Cyclisme : la recette de Wout van Aert et Mathieu van der Poel pour briller sur route comme en cyclo-cross
Un Belge dans une équipe néerlandaise contre un Néerlandais dans une équipe belge. Depuis quelques semaines, Wout van Aert (Jumbo-Visma) et Mathieu van der Poel (Alpecin-Deceuninck) se livrent une belle passe d'armes sur les circuits de cyclo-cross.
Avant la course des championnats du monde, prévue ce dimanche 5 février, à Hoogerheide (Pays-Bas), le premier mène d'ailleurs six victoires à quatre lors des manches de Coupe du monde cet hiver face à son meilleur rival. Une concurrence qu'ils entretiennent depuis leur jeunesse puisque les deux vont disputer dimanche leur 180e cyclo-cross en commun (le 138e chez les pros) depuis leur premier affrontement, en 2011.
Mais alors que sept des huit derniers titres de champion du monde de cyclo-cross ont été remportés par le duo (quatre pour "MVDP" contre trois pour "WVA"), les deux cadors moissonnent désormais les victoires sur route, que ce soit sur les classiques ou les grands tours. A l'heure où la saison des sous-bois boueux se conclut et laisse place à celle du bitume, franceinfo: sport vous explique comment les deux monstres font pour briller dans les deux disciplines.
Des aptitudes exceptionnelles
S'ils se sont fait connaître du grand public via leurs performances sur route, Wout van Aert et Mathieu van der Poel ont commencé le vélo sur les boucles de cyclo-cross. Cela leur a d'ailleurs permis de développer des capacités différentes des autres coureurs sur route. "Non seulement, le cyclo-cross leur a donné toute la technique requise par ses descentes engagées. Mais en plus, cela a stimulé leur capacité à répéter des efforts violents car une heure de cyclo-cross équivaut à une centaine de mini-sprints, estime Emmanuel Brunet, responsable performance à la Fédération française de cyclisme et ancien manager des équipes de France de cyclo-cross.
"C'est une qualité physique qu'on retrouve assez peu sur route. Cette spécificité est une vraie arme pour van der Poel et van Aert." Leur participation à la saison de cyclo est donc un vrai atout à l'approche de la saison sur route, d'autant qu'en restant mobilisés l'hiver, ils s'évitent d'avoir à perdre le poids accumulé à l'intersaison comme d'autres coureurs. En parcourant les sous-bois depuis tant d'années, les deux terreurs du peloton ont donc pu naturellement transposer leur lecture précise des trajectoires à la route, tout comme leur endurance.
Une gestion méticuleuse de leur calendrier
Cet atout nécessite toutefois une organisation de l'agenda très particulière pour les deux vainqueurs de Monuments sur route (le Tour des Flandres 2020 et 2022 pour van der Poel, Milan-San Remo 2020 pour van Aert). "Une condition obligatoire lorsqu'on s'aligne dans plusieurs disciplines", selon Emmanuel Brunet. Le Belge et le Néerlandais doivent en effet choisir leurs courses plus que n'importe quels autres cyclistes, quitte à ne pas faire toute la saison en cyclo-cross, ce qui explique d'ailleurs comment le Belge Laurens Sweeck a pu s'adjuger le classement général Coupe du monde cette année, grâce à sa régularité.
"Une fois l'hiver passé et le cyclo fini, même en ne faisant qu'une demi-saison, van Aert et van der Poel sont éreintés. Il leur faut du temps pour récupérer et s'entraîner à faible intensité afin de booster leur endurance et leur capacité à tolérer la fatigue, développe l'ex-manager du cyclo-cross tricolore. Sans cela, ils seront incapables de s'imposer sur route : il faut produire un sprint après des efforts de longue durée sur 150-200 kilomètres de course." C'est d'ailleurs pour cette raison que van Aert et van der Poel effectueront une pause d'un mois une fois les Mondiaux passés, pour revenir en forme aux Strade Bianche, le 4 mars prochain.
Une tradition en Belgique et aux Pays-Bas
Si les deux favoris des Mondiaux peuvent briller sur les circuits de cyclo-cross avant d'enchaîner sur route, ils le doivent notamment à leurs équipes respectives. Contrairement à plusieurs autres formations, les Néerlandais de chez Jumbo-Visma et les Belges d'Alpecin-Deceuninck permettent à leur champion de s'aligner en cyclo-cross, discipline très populaire en Belgique et aux Pays-Bas.
"Le cyclo est très médiatisé là-bas, bien plus qu'ailleurs, explique Emmanuel Brunet. Ce particularisme culturel facilite les négociations avec leurs employeurs car les sponsors, basés au Benelux, ont tout intérêt à ce que les deux continuent d'empiler les podiums." A l'inverse, les équipes américaines ou espagnoles spécialisées sur la route ne voient pas d'intérêt à ce que leurs éléments prennent part à des courses d'une discipline qui n'est pas olympique. Reste à savoir qui de Wout van Aert ou Mathieu van der Poel troquera ses couleurs pour l'arc-en-ciel à l'issue de la course de dimanche.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.