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Usain Bolt est-il en train de tuer le sprint ?

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le sprinter jamaïcain Usain Bolt lors de sa victoire dans l'épreuve du 100 m des Mondiaux de Moscou, le 11 août 2013.  (LUCY NICHOLSON / REUTERS)

Le sprinter a remporté, dimanche à Moscou, le 100 m des championnats du monde. Vous ne connaissez pas les noms des coureurs qui complètent le podium ? Normal, le Jamaïcain écrase la discipline depuis plusieurs années.

Ça devient une habitude. Dimanche 11 août, Usain Bolt a remporté le 100 m des championnats du monde d'athlétisme de Moscou, avec le temps très respectable de 9"77. Son sixième titre mondial, sa quatrième médaille d'or sur 100 mètres, sans forcer. Le débat est déjà lancé pour déterminer si le Jamaïcain est le plus grand sprinter de tous les temps. Mais la Boltmania, idolâtrie autour d'un seul homme, est-elle en train de tuer l'athlétisme en général ? A vous de juger.

Oui, il écrase trop la concurrence

Usain Bolt n'a jamais été battu lors d'un grand championnat depuis 2008, si l'on excepte son faux départ aux Mondiaux de Daegu (Corée du Sud) en 2011. Tout juste note-t-on que ses performances stagnent. "Même si Bolt est probablement en train de décliner, il a toujours une marge considérable sur tous les autres", reconnaît l'entraîneur jamaïcain Stephen Francis dans le Jamaica Gleaner (en anglais)

Connaissez-vous Justin Gatlin, le coureur américain arrivé 2e de la finale du 100 m? Non ? Rien d'étonnant. Gatlin avoue sans difficulté dans le New York Times (en anglais) que "Bolt est un showman, un joueur, le meilleur du plateau". On ne connaît rien des vies des autres grands sprinters du moment. Asafa Powell, Tyson Gay – qui reconnaît lui-même :"Bolt est fun, je suis ennuyeux" – et autres Yohann Blake. Il n'y a guère que le Français Christophe Lemaitre, le-premier-Blanc-sous-les-10-secondes, qui a suscité l'intérêt de la presse mondiale.

Non, il intéresse au-delà de l'athlétisme

Le compte en banque d'Usain Bolt grossit de 20 millions de dollars chaque année, soit vingt fois ce que peuvent espérer ses concurrents directs, relève Forbes (en anglais). Une différence qui s'explique par son charisme – son geste mimant une flèche est devenu une marque déposée, reconnaissable entre mille – et son invincibilité.

Pendant ce temps, Usain Bolt sort en septembre prochain son autobiographie, la deuxième en trois ans, avec l'intention d'en faire un best-seller. Une troisième pourrait suivre, il n'a que 26 ans.

Non, il peut encore surprendre

"Je n'ai plus de buts", reconnaissait Usain Bolt en 2012 à Associated Press (en anglais). Il est double champion olympique du 100, du 200 et du 4x100 m, et détient tous les records du monde de ces disciplines. Personne n'a fait mieux en sprint. Bolt s'est remotivé, en annonçant que 2013 serait l'année des records. Pour preuve, cette interview à L'Equipe, dimanche 11 août : "Je sais que je vieillis, et si je veux pousser mon corps à ses limites, c'est maintenant. Je me suis donc fixé cet objectif." Pour le 100 m, c'est râpé, il n'a pas réussi à battre son record, mais si les conditions météo sont meilleures, pourquoi n'y parviendrait-il pas sur le 200 m?

Il peut aussi changer de discipline. Le recordman du monde du 400 mètres, l'Américain Michael Johnson, ne voit que lui pour aller le détrôner. "Il peut même devenir le premier athlète à courir le 400 m sous les 42 secondes", affirme-t-il à ESPN (en anglais). Ancien spécialiste de la distance, Bolt a ensuite délaissé le tour de piste pour des distances plus courtes. Mais il y revient progressivement.

Oui, l'après-Bolt sera difficile

"Que se passera-t-il quand Bolt sera blessé ou moins dominateur ?" s'est interrogé l'Américain Maurice Greene, ancien recordman du monde du 100 m, cité par le site spécialisé TrackAlerts (en anglais). La Fédération internationale d'athlétisme pourrait méditer l'exemple de la NBA, qui a dû composer avec l'après-Michael Jordan. Quand "Air Jordan" fait un break en 1993 après le meurtre de son père, la ligue de basket américaine se rend compte qu'elle n'a aucune tête de gondole marketing en stock. S'ensuit une chute d'un tiers de ses audiences télé en quelques semaines, relève le Bleacher Report (en anglais)

Le pire peut même arriver avant, si l'athlète, qui assure courir à l'eau claire, se fait prendre pour dopage. "Vous pouvez congeler mon sang pendant cinquante ans [et faire tous les tests possibles]", balaye Usain Bolt, très sûr de lui. 

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