Giro 2023 : Thibaut Pinot, bien mieux qu'un au revoir
"On ne peut même pas dire qu’il était motivé, c’était plus que ça", résume le directeur sportif de la Groupama-FDJ, Sébastien Joly. Thibaut Pinot a beau avoir annoncé que 2023 serait sa dernière saison, il n'était pas sur le Tour d'Italie pour la beauté des paysages. Fringant cinquième du classement général au terme de la 21e et dernière étape du Giro, dimanche 28 mai, le coureur tricolore a été l'un des animateurs de l'épreuve. Le Français a refusé de disputer ce Tour d'Italie en préretraité, mais bien en prétendant, comme il ne l'avait plus été depuis des mois.
Le fer de lance de la Groupama-FDJ n'est peut-être plus exactement celui qui faisait rêver l'Hexagone d'une victoire sur le Tour de France. Mais après quasiment trois ans de galère, une blessure au dos jamais totalement résorbée et des doutes, Thibaut Pinot a retrouvé cette joie de se faire mal.
Sixième avant le contre-la-montre décisif, samedi, il a réussi à intégrer le Top 5 du général. "Il voulait faire le chrono de sa vie, et on peut presque dire qu’il l’a fait" s'est enthousiasmé Sébastien Joly. "Ce n’est pas un podium mais je voulais vraiment aller le chercher, car il signifie quand même beaucoup pour moi, confiait le Français à l'arrivée. J’y ai toujours cru, même quand j’ai eu mes jours sans."
Désormais "apaisé"
Thibaut Pinot est redevenu un grand champion et il l'a démontré. À lui-même, et à ceux qui ont douté de sa capacité d'être encore un coureur qui compte. Même quand des "pensées négatives" sont revenues en vieilles compagnes de route sur la 18e étape, le Franc-Comtois n'a pas cédé mentalement. Et cette fois, le reste du corps a tenu. "Je finis la troisième semaine vraiment bien. Physiquement, c’est vraiment le Grand Tour que je finis le mieux. J’en avais encore dans les jambes !" Pour un homme qui a culminé à la 3e place du Tour de France 2014, la 4e du Giro en 2017 et la 7e sur la Vuelta, c'est peu dire.
Cinq fois dans le Top 10 d'une étape en trois semaines, le triple vainqueur d'étapes sur la Grande Boucle ne s'est pas contenté des accessits. Souvent à l'avant, il est allé chercher le maillot de meilleur grimpeur au mérite. "Ce n’était pas non plus simple de jouer le maillot de meilleur grimpeur et le général. C’est donc une fierté d’avoir réussi ces deux missions. Je vais encore profiter pendant 24 heures, mais ce soir, je me sens apaisé, réagissait-il samedi. Je savais que je pouvais revenir à ce niveau-là, dans le top 5 d’un Grand Tour. Pour ça, je suis fier de moi. Je suis fier de n’avoir jamais rien lâché."
En parallèle des résultats, Thibaut Pinot a pu être le coureur qu'il aime, instinctif, offensif, un leader qui prend les échappées et se dépouille, loin du contrôle qui a longtemps caractérisé ce Giro. Parce qu'il n'a pas réellement fait de son classement une ambition grandiloquente, le reste de la meute lui a donné carte blanche. Avec, comme toujours ou presque avec le coureur de la Groupama-FDJ, cette alternance un peu déconcertante de hauts et de bas. Le coup de froid de la fin de la première semaine, celui de semonce loin des leaders sur le Monte Bondone lors de la 16e étape, cette victoire d'étape qui s'échappe au sprint à deux reprises.
Mais ce maillot azzurro de meilleur grimpeur s'est gagné à la pédale et pas en consolation. Et ce plaisir, surtout, d'être à la bagarre, jusque dans ce dernier chrono samedi. Sur les pentes insoutenables du Monte Lussari, Pinot a joué dans la même cour que les Geraint Thomas et João Almeida. Cinquième du jour, il n'a été devancé que par les quatre premiers du général. Preuve qu'il est bien à sa place, un ton en dessous du podium – à près de 4'30" du Portugais Almeida – certes, mais parmi les meilleurs.
Lui qui expliquait vouloir prendre congé du peloton à la fin de la saison, qu'il n'aurait "plus jamais son niveau de 2019" quand il était à la lutte pour remporter le Tour de France, vient de signer son meilleur résultat sur trois semaines depuis le Giro 2017 et sa quatrième place. Si ce Giro était le dernier Grand Tour de la carrière de Thibaut Pinot, il restera comme celui d'un coureur qui compte, sur la photo du palmarès avec son maillot de meilleur grimpeur. "Ça a toujours été un rêve de monter sur le podium final du Giro, expliquait-il jeudi au soir de la 18e étape. Ça ne sera pas le podium du classement général, mais ça reste une belle image."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.