Interview France-Israël : "Pas une bonne idée d’organiser ce match au Stade de France", craint un chercheur en sécurité intérieure

Les Bleus accueillent Israël, jeudi, dans un match classé à haut risque en raison des tensions au Proche-Orient et en Europe liées au conflit israélo-palestinien.
Article rédigé par Hortense Leblanc
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4min
Policiers patrouillant devant le Stade de France lors des Jeux olympiques de Paris, le 11 août 2024. (MAXPPP)

Malgré les violences qui ont émaillé le match de Ligue Europa entre l'Ajax Amsterdam et le Maccabi Tel-Aviv, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a réaffirmé que le match de Ligue des Nations opposant la France à Israël, jeudi 14 novembre, serait bien disputé au Stade de France comme prévu. Mathieu Zagrodzki, chercheur spécialisé dans la sécurité intérieure, plaidait plutôt pour une délocalisation en province. Confrontées à la même situation, les autorités belges avaient opté pour la Hongrie, organisant la rencontre Belgique-Israël à huis clos à Debrecen.

Franceinfo: sport : Les craintes autour de France-Israël sont-elles accrues après ce qu'il s'est passé à Amsterdam ?

Mathieu Zagrodzki : Les événements d’Amsterdam ne changent pas la donne, mais l'aggravent. Le dispositif annoncé était déjà impressionnant, je crois qu’il était question de 2 500 forces de l’ordre. À titre de comparaison, un OM-PSG, sans les supporters parisiens, c’était environ 600. Je pense que la principale crainte des décideurs était des manifestations politiques, des banderoles, à l’intérieur et à l’extérieur du stade, non pas qu’ils ignoraient la possibilité que des supporters israéliens soient pris à partie, mais le niveau de violence atteint à Amsterdam fait qu’on se dit probablement qu’il y a des risques de violences très graves envers les supporters. 

Peut-on craindre que les violences observées à Amsterdam se répètent à Paris ? 

Sur le type de comportement vu à Amsterdam, on peut penser que ce n’était pas quelque chose de très organisé et préparé en amont. Le plus gros risque, ce sont des incidents spontanés, parce que le ton monte et que deux groupes se font face. En revanche, ces événements d’Amsterdam peuvent bien entendu donner des idées à des individus, en France, qui n’ont d’ailleurs peut-être pas attendu ces violences à Amsterdam pour avoir ces idées. 

"Ça peut créer un phénomène de contagion, de réplique, qui forcément inquiète les autorités".

Mathieu Zagrodzki, chercheur spécialisé dans la sécurité intérieure

à franceinfo: sport

L’autre enjeu, c’est la protection de toute la délégation israélienne, qui va faire l’objet d’un encadrement extrêmement resserré et sécurisé. 

Le Stade de France est-il adéquat pour répondre à ces défis sécuritaires ?

Ce n’est pas une bonne idée d’organiser ce match au Stade de France, où les flux sont très importants et étendus, les stations de transport se trouvent assez loin, il y en a beaucoup avec trois lignes ferroviaires (RER B, D, ligne H), les métros (lignes 12, 13, 14) et les nombreux bus. Ça fait une sécurisation assez complexe, alors qu’en province, prenons l’exemple de Metz, un stade plus petit qui aurait peut-être fait le plein, avec moins de voies d’accès. Il y a sans doute des gens dissuadés d’aller au stade par peur des incidents [vendredi 8 novembre, seules 20 000 des plus de 80 000 places dont disposent le Stade de France avaient trouvé preneurs]. 

L’absence d’ultras, contrairement aux événements d’Amsterdam, amoindrit-il les risques d’affrontements ?

Le fait qu’il n’y ait pas d’ultras israéliens jeudi, comme ce fut le cas à Amsterdam, qui chantent et sont très visibles, contribuera peut-être à moins échauffer les esprits. Mais la situation internationale, avec les répercussions en France, est tellement tendue qu'il n’y a pas besoin de ça pour qu’il y ait possiblement des affrontements ou des agressions. Il y a une virulence qui fait que les gens portant les couleurs du pays pourront ne pas se sentir totalement en sécurité.

Selon vous, quelles sont les mesures à prendre pour sécuriser ce match à haut risque ?

Il faut beaucoup de présence visible des forces de l’ordre et des unités très mobiles pour éventuellement procéder à des interpellations. Il faut, un peu comme aux JO lors de la cérémonie d’ouverture, un flic par mètre. Je donne un exemple volontairement spectaculaire, mais la meilleure manière de dissuader, c’est la présence visible des forces de l’ordre. Outre le périmètre autour du stade et des stations de transports proches du stade, il faut des forces de l’ordre dans les quelques stations majeures, les points d’acheminement des spectateurs. 

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