Ligue des champions : malgré un Paris Saint-Germain toujours au rendez-vous des huitièmes, les clubs français ont-ils le niveau ?

Le PSG est le seul club français à s'être qualifié pour les huitièmes de finale de la C1, mercredi.
Article rédigé par Othélie Brion, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
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Temps de lecture : 2min
Les Lensois après leur défaite 6-0 face à Arsenal, mercredi 29 novembre, lors de la cinquième journée des phases de poule de la Ligue des champions. (IAN KINGTON / AFP)

Lens a su sortir par la grande porte. Éliminés de la Ligue des champions à l’issue du cinquième match de poule, les Artésiens se sont imposés face à Séville lors de la dernière rencontre, mardi 12 décembre, pour décrocher un ticket pour la Ligue Europa. Un succès qui n’efface pas la déroute historique des Sang et Or, face à Arsenal, 6-0, fin novembre, plus large défaite d’un club français en C1. A côté, la qualification du PSG - dans la douleur - pour les huitièmes de finale, ne constitue pas une immense surprise. Il faut dire que depuis dix ans, l’équipe francilienne sort des poules tous les ans, contrairement à ses consœurs de Ligue 1, visiblement pas encore au niveau de la compétition. 

Depuis la saison 2013-2014, seulement trois clubs tricolores sont parvenus à s’extirper des phases de poules aux côtés du PSG : l'AS Monaco (saisons 2014-2015 et 2016-2017), l'Olympique lyonnais (saisons 2018-2019 et 2019-2020) et le LOSC (en 2021-2022). Régulièrement, l'équipe francilienne est la seule à atteindre les huitièmes de finale. C’est arrivé à cinq reprises entre les saisons 2013-2014 et 2022-2023. 

En comparaison des quatre autres grandes nations européennes du ballon rond, les équipes françaises font figure de mauvais élèves. Sur les dix dernières années, 63% des clubs français sont, en moyenne, parvenus à franchir le cap des phases de groupes contre 90% des clubs anglais. Une statistique, qui pour la France, est largement boostée par la qualification annuelle du PSG car l'échantillon français est basé sur la présence de seulement deux équipes à six reprises, et de trois lors de quatre saisons. A contrario, les échantillons allemands, espagnols et anglais reposent sur la présence d'entre trois et cinq clubs. En terme quantifiable, cela signifie qu'il y a en huitièmes entre trois et cinq clubs anglais puis entre une et deux équipes françaises.

Mais alors pourquoi les clubs français n’y arrivent pas ? Pour l’ex-entraîneur du "Téfécé" et de l’OM en Ligue des champions, Elie Baup, le fait que la Ligue 1 soit une pépinière de talents y est pour quelque chose. "On a une super formation en France, mais dès qu’on a des jeunes qui percent, ils partent", argue-t-il. "On ne parvient pas à garder les meilleurs joueurs. Ceux de l’équipe de France par exemple, vice-champions du monde, évoluent à l’étranger", poursuit l’ancien entraîneur. Après le Brésil, la France est en effet le deuxième pays qui exporte le plus de footballeurs à l’international, même le PSG, par l'intermédiaire de sa star Kylian Mbappé, associé aux arrivées estivales de Lucas Hernandez, Ousmane Dembélé et Randal Kolo Muani, a tout de même pris des airs d'équipe de France. 

Un championnat peu attractif

Derrière cette première problématique, apparaît un "aspect financier", estime Elie Baup. Face aux mastodontes européens, les clubs français n’auraient pas assez de moyens pour garder leurs meilleurs joueurs et acquérir les stars du moment. Avec un budget - pourtant record - de 118 millions d’euros pour la saison 2023-2024, le RC Lens ne joue pas dans la même cour que Manchester City et ses 800 millions d’euros. 

