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Témoignage "Ça se savait mais il ne se passait rien, je criais dans le vide" : cinq ans après #MeToo, une ex-militante En Marche! raconte son combat pour se faire entendre

La prise de conscience mondiale sur les violences sexistes et sexuelles, a permis de bouger les lignes dans tous les milieux, et notamment en politique où la parole a commencé à se libérer. Cinq ans après, une ancienne référente des Jeunes avec Macron, agressée par un autre militant, raconte la difficulté à se faire entendre.

Article rédigé par franceinfo - Victoria Koussa
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le podium lors de la campagne présidentielle En Marche!, le  2 mars 2017. (LIONEL BONAVENTURE / AFP)

Lors d'une soirée dans un bar, en plein hiver, en 2016 - avant #MeToo donc et avant l'élection d'Emmanuel Macron, Victoria, 23 ans, trinque avec d'autres militants conquis par l'ex-ministre de l'Économie. L'un d'eux l'agresse ce soir-là. Il lui soulève sa robe devant les autres, puis lui touche la poitrine. C'est ensuite pour elle la descente aux enfers.

"J’ai vrillé plusieurs fois, j’ai fait un très gros malaise dans un meeting, j’ai même failli me tuer en voiture un jour, raconte Victoria. Sur une route de campagne, j’étais dans la lune, j’ai roulé à gauche et un camion qui arrivait en face m’a fait des appels de phares qui m’ont quand même réveillée et je me suis remise sur ma voie. Mais j’étais dans une telle bulle d’angoisse, de stress !" Elle en parle, aux autres militants, aux cadres du mouvement En marche, mais rien n'y fait.

"J’étais considérée par le reste des gens, y compris au niveau du siège, comme la chouineuse de service."

Victoria, ex-militante En Marche!

à franceinfo

"Ça se savait mais en fait, il ne se passait rien c’est-à-dire que je criais dans le vide. J’avais envie d’avoir de l’aide, qu’on le sanctionne, j’avais envie qu’au moins on me protège !", poursuit Victoria.

>> "Depuis toutes ces années, je me bats dans le vide" : cinq ans après #MeToo, la prise en compte des témoignages de violences sexuelles et sexistes a-t-elle évolué ?

Comme d'autres victimes, ce n'est que quelques mois après, quand #MeToo éclate, qu'elle arrive à comprendre ce qu'elle a subi et à porter plainte. "Je me suis rendue compte que les gestes déplacés, c’était des agressions sexuelles et ça m’a permis de mettre des mots sur ma souffrance et de me rendre compte que c’était normal d’aller mal."

Un protocole pour les militants qui recueillent des confidences

Les années passent, le quinquennat aussi. Victoria, qui est devenue collaboratrice parlementaire, finit par gagner aussi au civil 1 euro symbolique. Le parti LREM, devenu Renaissance, finit, lui, par ouvrir une cellule contre ces violences, dans le sillage des affaires Quatennens et Bayou. "On aurait peut-être pu faire ça plus tôt, souligne Victoria. À l’époque, je sais que j’en aurais eu besoin mais on n’était pas encore prêt."

Mais "il n’est jamais trop tard", lance Victoria, qui n'en veut plus à la majorité, a même appelé Marlène Schiappa qui pilote cette cellule, pour lui donner des conseils : "former les référents dans chaque département et que chaque militant Renaissance, quand il entend une personne qui se confie, soit en capacité de suivre un protocole pour amener la personne à pouvoir être entendue, écoutée et protégée." Victoria se tient désormais à distance de la politique. Mais elle a décidé de s'engager pour les femmes, dans l'associatif.

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