: Témoignage franceinfo Affaire Noël Le Graët : "Il ne m'a jamais touchée, mais le harcèlement a duré plusieurs années", assure Sonia Souid, qui envisage de porter plainte
Après avoir livré des témoignages glaçants, à visage découvert, dans la presse, Sonia Souid revient, pour la première fois en détail, ce jeudi sur franceinfo sur ses accusations de harcèlement visant Noël Le Graët, ex-président démissionnaire de la Fédération française de football. Si à l'époque des faits qu'elle dénonce l'agente de joueurs ne s'était "même pas posé la question" de porter plainte, car elle "débutait dans sa carrière", désormais, elle envisage de le faire. "Depuis le mois de septembre et l'article de So Foot, je me suis rendu compte que d'autres femmes étaient concernées et victimes du comportement très inapproprié de M. Le Graët", s'émeut l'agente.
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Sonia Souid explique avoir été particulièrement "meurtrie" par la réaction et la ligne de défense de Noël Le Graët à la sortie des révélations sur son comportement. "Il défiait quiconque de trouver la moindre trace, il disait qu'il ne savait pas écrire de SMS, qu'il n'avait jamais harcelé personne dans sa vie", s'agace-t-elle sur franceinfo. L'agente regrette par ailleurs l'absence d'excuse de la part de l'ancien patron du football français : "Est-ce qu'il a eu la moindre pensée pour les victimes ? Non, il nie en bloc", s'insurge-t-elle. Sonia Souid dit avoir également été "estomaquée" par les "récentes déclarations de Noël Le Graët et de ses deux avocats".
Un appel à libérer la parole des femmes
Elle refuse de "laisser passer ça", notamment les propos tenus par Me Thierry Marembert, dans l'émission C à vous, sur France 5. L'avocat accusait mardi Sonia Souid de "mentir sur certains points" et "d'interpréter un certain nombre de messages". Sonia Souid se défend donc ce jeudi sur franceinfo, réfutant tout mensonge. "Qu'est-ce que j'aurais eu à gagner à part risquer de perdre ma carrière, ma réputation ?", s'indigne-t-elle. Elle assure que "la seule chose qui [l'a] animée et motivée" à livrer son témoignage était de pouvoir se regarder dans un miroir. "J'ai témoigné à visage découvert pour ma fille et ma petite sœur", explique-t-elle. L'agente appelle "toutes les victimes à s'exprimer" : "On doit dire stop, on ne peut plus laisser passer ça", lance-t-elle.
Pour la première fois, Sonia Souid revient en détail sur ses accusations à l'encontre de Noël Le Graët, évoquant tout particulièrement un dîner survenu alors qu'elle avait 29 ans. Le président de la FFF l'a alors invitée à son domicile parisien, où est aussi conviée Brigitte Henriques, en charge du football féminin à la FFF et qui finalement ne sera jamais présente. Si Sonia Souid a "trouvé étrange" cette invitation, elle explique avoir accepté et de ne s'en être "pas méfiée", car "il m'a dit qu'il faisait ça régulièrement et que c'était pour une question de confidentialité". "J'arrive au domicile parisien, je vois dans son salon deux coupes de champagne déjà servies", se remémore-t-elle. Elle affirme ne pas avoir "touché à la coupe de champagne", tandis que Noël Le Graët "lui, en revanche, boit et ça a dû le désinhiber".
"Il tombe sa veste de costume, il déboutonne le col de sa chemise, il est de plus en plus avachi sur son canapé, il écarte les jambes et il se caresse le bas-ventre"
Sonia Souidà franceinfo
Des "gestes pas normaux lors d'un rendez-vous professionnel", décrit l'agente. Elle soutient qu'à ce moment-là elle est "en panique", d'autant que Noël Le Graët lui "dit très clairement : 'De toute façon on n'a pas besoin de Brigitte Henriques, si on est assez proches tous les deux, j'arriverai bien à concrétiser les idées'", selon Sonia Souid.
Un message audio comme preuve
Elle se souvient avoir "le sang qui [lui] monte à la tête, avoir le souffle court". Elle se sent "humiliée, blessée au plus profond de [son] être face à son président qui [lui] manque de respect". "Je suis confrontée à une situation qui me met mal à l'aise au plus haut point", raconte l'agente, qui explique avoir pu partir du domicile. Elle assure ne pas avoir été agressée sexuellement : "Il ne m'a jamais touchée, il ne m'a jamais retenue de force, mais le harcèlement a duré plusieurs années", précise-t-elle.
Elle relate ainsi les appels "réguliers" de Noël Le Graët, l'invitant à dîner. Elle partage alors un message vocal laissé sur son téléphone en 2017, par le patron de la FFF : "Sonia, j'en suis à ma troisième bouteille, troisième, et je vous attends pour la quatrième", peut-on entendre dans cet audio. Ce message n'a "pas étonné" Sonia, car il était "le fruit de nos conversations assez souvent quand je prenais le téléphone". L'agente est, cela dit, à ce moment-là "bouleversée" parce qu'elle tient là "une trace tangible" qu'elle peut désormais "faire écouter à [son] entourage pour qu'il puisse se rendre compte de ce qu'[elle] vit". "Est-ce le moment le plus opportun de fréquenter intellectuellement une personne entre la troisième et la quatrième bouteille ?", s'interroge Sonia Souid.
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