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Avec son livre "Harcelée, dopée mais de retour !", Marion Sicot fait un pas dans sa reconstruction

La cycliste française a été suspendue deux ans pour dopage, après s'être injectée de l’EPO en 2019. 

Article rédigé par Hortense Leblanc, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
"Harcelée, dopée mais de retour !", un livre de Marion Sicot aux éditions Blacklephant, le 10 septembre en librairie (BLACKLEPHANT EDITIONS)

Contrôlée positive à l’EPO en juin 2019 et suspendue deux ans pour dopage, Marion Sicot reprendra la compétition dans quelques semaines. Avant cela, la cycliste sort un livre, vendredi 10 septembre, dans lequel elle décrit l’engrenage qui l’a poussée à se détruire et à trahir ses valeurs selon ses propres termes. Intitulé Harcelée, dopée, mais de retour !, il raconte les heures sombres traversées par la cycliste puis sa rédemption. 

Marion Sicot tentera, le 18 septembre prochain, de battre le record du monde du plus grand dénivelé positif en 24 heures à l’Alpe d’Huez. Si la coureuse de 29 ans est parvenue à se lancer ce défi personnel, c’est parce qu’elle déclare prendre à nouveau du plaisir sur un vélo, deux ans après son contrôle positif à l’EPO. 

Une descente aux enfers en plusieurs épisodes

Pourtant, la cycliste a longtemps souffert en selle. Depuis le début de sa carrière, Marion Sicot n’ose pas tenter sa chance en échappée, par peur d’être reprise. Elle est aussi effrayée à l’idée de frotter dans le peloton et de tomber. Rapidement, elle développe aussi des troubles du comportement alimentaire à cause d’une obsession pour son poids. 

Son rêve ? Rejoindre une équipe UCI (le premier niveau international). Après une expérience peu concluante dans l’équipe Servetto-Footon en 2015, elle accepte de faire des sacrifices financiers pour rejoindre la formation belge Doltcini-Van Eyck en 2018. Marion Sicot paye alors tous ses frais de déplacement et d’hôtel et est certaine qu’elle est la seule fille de l’équipe dans cette situation. Rapidement, cette expérience tourne au cauchemar. La cycliste française éprouve un manque de considération, une lassitude du surentraînement et de moins en moins de plaisir. Puis en 2019, son directeur sportif, Marc Bracke, lui demande des photos en sous-vêtements chaque semaine, sous prétexte de surveiller son poids. Par peur de ne plus être alignée, Marion Sicot se plie aux exigences de son supérieur, sauf quand il lui demande de poser en string. 

Pour se sortir du harcèlement et de l’emprise de Marc Bracke, Marion Sicot veut réussir de grandes performances : "Mais à force d’être équipière, de travailler pour les autres, de payer pour ça, de ne plus prendre aucun plaisir, de subir le comportement d’un directeur sportif avec lequel j’ai atteint un point de non-retour, je réalise que ma situation est devenue invivable. Que dois-je faire pour avoir un minimum de respect, de reconnaissance de sa part ? C’est là que l’idée de prendre un produit interdit naît en moi", raconte-t-elle dans son livre. Elle opte alors pour l’EPO, sans se renseigner, ni réfléchir aux conséquences : "Soit ça marche, je fais un résultat et Marc me laissera tranquille, soit je suis contrôlée positive et les choses s’arrêtent d’elles mêmes, je serais sortie de cet enfer par la force". 

Marion Sicot s’injecte le produit dopant le jour de son 27e anniversaire, le 24 juin 2019 et est contrôlée positive quelques jours plus tard. Déjà sonnée, elle prendra un deuxième coup au moral quand l’affaire sortira dans la presse le 20 septembre 2019. "Le pire jour de ma vie", écrit-elle. Malgré le soutien de ses proches, de ses amis, et de ses élèves de la section sport-études d’un lycée dans l’Indre, la cycliste s’enferme dans le mensonge pendant plusieurs semaines avant de trouver la force d’avouer sa prise d’EPO. 

Le livre, élément indispensable de sa "Sicot-thérapie"

Sa thérapie commence après cet aveu et plusieurs événements médiatiques l’aident à assumer son geste. Début 2020, elle accepte de témoigner devant les caméras de Stade 2 pour raconter le harcèlement qu’elle a vécu. Dans le même temps, le journal Le Monde rapporte que Marc Bracke a demandé des photos à plusieurs filles, ce qui permet à Marion Sicot de déculpabiliser.

Aidée par ses amis, elle se lance plusieurs défis sportifs pendant le premier confinement, qui l’aident à remonter la pente : "Je réalise que je ne suis pas finie, que j’ai encore envie de revenir et de retrouver l’adrénaline des compétitions". Malgré la lenteur des procédures, elle passe devant la commission des sanctions de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) fin 2020 et apprend, en janvier 2021, qu’elle n’est finalement suspendue que deux ans, au lieu des quatre réclamés par l’instance. Les larmes de détresse laissent alors place à des larmes de joie. 

"Harcelée, dopée mais de retour !", un livre de Marion Sicot aux éditions Blacklephant, le 10 septembre en librairie (BLACKLEPHANT EDITIONS)

Entamée dès 2020, l’écriture de ce livre a permis à Marion Sicot de mettre des mots sur les maux qui la rongent. Il est pour elle "un projet important tant pour (sa) thérapie et (sa) reconstruction que pour le partage de (son) vécu". Au cours des 325 pages du livre, elle adresse une lettre ouverte à ses futures concurrentes, lorsqu’elle pourra reprendre en fin d’année, pour leur demander pardon mais aussi rappeler qu’elle a payé sa dette. Marion Sicot aimerait que son témoignage alerte sur la réalité du cyclisme professionnel féminin et permette à des jeunes cyclistes de ne pas reproduire les mêmes erreurs.

"Harcelée, dopée mais de retour", de Marion Sicot - édité par Blacklephant éditions - 

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