Mais avoir le budget ne fait pas tout. "Regardez Lens, il n’avait pas les mêmes moyens financiers mais ils luttaient autrement, en ayant des joueurs, un entraîneur sérieux et un public qui les soutient. Ils ont été battus 6-0 par Arsenal, mais ça ne veut pas dire qu'ils n'avaient pas le niveau. A l’aller, ils les ont battus 2-1 d’ailleurs", tient à rappeler l’ex-entraîneur et consultant, Luis Fernandez. Dans un autre registre, "le PSG s’en tire depuis dix ans grâce à ses finances mais avec tout l’investissement, ils n’ont joué qu’une finale", ne manque pas de souligner l’ancien joueur et coach de l’équipe parisienne. Pour lui, les problèmes de gestion de certains clubs, à l’image de "Lyon ou Bordeaux", sont aussi à l’origine des désillusions françaises en C1.

Un manque de régularité au plus haut niveau

Deux clubs qui, par le passé, ont porté le championnat français. "Dans les autres pays, on retrouve toujours les mêmes clubs qui tirent les autres vers le haut. Manchester City, Chelsea en Angleterre, Le Bayern Munich, Dortmund en Allemagne, Le Real et le Barça en Espagne… Ce n’est pas le cas en France", regrette Luis Fernandez. Un manque de "régularité" que pointe aussi du doigt Elie Baup. "Pour être compétitif, il faut jouer régulièrement en Ligue des champions car c’est une gestion des joueurs, du repos qui est différente. Mais ce sont rarement les mêmes équipes françaises qui jouent la Ligue des champions. Cette année il y a eu Lens, par le passé, il y a eu Rennes une fois. Les joueurs découvrent la compétition, prennent de l’expérience le temps d’une année, mais cela est éphémère", explique le Haut-Garonnais. 

Le PSG est en effet le seul club français régulièrement présent en Ligue des champions avec dix participations en dix ans. Derrière, suivent l'OL et Monaco avec quatre participations. Des chiffres bien en deçà des grands clubs européens. Bien sûr, vis-à-vis des championnats anglais, espagnol, allemand et italien qui bénéficient de quatre places directement qualificatives pour la Ligue des champions, la Ligue 1 peut se défendre de n’avoir que deux quotas directs. Mais force est de constater qu’en France, le top deux de la Ligue 1 varie très régulièrement.

A titre d’exemple, le LOSC a remporté la Ligue 1 lors de la saison 2020-2021 avant de terminer huitième du championnat l’année suivante. En comparaison, au Portugal, les deux places qualificatives se jouent presque chaque année entre le Benfica Lisbonne, le Sporting Portugal et le FC Porto. A noter que le troisième du championnat français participe aussi chaque année aux barrages de la Ligue des champions. Mais à l’image de l’OM cette saison, éliminé par le Panathinaïkos et reversé en Ligue Europa, ce tour de qualification ne réussit pas non plus aux Français. En 10 ans, seul Monaco a réussi à rejoindre la C1, en 2016-2017.

Le nouveau format de la Ligue des champions attendu pour la saison 2024-2025 qui verra passer le nombre de clubs en lice de 32 à 36 pourrait cependant aider les clubs français à trouver un peu de stabilité. "Cela pourrait permettre aux meilleurs clubs d’éviter le tour préliminaire et donc de donner une forme de régularité pour le trio de tête. Un plus grand nombre de joueurs pourraient aussi découvrir la compétition mais en huitièmes on risque de retrouver toujours les mêmes équipes", prévient Elie Baup.

Alors, finalement, est-ce déjà trop tard pour les clubs français ? L’ancien entraîneur des Girondins préfère rester optimiste. "Le passage de la Ligue 1 à 18 clubs a aussi pour but d’augmenter la compétitivité et d’améliorer la qualité des équipes, souligne Elie Baup. On l’a vu, il y a déjà une évolution du jeu, une recherche pour être plus efficace, marquer plus de buts… Ce sont des choses très positives". A ces clubs, désormais, de le retranscrire plus régulièrement sur la scène européenne. 

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