composée d’un peu moins de viande et de plus de protéines végétales. À nous d’organiser cette agriculture pour satisfaire ces besoins. Forcément, cela donnera lieu à une agriculture qui produira une alimentation plus chère et il nous semble que c’est le subventionnement public, les 10 milliards d’euros de la PAC (Politique agricole commune), versés tous les ans par la France qui doivent compenser cet écart de coût. Il faut payer les paysans pour qu’ils fassent une meilleure qualité à un prix accessible au plus grand nombre. L’homme politique qui réussira cette équation sera un grand homme.
Le bio est-il la solution ?
Ce qui marche, c’est une agriculture de qualité, notamment le bio. Il faut s’inspirer de ce qui marche. Par contre, il va falloir mettre des règles dans le bio, faire en sorte qu’on trouve les débouchés. Il faut que l'on travaille sur la demande, qu’on organise la commercialisation pour que les citoyens aient accès à cette consommation bio à un prix accessible. Il faut changer de paradigme. Arrêtons d’encourager à produire plus ! Il vaudrait mieux utiliser décemment l’argent public pour aider cette agriculture de qualité.
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