A quoi ressembleraient les JO 2024 à Budapest ?
Franceinfo revient du futur et vous raconte comment la capitale hongroise a déjoué tous les pronostics en étant désigné comme ville organisatrice des Jeux olympiques, au détriment de Paris et de Los Angeles.
Cet article est une fiction, mais elle est bâtie sur des éléments bien réels.
C'est devenu un rituel. Les semaines précédant le début des Jeux olympiques, les journalistes venus du monde entier dénoncent l'incurie des pouvoirs publics, qui ont eu sept ans pour préparer les JO et qui ne terminent les préparatifs qu'au dernier moment.
En cet été 2024, Budapest, désignée le 14 septembre 2017 à Lima (Pérou), ne fait pas exception à la règle. La peinture sent le frais, les ouvriers ont travaillé d'arrache-pied, mais d'après le Premier ministre Tibor Navracsics, tout sera prêt à temps pour la cérémonie d'ouverture, vendredi 2 août 2024. Celui qui a succédé à Viktor Orban après un passage à Bruxelles au sein de la Commission européenne a passé la journée à répéter son discours. Nul doute qu'il inclura le slogan inventé par la délégation hongroise à son grand oral de Lima, en novembre 2016 : "La bonne ville au bon moment".
"Une ville qui n'est pas une mégapole peut accueillir les Jeux"
C'est avec ce discours mâtiné d'humilité que Budapest a fini par emporter la décision. C'est peu dire que la cité hongroise n'était pas favorite chez les bookmakers : face à Paris et à Los Angeles, deux mégapoles qui avaient déjà accueilli les Jeux, elle avait deux fois moins de chances, selon les preneurs de paris, d'être désignée. Tout était plus modeste dans le dossier de Budapest : le budget, fixé à 3 milliards d'euros, la taille des sites, concentrés sur dix kilomètres, et le pays, d'à peine 9 millions d'habitants.
"En nous choisissant plutôt que des mégapoles, le CIO a décidé d'envoyer un message : une ville de taille 'moyenne' [c'est un peu exagéré, car Budapest compte tout de même 1,8 million d'habitants] peut accueillir les Jeux, se félicitait Balázs Fürjes, patron du comité de candidature, peu après que Thomas Bach a ouvert l'enveloppe contenant le nom de Budapest. Rappelez-vous, pour accueillir les Jeux de 2016, c'était Chicago qui était favorite. Et en 2012, tout le monde misait sur Paris..."
Après avoir choisi quatre villes dont l'agglomération compte plus de 10 millions d'habitants à la suite (Pékin, Londres, Rio et Tokyo), l'instance a effectué un virage à 180°. Officiellement, c'est la conséquence de la mise en place de l'Agenda 2020, une jolie charte de bonne conduite où le CIO en appelle à des Jeux plus humains, au coût plus modeste. Plus prosaïquement, le choix de Budapest a permis d'adresser un message très clair aux décideurs des villes de taille moins imposante : vous aussi, vous pouvez accueillir les Jeux sans y laisser votre short.
Une manière de rassurer les citoyens de ce type de villes, toujours prompts à lancer des référendums pour faire capoter les candidatures (Hambourg en 2015, Oslo et Cracovie plus tôt...). Une excellente manière aussi d'avoir davantage de candidats pour les prochaines échéances : Lille, candidate malheureuse pour 2004 et Manchester, qui avait échoué piteusement en 2000, préparent ainsi un dossier pour 2032, pour faire face à l'ogre qatari qui s'est déjà lancé dans la course.
Les athlètes conquis, les économistes moins
Ce discours humble ne doit pas faire oublier que Budapest a battu deux villes qui disposaient déjà de plus de 90% des structures nécessaires. La ville hongroise a confié la plupart des aménagements à l'Etat, qui s'était surtout préoccupé, lors du mandat de Viktor Orban, de construire des stades de foot (plus de 500 en huit ans de mandat, dont un démesurément grand dans son village natal). La fameuse "malédiction du vainqueur", chère à l'économiste américain Victor Matheson qui a prophétisé dans la presse la ruine de l'économie hongroise (pourtant bien notée par les agences de notation) va-t-elle frapper Budapest ? A l'inverse, d'autres spécialistes (moins nombreux), comme le Danois Bent Flyvbjerg, affirment que beaucoup de secteurs de l'économie y gagnent : "Il y a une véritable armée de gens qui vont bénéficier des JO." Peut-être, comme le craignaient une majorité de Hongrois, les entreprises proches du Fidesz, le parti au pouvoir.
With our Stage 2 submission CGIs of three landmark venues have been released to the sport community #budapest2024 #mindentbele #timetofeel pic.twitter.com/rtF8O6vS7D
— Budapest 2024 (@GoBudapest2024) 17 octobre 2016
Les athlètes, en tout cas, semblent conquis. Oubliés les embouteillages monstres de Rio et son réseau de transport en commun ubuesque, qui en avaient découragé plus d'un de mettre une basket hors du village olympique. Les sportifs sont logés en plein centre-ville, certains ont même la chance de dormir dans les bateaux-hôtels amarrés le long du Danube. A l'approche de la compétition, il n'est pas rare de croiser un athlète se rendant à pied au parc olympique, ou un autre en train de reconnaître le parcours de la course cycliste en ligne, qui passe le long des remparts du château royal, un des sites les plus touristiques de la capitale hongroise.
Si l'Américaine Katie Ledecky, toujours juvénile malgré ses trois olympiades et ses douze médailles olympiques, passe inaperçue en ville, ce n'est pas le cas de la nageuse et gloire locale Katinka Hosszu, l'enfant du pays, qui tentera de monter une nouvelle fois sur les podiums, à 35 ans passés. Pas (encore) trace d'Usain Bolt, qui est attendu pour commenter l'évènement sur la chaîne américaine NBC comme consultant de luxe. Ni de l'acteur américain Tom Hanks, pas le dernier à vanter les mérites de la ville.
"Combler une énorme injustice"
C'est précisément en accueillant les championnats du monde de natation à l'été 2017 que la Hongrie a conquis les voix du CIO. Le pays, d'abord désigné pour les mondiaux de natation 2021, s'est substitué à Guadalajara (Mexique) au pied levé en bâtissant en un temps record une piscine de niveau international. La formidable prestation des nageurs locaux (qui avaient ramené la moitié des médailles hongroises aux Jeux de Rio) et l'enthousiasme débordant du public ont fait le reste. "Cela nous permet de combler une énorme injustice : nous étions le seul pays parmi les dix plus médaillés aux Jeux à n'avoir jamais accueilli l'évènement", rappelait le Premier ministre cette semaine. La brouille entre les Jeux olympiques et le pays touche à sa fin : en 1896, Budapest avait failli remplacer Athènes où les travaux s'éternisaient, avant de voir sa candidature retoquée en 1916, 1920, 1936, 1940 et 1960.
Oubliés aussi les voitures sans chauffeur qui transportaient les athlètes chaque matin et autres gadgets qui ont fait le charme de Tokyo 2020. Budapest 2024 a mis de côté l'esbroufe pour jouer la carte de l'authenticité. Tous les sites olympiques semblent comme posés au milieu de décors de carte postale, pour valoriser la beauté de la capitale hongroise. "Vous gagnerez à mieux nous connaître", avait répété inlassablement Balázs Fürjes pendant ses deux ans de lobbying pour convaincre les membres du CIO. Au tour du monde entier de situer Budapest sur la carte.
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